A travers cette série, Outremers360 vous propose de partir à la découverte des musées en outre-mer : leur histoire patrimoniale, sociale et territoriale, leurs collections, leur programmation culturelle et leurs projets à venir. Cette semaine, Outremers360 vous emmène dans l’archipel des Saintes, à quelques miles de la Guadeloupe, sur l’île de Terre-de-Haut, au sommet du Morne Mire, au Fort Napoléon, ancien site militaire stratégique aujourd’hui transformé en musée.
Gardien de la mémoire de l’île, le Fort Napoléon est un édifice remarquable qui représente non seulement un symbole de l'histoire des Antilles, mais aussi un lieu touristique majeur qui témoigne de la richesse patrimoniale de la Guadeloupe.
Christelle Pineau Judes, de l’Association saintoise de protection du patrimoine (ASPP) et directrice du Fort Napoléon a accepté de nous guider dans ce bastion chargé d’histoire.
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Le Fort Napoléon accueille chaque année près de 90 000 visiteurs venus du monde entier, curieux de découvrir les trésors qu’il recèle comme nous l’explique Christelle Pineau-Judes : « Notre public est vaste : de quelques mois à 98 ans voire plus. Nous essayons d'intéresser toutes les générations. Nous proposons également la visite du jardin botanique de cactus et agave, mais également la vue splendide sur la baie. » Le Fort Napoléon est le fort le plus visité de Guadeloupe. Il joue en effet un rôle central dans l’éco–tourisme culturel des Saintes et plus largement de la Guadeloupe. Les visiteurs ne s’y trompent pas. Le public revient ravi et enthousiasmé de la visite du Fort. Pour preuve, les témoignages et les avis partagés sur les forums internet sont tous dithyrambiques sur ses jardins et son emplacement idéal. Le Fort domine en effet toute la baie des Saintes et se dresse comme un gardien silencieux de l'histoire mouvementée des Antilles.
Un bastion qui n’a jamais servi militairement
L'histoire du Musée Fort Napoléon, sur l’île de Terre-de-Haut dans l'archipel des Saintes en Guadeloupe, remonte au 19e siècle. A cette époque les îles des Caraïbes étaient le théâtre de luttes pour la domination coloniale entre les Anglais et les Français. En 1867, sous le règne de Napoléon III, l’édifice est reconstruit sur l’emplacement de l’ancien Fort Louis entièrement détruit par les Anglais en 1809. Construit pour protéger la baie qui constituait une position stratégique dans la région, aucun coup de feu n’a été tiré depuis le Fort Napoléon.
Dominant la colline de Morne Mire, le Fort Napoléon est construit sur le modèle des bastions et fortifications militaires érigés par le célèbre ingénieur militaire et architecte français Vauban. La construction épouse le relief rocheux et propose un système défensif sophistiqué comprenant des batteries d'artillerie, des murs épais et des casemates pour abriter les soldats et le matériel. Les canons et les fortifications solides témoignent de la nécessité de défendre les colonies françaises contre les attaques éventuelles. Pendant des décennies, il a rempli son rôle de poste de défense, surveillant les mouvements maritimes dans les eaux environnantes et protégeant les habitants des Saintes des menaces extérieures.
Au fil du temps, avec l'évolution des techniques militaires et de défense, l'importance stratégique du fort diminue. Le Fort connaît ensuite de longues périodes d'abandon.
Ce n'est que dans les dernières décennies du 20e siècle que des efforts sérieux sont entrepris pour restaurer le Fort et lui redonner vie en tant que lieu culturel et historique.
Un musée pour les Saintois
En 1980, la commune de Terre-de-Haut se voit confier par la préfecture le soin de mettre en œuvre la politique d’animation, de restauration et d’entretien du Fort Napoléon : « En 1978, le Fort est occupé par le club du vieux manoir, le Maire de l'époque Monsieur Robert Joyeux souhaite que ce Patrimoine Saintois reste en gestion aux Saintes. Il crée l'Association saintoise de protection du patrimoine et en 1980 il décide avec une équipe de bénévoles d'en faire un musée », nous explique Madame Pineau Judes. En 1997, le Fort a fait l’objet d’un classement au titre des monuments historiques.
Les travaux de restauration ont nécessité l’implication de tous, comme nous l’explique la Directrice du Fort : « Tout d'abord, avec les employés de la collectivité, il y a eu un gros nettoyage, puis deux embauches pour permettre de faire vivre le site. Un guide qui faisait également fonction de jardinier et une hôtesse d'accueil qui pouvait être guide également. Les aménagements de salle se faisaient grâce à la main d'œuvre des employés communaux. Quand l'association a pu générer suffisamment de fonds, elle a pu commencer à investir. En 1984, en partenariat avec la mairie et le conseil général de l'époque, l'événement La Route des fleurs a été créé. Un partenariat avec les jardins de Monaco a commencé. »
Plus récemment, en 2021, grâce au soutien de la préfecture et du conseil départemental, gestionnaire du site, et dans le cadre de la déclinaison territoriale du plan France Relance, le Fort Napoléon a bénéficié de travaux de restauration de mise en sécurité, d’accessibilité et de sauvegarde du bâti.
Le musée abrite des expositions variées, des collections d'objets historiques, des œuvres d'art et des témoignages qui illustrent la riche histoire et la diversité culturelle des Saintes et de la Guadeloupe. « Les collections sont constituées de don, et d'achats. Les salles ont été aménagées en fonction de l'histoire des îles » nous précise la Directrice. Le Fort offre également un petit jardin botanique dédié aux plantes grasses auxquelles se mêlent de nombreux iguanes et expose une série de costumes traditionnels aux couleurs vives et chatoyantes.
Lieu de mémoire pour les générations futures
Le Fort Napoléon demeure un lieu historique majeur qui témoigne du passé de l'île. Il participe chaque année à la manifestation « Fò an fanmi », organisée par le Conseil Général de la Guadeloupe, en souvenir du combat de Louis Delgrès contre le rétablissement de l’esclavage par Napoléon Bonaparte, le 20 mai 1802.
Cette année, le Fort animera plusieurs événements commémorant l'abolition de l'esclavage en Guadeloupe le 27 mai, célèbrera les fêtes du 15 août et participera aux journées du patrimoine 2024. L’enjeu désormais, selon Christelle Pineau Judes, est de toucher davantage les jeunes générations technophiles : « Mon rêve serait de proposer aux nouvelles générations une expérience numérique immersive leur permettant de voyager dans le temps. » À travers les siècles, le Fort a su conserver son allure imposante et sa signification symbolique, devenant un repère immuable dans le paysage changeant des Antilles.
Aujourd'hui, le Musée Fort Napoléon est devenu un point d'ancrage important pour la communauté locale et un lieu incontournable pour les visiteurs intéressés par le patrimoine historique et culturel de la région. L’engagement et l’implication de l’Association saintoise de protection du patrimoine, du conseil départemental et de la commune dans la préservation et la mise en valeur du site témoignent de l'importance de préserver le patrimoine et de le transmettre aux générations futures.
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Dans la série Musées en Outre-mer :
