Sénatoriales 2023 : Des surprises en Outre-mer

©DR (illustration)

Sénatoriales 2023 : Des surprises en Outre-mer

Les issues des scrutins sénatoriaux de ce dimanche ont réservé bien des surprises dans les territoires Outre-mer appelés à renouveler leurs représentants dans la Chambre haute, et plus précisément en Nouvelle-Calédonie, à La Réunion, à Mayotte, en Guadeloupe, en Martinique et à Saint-Pierre et Miquelon.

En Nouvelle-Calédonie, tour de force indépendantiste

« Camouflet historique », « coup de tonnerre », « séisme politique ». Dès dimanche matin, la première double surprise est venue de Nouvelle-Calédonie, avec l’élection, dès le premier tour, du dissident LR Georges Naturel, puis au second tour, du premier indépendantiste à siéger au Sénat, Robert Xowie.

Si la victoire de ce dernier au second tour pouvait être envisageable -il avait déjà une avance sur Sonia Backès et Pierre Frogier sans les voix indépendantistes parties soutenir Georges Naturel au 1er tour-, l’accord qui aurait été passé avec le non indépendantiste dissident a fait imploser la bulle Les Loyalistes et sa tête de file, infligeant au passage un revers au gouvernement à qui les indépendantistes avaient demandé davantage d’impartialité. 

« Il y a plusieurs « non » » à l’indépendance, analyse Louis-José Barbançon, historien, interrogé par Nouvelle-Calédonie La 1ère. « Le « non » de monsieur Naturel et des grands électeurs qui ont voté pour lui n’est pas le « non » de Sonia Backès et encore moins celui de Nicolas Metzdorf ». L’historien estime que les non indépendantistes s’étant alignés pour Georges Naturel puis Robert Xowie « ont voté contre Sonia Backès », à qui l’on reproche de vouloir accumuler les mandats, alors qu’elle occupe la présidence de la province Sud et le secrétariat d’État à la Citoyenneté. D'après le député Renaissance Nicolas Metzdorf, interrogé par RRB, la secrétaire d'État pourrait remettre sa démission au président de la République cette semaine. 

Lire aussi : Sénatoriales 2023- Nouvelle-Calédonie : Double surprise, le maire de Dumbéa Georges Naturel et le candidat indépendantiste et maire de Lifou Robert Xowie élus sénateurs, la secrétaire d'Etat Sonia Backès battue

Maintien du 3ème référendum, discours de la Place des Cocotiers, projet d’accord, vidéo de soutien de Gérald Darmanin : « Les indépendantistes ont envoyé un message à Emmanuel Macron et aux représentants de l’État qui ne prennent pas au sérieux les indépendantistes et leur revendication. Ce message arrive après la venue d’Emmanuel Macron, après son discours qui n'a pas été accepté dans le monde kanak », ajoute Louis-José Barbançon qui salue « l’esprit de Nainville et de la poignée de main » qui a animé cette alliance indépendantiste-non indépendantiste visant à défaire Sonia Backès et Pierre Frogier.

Accord ou pas, le scrutin de dimanche illustre aussi les rivalités des différentes chapelles non indépendantistes face à des indépendantistes plus unis, notamment pour ce scrutin où Robert Xowie était l’unique candidat du FLNKS, porté par le maillage local de l’Union calédonienne et du Palika. D’ailleurs, l’ancrage local des deux vainqueurs fait là aussi ses preuves. Tous deux maires, Georges Naturel a présidé l’association des maires de Nouvelle-Calédonie tandis que Robert Xowie préside celle des maires indépendantistes.

À La Réunion, la droite résiste

Certes, la liste d’union de la droite et du centre a laissé deux sièges sur quatre et perdu en voix (755 voix en 2017 pour l’union UDI-LR menée par Nassimah Dindar contre 478 voix pour la liste de droite proche d’Emmanuel Macron en 2023), mais elle était à la fête dimanche soir. Le scrutin de dimanche a légèrement supplanté les attentes et a aussi renforcé des personnalités politiques locales comme Michel Fontaine, à l’initiative de cette liste d’union, et Cyrille Melchior, président du département. 

Lire aussi : Sénatoriales 2023 - La Réunion : La sénatrice sortante Viviane Malet réélue, Audrey Belim, Evelyne Corbière et Stéphane Fouassin font leur entrée au Palais du Luxembourg

Si, à gauche, on revient au Sénat après 6 ans d’absence, les deux sièges gagnés ont laissé entrevoir une rivalité entre la présidente de la Région, Huguette Bello (PLR), et la maire de Saint-Denis, Ericka Bareigts (PS). Après s’être unies lors des municipales de 2020, puis lors des Régionales et des Législatives, les deux femmes de gauche ont fait jeu à part pour ces sénatoriales. C’est finalement l’ancienne ministre des Outre-mer sous François Hollande qui supplante l’ancienne députée GDR, grâce notamment au soutien de partis ou d’élus plutôt proches de cette dernière. La candidate d'Ericka Bareigts, Audrey Bélim, est arrivée 2ème du scrutin, devant celle d’Huguette Bello, Evelyne Corbière Naminzo, arrivée 3ème.

La Réunion illustre le poids électoral des partis traditionnels PS/LR, qui se sont maintenus à l’échelle locale. Car comme de nombreux territoires, les listes réunionnaises soutenues par Renaissance et le RN échouent, par manque d’élus locaux.

En Guadeloupe, la percée du GUSR

Si le parti présidentiel n’a pas beaucoup percé pour ces sénatoriales à l’échelle nationale, le GUSR, considéré proche de Renaissance, plutôt à sa gauche, a sauvé les meubles et, en Guadeloupe, réalisé une belle percée dans une gauche divisée. Car en plus d’avoir fait réélire le sénateur sortant Dominique Théophile, les grands électeurs, du moins 295 des 797 votants, ont aussi hissé au Luxembourg la seconde de liste, Solanges Nadille, qui fait ainsi son entrée au Sénat. Le bon résultat de cette liste fait la part belle au président du département Guy Losbar, qui dirige le parti GUSR.

Lire aussi : Sénatoriales 2023 - Guadeloupe : Les sénateurs Victorin Lurel et Dominique Théophile conservent leurs sièges, Solanges Nadille, nouvelle sénatrice de Guadeloupe

Outre Dominique Théophile et Solanges Nadille, Victorin Lurel a lui aussi remporté un ticket pour le Sénat. L’ancien ministre des Outre-mer, et sénateur sortant, a résisté aux dissidences des socialistes guadeloupéens, qui furent nombreux à concourir au scrutin, notamment la sénatrice sortant Victoire Jasmin ou encore, Jocelyn Sapotille, maire du Lamentin et président de l’association des maires, ancien membre du PS local. Le résultat du sénateur sortant et plus généralement des listes socialistes traduisent une perte de vitesse du PS guadeloupéen, au profit du GUSR de Guy Losbar. 

En Martinique, Catherine Conconne haut la main

La sénatrice sortante, siégeant au groupe socialiste au Sénat, a été élue dès le premier tour, avec 479 voix sur 809 grands électeurs. Catherine Conconne qui fut membre du Parti progressiste martiniquais de Serge Letchimy, a prouvé dimanche sa capacité à se maintenir sans la formation politique majoritaire à la Collectivité territoriale. Un résultat probablement dû à l'implication et la mobilisation de la sénatrice pour son île, saluées depuis son arrivée au Sénat en 2017. Son mouvement, la Martinique ensemble, n'ayant que 8 élus, la sénatrice a rassemblé delà. Au second tour, Catherine Conconne a appelé à voter pour le second candidat élu, Frédéric Buval, soutenu par Alliance -coalition de partis majoritaires à la Collectivité territoriale- et le Mouvement Initiative Populaire de Bruno Nestor-Azérot.

Lire aussi : Sénatoriales 2023- Martinique : La sénatrice sortante Catherine Conconne réélue au 1er tour, le maire de Trinité Frédéric Buval entre au Sénat

À Saint-Pierre et Miquelon, le retour d’Annick Girardin

Dans l’archipel nord-canadien, l’ancienne ministre des Outre-mer a enregistré un succès ce dimanche. Après avoir battue aux Territoriales de 2022 sur l’archipel, Annick Girardin a signé un retour en grâce avec une victoire au premier tour (20 voix). Dès l'annonce de sa candidature, l'ancienne ministre mais aussi députée a précisé qu'elle siégerait au sein du groupe RDSE (Rassemblement Démocratique et Social Européen) au Sénat, comme son prédécesseur Stéphane Artano.

Lire aussi : Sénatoriales 2023: L'ancienne ministre Annick Girardin élue dès le premier tour à Saint-Pierre-et-Miquelon, deuxième femme sénatrice de l'archipel

À Mayotte, 3ème mandat pour Thani Mohamed Soihili

Le sénateur sortant, siégeant au groupe du parti présidentiel RDPI, a sauvé son siège alors qu’il n’était pas en ballotage favorable à l’issue du premier tour. C’est en effet l’apport des voix de deux candidats s’étant désistés et ayant appelé à voter pour lui que le sénateur sortant a sauvé son siège. Élu avec lui, mais dès le premier tour : Saïd Omar Oili.

Lire aussi : Sénatoriales 2023- Mayotte : Un troisième mandat pour Thani Mohamed Soihili, le maire de Dzaoudzi Saïd Omar Oili devient sénateur

À l’échelle nationale, ces sénatoriales 2023 ont eu pour issue le maintien de la droite comme principale force politique à la Chambre haute, restant majoritaire avec 200 sièges sur 348. La gauche (socialistes, écologistes et communistes) progresse et demeure le second groupe du Sénat avec 64 sièges. Le parti présidentiel, de son côté, ne gagne pas de siège. Il devrait même en perdre selon le président du groupe RDPI François Patriat. Le scrutin de dimanche est également marqué par le retour du RN avec trois sièges, et l’entrée du parti d’Édouard Philippe Horizon, qui devrait grossir les rangs du groupe Indépendants, Libertés et Territoires, proche du parti présidentiel.

Lire aussi : Sénatoriales 2023 en Outre-mer : Les 14 sénatrices et sénateurs qui siégeront au Palais du Luxembourg