Adaptabilité et souplesse, maître-mots de la Banque des Territoires pour les Outre-mer du Pacifique

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Adaptabilité et souplesse, maître-mots de la Banque des Territoires pour les Outre-mer du Pacifique

En marge de la présentation de ses résultats, la Banque des Territoires a souhaité aller au-delà des chiffres pour les Outre-mer du Pacifique, avec Hervé Tonnaire, qui dirige cette zone à laquelle est rattaché Saint-Pierre et Miquelon. Transitions écologique et énergétique, cohésion sociale et territoriale et soutien au développement économique sont les grands sujets qui intéressent la Banque des Territoires dans le Pacifique.

« Adaptabilité » et « souplesse », mais aussi « écoute » et « respect » : la Banque des Territoires se veut être, pour les territoires du Pacifique, un acteur du « développement territorial pour les territoires ». « Les Outre-mer ont leurs particularités, la zone Pacifique en a encore davantage : un éloignement supérieur, des sujets institutionnels spécifiques, avec leur très large autonomie. Donc ce qui marque notre intervention, c’est l’adaptabilité, la souplesse », explique Hervé Tonnaire, Directeur délégué aux Outre-mer et directeur régional de la Banque des Territoires Pacifique.

Dans cette région comme dans les autres bassins ultramarins, la filiale de la Caisse des Dépôts et Consignations a deux objectifs majeurs : les transitions énergétiques et écologiques, et la cohésion sociale et territoriale. Avec toujours un regard sur le développement économique, notamment le tourisme et l’innovation. Et que ce soit sur son bilan ou ses perspectives, l’organisme affiche des « ambitions », sans « aucune prétention » assure-t-on, et toujours « en adaptant ses outils et en restant respectueux de ses partenaires ». 

En Nouvelle-Calédonie, la démarche engagée de la Banque des Territoires concerne le développement des énergies renouvelables. En 2022, elle a notamment fait une prise de participation à 49% dans Enercal Énergies Nouvelles, la filiale énergies renouvelables de la SEM de production, de transport et de distribution d’énergies dans l’archipel. « À travers cette participation, la Banque des Territoires va contribuer à renforcer la situation financière d’Enercal Énergies Nouvelles et à soutenir la filiale d’Enercal dans le développement de ses projets (objectif : 76 MW) afin de répondre aux besoins de la Nouvelle-Calédonie en matière d’énergies renouvelables » avait expliqué la Banque des Territoires. Montant de l’opération : 2,9 millions d’euros.

« On est entré aussi au sein du groupe de travail du gouvernement calédonien sur le verdissement de l’industrie du nickel, qui nous paraît être un axe majeur qui va demander un fort travail de discussion et de concertation, et d’imagination pour le financement car on aura des projets très lourds » ajoute Hervé Tonnaire. Un exemple : la mise en place d’une station d’énergies par pompage, dont l’investissement pourrait être estimé entre 300 et 500 millions d’euros. Sur le sujet du nickel, Hervé Tonnaire décrit la Banque des Territoires comme « un acteur qui, aux côtés de l’État, des Collectivités et des acteurs locaux, va essayer de porter le financement du verdissement de l’industrie du nickel ».

En Polynésie, la Banque des Territoires revendique également un « axe fort » sur les énergies renouvelables, mais aussi sur les mobilités nouvelles. Un projet en exemple : l’accompagnement de la commune de Moorea-Maiao à la création d’une SEM, dans laquelle la Banque des Territoires pourrait être actionnaire, pour développer la production d’énergies renouvelables, alors que la commune-île a « repris en main l’exploitation énergétique ». La Banque se positionne aussi sur le renouvellement de la flotte des navires « pour la décarbonation ». Elle a notamment participé au financement du Apetahi Express, navire grande vitesse qui devrait bientôt desservir les îles sous-le-vent, et a été approché pour deux autres projets, dont un portera sur un navire à propulsion vélique.

La Banque des Territoires a participé au financement de l'Apetahi Express, à hauteur de 2,5 millions d'euros 

« Souvent, faire un navire vélique par exemple, ça coûte plus cher, c’est plus risqué, donc on se sent légitime à aider les acteurs, y compris les privés, qui prennent leur part dans la transition écologique et énergétique. On va entrer au capital et ça rassure les banques qui vont prêter plus facilement » explique, en exemple, Hervé Tonnaire. En répondant présent sur le renouvellement des flottes, la Banque remplit deux de ses vocations : les transitions à travers des « navires neufs aux propulsions plus propres pour baisser les émissions carbones », et la cohésion des territoires, insulaires en l’occurrence. 

À Saint-Pierre et Miquelon, la Banque des Territoires a mis en place une « offre d’appui à la commune de Miquelon sur la lutte contre le changement climatique car la commune devrait être la plus impactée de France ». Il s’agit plus précisément d’un portage d’ingénierie de projets.

« Le logement et l’habitat, un enjeu depuis plus d’un siècle »

Sur le deuxième axe fort de la Banque des Territoires, c’est-à-dire la cohésion sociale et territoriale, Hervé Tonnaire rappelle que « le logement et l’habitat, c’est un enjeu pour nous depuis plus d’un siècle ». En Nouvelle-Calédonie, elle a apporté 4,1 millions d’euros de capital dans la SEM Agglo et travaille avec la Société immobilière de Nouvelle-Calédonie pour l’aider dans son plan de redressement.

En Polynésie, la Banque se penche sur la création d’une SEM ensemblière « pour porter de l’aménagement, pour faire des zones d’habitats ou d’activités, dans laquelle il y aurait le pays et d’autres acteurs ». En d’autres termes, « créer un outil ensemblier pour faire du foncier qui serait utilisé par les acteurs du logement comme l’OPH, ou d’autres acteurs qui feront du développement économique comme G2P ». 

La cohésion sociale et territoriale, pour la Banque des Territoires, c’est aussi la santé. « On est en train de regarder, discuter pour accompagner la modernisation de l’hôpital de Saint-Pierre et Miquelon, et pour accompagner la construction du nouvel hôpital de Wallis et Futuna ». Sur l’insertion et la formation, autres thèmes de la cohésion, la Banque des Territoires entend accompagner la CCI calédonienne « qui réfléchit à structurer et regrouper sur un seul site toute l’offre de formation ».

« On a toujours une volonté forte d’accompagner le développement touristique dans ces territoires, même si pour l’instant on n’a pas pu concrétiser d’investissement touristique dans le dur, dans le mur, à part le lancement de l’hôtel Wadra Bay en province des Îles, pour lequel on a apporté 5 millions d’euros » a poursuivi Hervé Tonnaire. Il cite aussi la proposition en Polynésie et en Nouvelle-Calédonie de sa filiale Alentour, « une plateforme numérique d’appui aux pro du tourisme ». « On essaye aussi de faire du développement économique à travers « Territoires d’Innovation », qu’on porte par mandat de l’État, en Nouvelle-Calédonie. On porte aussi le Plan d’investissement Outre-mer pour lequel il y a eu deux lauréats en Nouvelle-Calédonie et en Polynésie : on essaye d’aider au plan d’innovation ».

Le Wadra Bay à Lifou, en province des Îles Loyauté ©Denis Callé

Voilà pour les grands projets, les accompagnements, les actions de la Banque des Territoires dans le Pacifique. « Nos axes d’efforts sont d’accompagner les collectivités et territoires sur les sujets qui vont être complexes techniquement, lourds financièrement, sur la transition énergétique et écologique, avec des financements particuliers », insiste Hervé Tonnaire.

« On a aussi l’accompagnement aux acteurs privés et c’est ce qu’on fait sur le renouvellement de la flotte de navire » ajoute le directeur de la Banque qui « met au même niveau le retour environnemental, et la responsabilité sociale vis-à-vis des salariés », « on met des exigences environnementales aussi importants que nos critères financiers ». « On est prêt à accompagner les gens qui veulent faire des choses avec nous ».

Des prêts à 60 ans et à taux bas pour rassurer les acteurs locaux

Et sur des « territoires qui ont leurs propres modes de fonctionnement », « on essaye de trouver avec les partenaires ce que nous, de notre côté, on peut faire, notre ingénierie, nos financements ». Et sur les financements d’ailleurs, la Banque des Territoires applique une méthode de « prêts de temps long pour des enjeux de temps long ». « Ça permet de faire des investissements qu’on ne saurait pas faire », explique Hervé Tonnaire. 

Résidence Takutea de Dumbéa en Nouvelle-Calédonie, construit par la SEM Agglo

Ainsi, la Banque des Territoires a mis en place des offres de prêts pouvant aller jusqu’à 60 ans, au taux du Livret A auquel s'ajoutent 40 centimes, soit un taux de 3,40, pour les projets dans les domaines des transitions. Pour les sujets de la cohésion, la durée peut également aller jusqu’à 60, toujours au taux du Livret A, mais en ajoutant 60 centimes. « Aucune banque n’est capable de prêter au-delà de 30 ans » assure Hervé Tonnaire, soulignant un dispositif « rassurant » pour les acteurs publics et privés demandeurs de financements. « On est une banque publique de développement » défend le directeur Outre-mer et Pacifique, « on essaye de trouver des réponses de longs termes sur les sujets très complexes ».

Côté chiffres, en 2022, la Banque des Territoires accordé 40,19 millions d’euros de prêts, apporté 11,66 millions d’euros d’investissements en fonds propres, soit le double des Antilles, et 23,96 millions d’euros de dépôts et consignations se sont ajoutés aux 100 millions déjà consignés à la CDC pour l’industrie du nickel. Ces 100 millions, alimentés par l’industriel Vale, sont une garantie que seule la province Sud peut déconsigner en cas, par exemple, de catastrophe environnementale. En Polynésie, la Banque des Territoires va prolonger son agence ouverte en 2021, et très probablement la renforcer en 2024.