Le cyclone Chido a fait « certainement plusieurs centaines » de morts à Mayotte, « peut-être » même « quelques milliers », a déclaré dimanche le préfet de Mayotte, François-Xavier Bieuville, précisant qu'il sera « très difficile » d'avoir un bilan final.
« Je pense qu'il y aura certainement plusieurs centaines, peut-être approcheront nous le millier, voire quelques milliers » de morts, a déclaré François-Xavier Bieuville sur la chaîne publique Mayotte la 1ère. Il sera « très difficile d'avoir un bilan final » étant donné que la tradition musulmane, très ancrée dans les quartiers d'habitat précaire entièrement détruits, veut que les personnes soient enterrées « dans les 24 heures ». Un premier bilan communiqué ce dimanche matin faisait état de 14 victimes.
Son homologue réunionnais, le préfet Patrice Latron, « préfet de la zone de défense et de sécurité du Sud de l’océan Indien », a activé « l'article 742-2-1 du code de la sécurité intérieure qui attribue des pouvoirs étendus au préfet de Mayotte en matière de gestion de crise ». « Compte tenu de la situation très critique à Mayotte et d'un retour à la normale qui n'est pas attendu avant plusieurs mois, cette disposition doit permettre de faire face aux risques en termes d’ordre public, sanitaire, ou en matière d'accès aux biens de première nécessité ».
« Concrètement, ces dispositions permettent au préfet de Mayotte, autorisé par le préfet de la zone de défense et de sécurité du Sud de l’océan Indien, d'exercer une autorité fonctionnelle sur l'ensemble des services de l’État pour les seules mesures liées à la gestion de la crise post-cyclonique. L'objectif est d'inscrire l'action des services déconcentrés et des établissements publics de l’État dans un cadre cohérent et sous une direction unique. Il s’agit donc d’un régime juridique d’urgence et d’exception permettant au préfet d’étendre son autorité en vue de rendre plus performante la gestion de la crise », précise le communiqué de la préfecture de La Réunion.
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D'après le maire de Mamoudzou Ambdilwahedou Soumaila, neuf personnes blessées ont été prises en charge au Centre hospitalier de Mayotte (CHM) en urgence absolue, et 246 en urgence relative, ce dimanche matin. L’édile du chef-lieu a découvert des « scènes de chaos » dans sa ville où « rien n’a été épargné » par le passage du cyclone. « Les équipes sont sur le pont depuis ce matin pour déblayer l’hyper-centre, enlever les arbres des routes. Sept villages du Grand-Mamoudzou ne sont toujours pas accessibles. Au nord, on ne peut pas accéder à Haut-Vallons ».
Avec des rafales observées à plus de 220 km/h, le cyclone Chido est le plus intense à frapper Mayotte depuis plus de 90 ans, selon Météo France. Des vents d'une extrême violence ont ravagé l'archipel avec des poteaux électriques à terre, des arbres déracinés et des toits ou cloisons en tôle envolés dans un territoire où l'habitat précaire concerne au moins un tiers de la population.
« C’est un carnage. Le tribunal, la préfecture, beaucoup de services, de commerces, des écoles sont à terre », raconte Ousseni Balahachi, ancien infirmier. Le centre hospitalier de Mamoudzou a vu ses « toitures arrachées » et ses services « inondés », en particulier celui des urgences. L’infirmier craint que l’hôpital, qui manque « cruellement de personnel », ne puisse « accueillir et soigner dans de bonnes conditions » les blessés. « Tout est coupé, les liaisons téléphoniques, WhatsApp, Facebook, les liaisons électriques, les routes… On ne peut pas avoir des nouvelles des gens », déplore Ousseni Balahachi.
Environ 6 000 personnes ont rejoint les centres d’hébergement qui comptent quelque 10 000 places, a précisé Ambdilwahedou Soumaila. « On a mobilisé 300 agents et le centre d’action sociale », avec pour mission d’apporter « de l’eau et de la nourriture à ces familles qui n’ont plus de toit ». Tête de proue d’un pont aérien et maritime organisé depuis l’île de La Réunion, territoire français distant de 1 400 km à vol d’oiseau, le premier avion de la sécurité civile depuis le passage du cyclone a atterri dimanche à Mayotte à 15h30.
Cet avion transportait trois tonnes de matériels du service médical, des colis de l'Établissement français du sang et 17 personnels médicaux, a précisé la préfecture de la zone de défense du sud de l'océan Indien dans un communiqué, ajoutant que deux sous-préfets faisaient partie des passagers. Plus de 160 militaires de la sécurité civile et sapeurs-pompiers de l’Hexagone vont venir renforcer les 110 pré-positionnés dans l’archipel depuis vendredi. Des rotations aériennes et maritimes sont opérationnelles depuis dimanche pour acheminer du personnel médical et du matériel.
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« Dehors, tout est ravagé (…). Les gens reconstruisent avec des tôles pliées, des bouts de bois cassés », se désole cet habitant de Mgombani, un quartier de Mamoudzou où il vit avec sa femme et sa fille. Son appartement a tenu mais celui du dessus n’a plus de toit. « Il y a des fuites partout. On n’a pas d’eau courante, pas d’électricité. Il y aurait du pillage et des affrontements entre bandes ». « Certains voisins ont déjà soif et faim et la moitié du quartier n’a pas à manger », s’alarme un autre.
L’habitat précaire, qui concerne environ un tiers de la population de l’archipel estimée à 320 000 habitants, est « entièrement détruit » et de nombreuses installations de service public ont été détruites ou endommagées, obligeant les autorités à fonctionner dans des conditions dégradées, selon le ministère de l’Intérieur. Le ministre de l'Intérieur démissionnaire Bruno Retailleau a estimé samedi soir à la sortie d'une réunion interministérielle de crise qu'il « faudra sans doute des jours » pour « affiner » le bilan humain. Mais « nous craignons qu'il soit lourd », a-t-il prévenu, parlant d'une « situation dramatique ». Il est attendu sur place lundi en compagnie de son homologue des Outre-mer, François-Noël Buffet.
Outremers360 avec AFP