Général Peloux commandant le SMA : « On vise l'excellence avec de nouveaux programmes en partenariat avec les entreprises et les centres de formation en Outre-mer »

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Général Peloux commandant le SMA : « On vise l'excellence avec de nouveaux programmes en partenariat avec les entreprises et les centres de formation en Outre-mer »

A l'aube de cette nouvelle année 2024, le Général Peloux commandant le SMA dresse un premier bilan des actions du SMA en faveur des jeunes Ultramarins au cours de cette année écoulée. Il y présente également les nouvelles ambitions pour 2024.
 

Outremers 360 : Pouvez-vous dresser un bilan des actions menées par le SMA en 2023?

Général Peloux commandant le SMA :L'année fut effectivement assez particulière. Elle a consacré à la fois la transformation du service militaire adapté et elle a pu prouver la résilience du système. Si aux Antilles, on a connu quelques difficultés de recrutement, le SMA peut s'enorgueillir d'avoir accueilli dans ses rangs plus de 5800 jeunes avec nos  volontaires stagiaires, constituant l'essence de notre dispositif, où près de 83 % accèdent à un emploi, dont les deux tiers dans un emploi durable, en CDI. L'autre réussite est celle de l'insertion de plus de 80% de nos volontaires techniciens. Il y a cinq ans, il était de 60%. C'est un véritable progrès car on avait beaucoup de difficultés à les insérer alors qu'ils sont titulaires de titres professionnels et de diplômes. Un effort majeur a été consacré par les équipes précédentes mais aussi les régiments aujourd'hui.

Nous restons sur un niveau assez élevé de jeunes illettrés avec environ 38% de jeunes reconnus illettrés selon les chiffres de l'Agence nationale de lutte contre l'illettrisme. 30% de ces jeunes sont des jeunes femmes notamment à Mayotte, en Polynésie et en Nouvelle-Calédonie où ce taux atteint parfois un peu plus de 32%. J'ai fixé aux chefs de corps, d'atteindre 75% de réussite de nos stagiaires à l'examen du permis de conduire, un passeport pour l'emploi. Aujourd'hui, nous avons un taux de réussite de 81%. C'est exceptionnel, au regard de la moyenne de l'Hexagone qui est de 56%. 

Lire ici : Les SMA Outre-mer vont s’équiper en simulateurs de conduite pour former les jeunes volontaires

Seuls 10% des jeunes, soit poussés par leur famille ou par l'attrait de ce que nous proposons, ne poursuivent pas leur formation. Toutefois, sur les 5800 jeunes recrutés, 4700 repartent avec un emploi en poche. Nous restons sur un taux d'insertion élevé qui démontre la résilience du système. Il témoigne de l'action et de la ténacité quotidiennes des chefs de corps.

Outremers 360 : Quels sont les partenariats mis en place au cours de cette année écoulée?

Général Peloux commandant le SMA : Nous avons concrétisé un certain nombre de partenariats. Le premier est avec la Fondation Orange en Guyane avec la mise en place d'un Fablab, permettant de faire découvrir aux jeunes, que l'informatique disposait de disposer d'autres attraits autre que celui de visionner uniquement des Tiktok ou autres médias. Nous les avons sensibilisé sur le fait que l'informatique peut être un outil supplémentaire dans la formation de certains métiers spécifique, par la capacité de projection ; un élève menuisier peut savoir, avec l'impression 3D, si le meuble qu'il conçoit, à des proportions correctes, un jeune en filière ouvrier paysagiste peut visualiser de manière numérique si son projet d'aménagement particulier d'un jardin est harmonieux.

Nous nous sommes associés au Groupe Bernard Hayot en Martinique dans le cadre de l'opération Tremplin pour l'emploi, où nous proposons une formation de technicien électro-mécanicien automobile en partenariat avec GBH Martinique. Nous assurions une partie de la formation professionnelle, qui est ensuite poursuivie par la GBH Martinique.

En Nouvelle-Calédonie, nous avons modifié un contrat signé en 2020 avec le GIEP. Initialement ce partenariat s'appuyait sur un partage complet des formations entre le GIEP et le SMA. Nous sommes passés à des formations entièrement identifiées GIEP ou SMA. L'objectif est de mieux accompagner nos jeunes qui n'ont pas le même niveau de formation que ceux sélectionnés par le GIEP. Désormais, nous proposons des formations adaptées aux jeunes pour les amener vers l'emploi. Nous disposons de la seule formation en soudure du territoire, cela nous garantit un fort taux d'insertion des jeunes de cette formation. 

Nous avons formalisé un partenariat de longue date avec le groupe SOS. Nous avons pu acheter le terrain du Bourg Murat dont nous étions locataires, et où est implanté la compagnie des Hauts à La Réunion. Cela nous permet de prolonger l'action du régiment au profit de la jeunesse réunionnaise. En effet, nous avons plus de 10 millions d'euros d'investissements à réaliser ; nous ne souhaitions pas à terme perdre le terrain, sur lequel nous entreprenons de faire les investissements.
Nous avons également remis au gout du jour notre partenariat avec Pôle-emploi et la Mission locale pour renforcer le repérage et l’orientation des jeunes vers les RSMA ce qui permet d’améliorer les échanges d’informations sur le suivi des jeunes dans le cadre du Contrat d’engagement jeune (CEJ).

En fin d'année, nous avons signé une convention particulière avec l'OP Commerce pour développer l'alternance auprès de nos stagiaires dans les métiers du commerce. 

Une année 2023 riche de partenariats et d'opérations. Nous commençons cette nouvelle année de manière tout aussi tonitruante avec le cyclone Belal. Elle avait commencé l'année précédente avec une tempête tropicale en Guadeloupe.

Outremers 360 :  C'est l'une des particularités du SMA. Il est capable d'intervenir dans le cadre de gestion de crise chronique ou de catastrophes naturelles...

Général Peloux : Oui cela est historiqueLe SMA a trois missions majeures. La première de ces missions est de recruter, de former et d'insérer des jeunes. La deuxième mission -plus historique car depuis les collectivités territoriales se sont équipées de services particuliers- les SMA ont créé ou structuré l'économie de certains territoires. C'est le cas du RSMA de la Guadeloupe qui a aidé le territoire en créant des routes. C'est aussi vrai en Guyane où le RSMA de Cayenne et le détachement du SMA de Saint-Jean de l'Oyapock, ont construit 80 % des axes majeurs de la Guyane. 

Et puis, à La Réunion, dès son implantation, le RSMA a œuvré à la réalisation d'un certain nombre d'infrastructures, en particulier des ponts  afin de permettre de relier les grandes communes de La Réunion.

Nous avons eu aussi une opération majeure au profit de nos camarades de la gendarmerie nationale à Mayotte dans le cadre de l'opération Wuambushu, où nous avons accueilli un détachement de 250 gendarmes au sein du régiment. 

Plus récemment en Guadeloupe, le régiment était engagé à La Désirade, l'île la plus touchée par le passage de la tempête Tammy. 

Nous participons encore activement aujourd'hui à la crise de l'eau à Mayotte. Puis l'action du RSMA de La Réunion au profit de la population à l'île de la Réunion, a été soulignée par le Ministre de l'Intérieur et des Outre-mer lors de sa récente visite à La Réunion.

Nous avons structuré nos formations professionnelles par métier, mais on constitue des modules cyclones car nous savons que nous sommes sur des territoires qui connaissent des phénomènes météorologiques importants.  

Le régiment est vraiment à la disposition des autorités civiles et du préfet et surtout à disposition de sa population. Nous avons l'avantage d'avoir un dispositif d'alerte. En cas de cyclone, nos jeunes sont prêts à intervenir, confinés au régiment avec les modules, voire confinés dans certaines communes, justement pour avoir des éléments de reconnaissance et d'évaluation qui permettent de savoir quels vont être les moyens majeurs qu'il faudra engager pour participer à la remise en état du territoire et du département.

Outremers 360 : Quels sont les futurs défis et nouveaux projets du SMA pour cette nouvelle année?

Général Peloux :  2023 a vu un événement particulier : la création de la Fondation du Service militaire adapté. Cette fondation, est complètement décorrélée du service militaire adapté, même si elle porte son nom, a pour objet de venir compléter l'action du SMA, notamment en accompagnant les 17% de nos jeunes qui n'ont pu être insérés.

L'idée -grâce à des mécènes qu'ils soient financiers ou de compétences- est de pouvoir accompagner des jeunes ayant des projets professionnels mais pour lesquels il restait des freins à l'insertion. Parmi ces freins, on retrouve -en dehors du permis de conduire- le logement et le financement d'un certain nombre d'activités. Aujourd'hui avec des partenariats divers (USH, ADIL, Fondation Chanel, Orange, Renault, Rubis Energy, Total, et de grandes entreprises CMA-CGM), nous avons la capacité de conduire des projets au profit des jeunes pour lever les freins à l'insertion. 

Lire ici : Général Jean-Pierre Metz- Président de la Fondation du SMA : «La Fondation du SMA est le coup de pouce supplémentaire pour accompagner les jeunes vers une insertion durable»

Exemples : Un jeune titulaire d'un permis que le groupe Rubis Energy sur le territoire de la Martinique ou de la Guadeloupe, souhaiterait l'employer comme transporteur de matières dangereuses. Il lui faut une qualification particulière que le SMA ne délivre pas et qui est onéreuse. Grâce à ce mécénat privé, nous sommes en capacité d'offrir à un certain nombre de jeunes la formation et la qualification nécessaire. C'est un partenariat gagnant-gagnant pour le jeune mais aussi pour l'entreprise, également membre de la Fondation. Cette dernière investit, fait du mécénat de compétences ou financier et embauche un personnel détenteur d'une qualification qui va lui permettre de l'employer.

C'est aussi la création d'un élevage de poules bio, associé à la Fondation et aux membres de la Fondation Rubis Energy. Propriétaire d'un certain nombre de stations dans les territoires, Rubis Energy a décidé de créer des points de restauration. Une partie des poulets produits par cette jeune ferme sera achetée pour être transformée et être distribuée à la vente dans ces stations services. Nous essayons de créer une activité avec un circuit d'emplois vertueux.

Au cours de cette année 2023, nous avons créé aussi quelques associations-filles. Ce sont les territoires qui répliquent la Fondation au niveau local avec l'objectif de lever des fonds localement, même si la majorité des fonds viennent de l'Hexagone. Elles ont pour mission de collecter sur les territoires les projets, de les présenter au comité exécutif et, dès validation, de pouvoir accompagner le projet.

Un jeune, porteur de projet ou d'une idée qu'il souhaite concrétiser, doit aussi être capable de mettre en place un business-plan. Peu de jeunes y arrivent à formaliser ce business-plan. Nous nous sommes associés avec la  Banque française mutualiste, rompue à cet exercice, fait du mécénat de compétences. Pour pérenniser son activité, ce jeune créateur d'entreprise a besoin l'apport d'un conseiller juridique. Dans le cadre du mécénat de compétences, nous avons noué contact avec la Présidente du Comité outre-mer de l'ordre national des experts-comptables. Par l'intermédiaire de ce partenariat avec la Fondation du SMA, nous avons une connexion avec l'ensemble des chambres départementales des experts comptables. Ainsi, ces experts comptables assurent de la bonne gestion et de la bonne exécution financière de l'année considérée. Ainsi, un jeune, avec l'appui de la Fondation est accompagné durant une période à tous les niveaux pour que son activité puisse perdurer et fonctionner.

L'objectif de la Fondation est d'accompagner entre 210 et 230 jeunes par an. Nous nous sommes donnés les moyens, avec la création de cette fondation, de s'approcher au plus près de l'excellence. Ces associations-filles verront cette année la désignation de leur délégué général. Ce dernier aura pour mission de démarcher les fonds sur leur territoire. Comme la loi l'oblige, les fonds récoltés seront centralisés à Paris, mais les efforts consentis par un délégué général du territoire seront systématiquement dévoués à son territoire respectif. 

Cette année, nous allons voir enfin la pose de la première pierre du régiment à Hao en Polynésie au cours du mois d'avril. La compagnie y est déjà implantée. Elle fonctionne correctement avec suffisamment de jeunes pour que l'activité localement fonctionne bien, avec un certain nombre des filières professionnelles que nous avions envisagées pour amorcer le dispositif. Nous mettons en œuvre les filières novatrices, notamment en matière d'énergies renouvelables, car lorsque la compagnie sera définitivement implantée, elle devra être complètement autonome en énergie. Nous proposerons une filière dédiée aux énergies renouvelables, au recyclage. Pour répondre à la problématique crucial de l'eau, nous avons des dispositifs simples qui permettent de produire de l'eau, avec des moyens raisonnables. Ce dispositif, s'il est maîtrisé, peut être développé dans les îles et atolls de Polynésie mais également ailleurs. 

C'est un challenge assez fou car il s'est écoulé moins de trois ans entre le souhait du Président de la République de voir cette compagnie à Hao et ce moment où on va poser la première pierre. C'est une satisfaction car je suis le général qui a reçu l'ordre et celui qui posera la première pierre avant de partir. Cette compagnie devrait être complètement terminée en 2028, mais elle fonctionne déjà en atteignant les résultats souhaités. Les jeunes stagiaires en sont également ravis car ils trouvent des débouchés sur place. 

Autre projet d'importance, l'acquisition d'un terrain à Mayotte. Le Ministre Sébastien Lecornu, en septembre 2021, avait souhaité l'augmentation des effectifs à Mayotte, ce que nous avons fait dans un espace contraint à Combani. Nous sommes en négociation avec la collectivité territoriale, mais surtout la commune de Chirongi depuis mon arrivée à l'été 2021. Nous envisageons l'acquisition d'un terrain à Chirongi, dans le cadre d'un cadre complexe plus complexe que celui du SMA. On va s'inscrire auprès d'une centrale de production alimentaire,  avec un pôle sportif de qualité. Dans ce cadre global, nous pourrions disposer de sept hectares. Cet espace sera valorisé par l'implantation d'une première compagnie sur place. Avec la réserve foncière restante, nous envisageons dans les prochaines années créer de nouveau une compagnie pour pouvoir recruter davantage de jeunes sur le territoire.

Outremers 360 : Quels vœux souhaitez-vous adresser à vos chefs de corps, vos volontaires?

Général Peloux : Je ne suis pas inquiet quant à leur engagement et à la réussite sur les sujets qui sont les nôtres aujourd'hui, en poursuivant bien sûr cette transformation qui a été initiée avec le projet SMA, Ambition 2030. Il s'agit de continuer à être résilients car notre objectif, malgré la situation économique, est de faire en sorte que le maximum des jeunes qui nous accueillons intègrent un emploi. Il faut que l'on maintienne ce taux de  80% a minima.