Interrogé lors des questions au gouvernement, le Premier ministre a dit vouloir « retrouver le chemin de l'apaisement » en Nouvelle-Calédonie, et « à reconstruire pour redonner du travail, une visibilité, une perspective à tous les jeunes ». « Je vais avoir auprès de moi une mission permanente de haut niveau qui accompagnera ce travail », a-t-il assuré.
Après son discours de politique générale mardi, Michel Barnier est entré dans le bain des questions au gouvernement ce mercredi, lesquelles portaient beaucoup sur les Outre-mer : cinq QAG en tout dont deux calédoniennes. Il faut dire qu’hier, le chef du gouvernement avait annoncé le report des élections provinciales à fin 2025 ou encore, la non-soumission au Congrès du projet de texte constitutionnel sur le dégel du corps électoral provincial, qui avait mis le feu aux poudres et plongé l’archipel dans une crise majeure.
Interrogé par le député indépendantiste Emmanuel Tjibaou sur « la poursuite du processus de décolonisation » et la prise en compte le plan de reconstruction proposé par le Congrès calédonien, Michel Barnier a dit vouloir « retrouver le chemin de l’apaisement ». « C'est dans cet esprit que je me suis exprimé hier (…). Nous avons pris le temps (…) de consulter tous les élus, tous les responsables des provinces, dans toute leur diversité, pour écouter et vous poser la question du report des élections », a-t-il rappelé.
« Nous prendrons aussi le temps de retravailler la question du corps électoral » a-t-il aussi déclaré, assurant que « c’est en accord avec le président de la République » que la non-soumission du texte au Congrès de Versailles a été décidée. « C'est ce temps-là que je voudrais qu'on utilise ensemble pour retrouver le chemin de l'apaisement et d'une solution institutionnelle, politique en Nouvelle-Calédonie », a ajouté Michel Barnier, rappelant que les présidents des deux assemblées iront « prochainement à la rencontre de tous les élus, pour vous écouter et trouver le chemin de cette réforme institutionnelle et d'un engagement durable pour la paix et la stabilité ».
Sur la « reconstruction économique et sociale », « il y a, non pas tout à reconstruire, mais beaucoup à reconstruire pour redonner du travail, une visibilité, une perspective à tous les jeunes de Nouvelle-Calédonie ». « J'attache beaucoup d'importance à la mission que la présidente de l'Assemblée nationale et le président du Sénat vont conduire. Ensuite, le travail sera poursuivi, relayé par le ministre de l'Outre-mer. Je vais avoir auprès de moi une mission permanente de haut niveau qui accompagnera ce travail » a-t-il détaillé. « Nous allons faire les choses sérieusement dans le respect de toutes les communautés, de toutes les forces politiques ».
Dans sa question, le député de la 2ème circonscription calédonienne Emmanuel Tjibaou (GDR) avait remercié le chef du gouvernement « pour les mots de solidarité aux compatriotes impactés par la crise politique, économique et sociale qui nous touche depuis le 13 mai ». « Les annonces d'hier amorcent certainement une démarche constructive dans l'approche » concède le député qui salue aussi le retour du dossier calédonien à Matignon. « Les annonces portent aussi, je l'espère, le deuil d'une méthode engagée par vos prédécesseurs ».
Un peu plus tôt lors de la séance, le ton était plus sévère, voire acerbe. La veille déjà, le député Nicolas Metzdorf, élu dans la 1ère circonscription et siégeant au groupe Renaissance, n’avait pas apprécié l’absence d’annonces économiques et la non-soumission du dégel au Congrès de Versailles. « Les Calédoniens se sont sentis humiliés » a fustigé le député non-indépendantiste dans sa question au Premier ministre, « humiliés avec les destructions de voitures, les maisons brûlées, la destruction d'emplois, les entreprises qui ont fermées ».
« Ils se sont sentis humiliés parce que vous n'avez pas eu un mot pour eux hier, parce que vous n'avez rien dit sur les aides économiques nécessaires à la relance et au maintien des emplois en Nouvelle-Calédonie, parce que vous les avez abandonnés en abandonnant le dégel du corps électoral en Nouvelle-Calédonie » a ajouté l’élu, demandant si « le dégel du corps électoral doit bien avoir lieu et que la démocratie doit être rétablie » et si « la solidarité nationale pour sauver les entreprises et sauver les milliers d'emplois qui ont disparu depuis le début des émeutes ».
« Notre responsabilité est évidemment d'aider immédiatement à l'urgence pour la Nouvelle-Calédonie, l'urgence économique, l'urgence sociale. Je crois que jusqu'à maintenant, le gouvernement n'y a pas manqué et il n'y manquera pas dans les jours et dans les heures qui viennent » a assuré le ministre des Outre-mer François-Noël Buffet qui évoque aussi « une démarche beaucoup plus profonde » sur « l'avenir de la Nouvelle-Calédonie », à la fois institutionnel et économique.
« Il n'y a aucune réponse concrète dans votre réponse. Il n'y a ni volonté d'assurer le dégel du corps électoral. Il n'y a aucune somme qui est annoncée aux Calédoniens pour la survie de leur entreprise. Décevant » a sèchement répondu le député Nicolas Metzdorf. Plus tard, sur X, le député s’est aussi ému d’avoir eu une réponse du ministre des Outre-mer à une question adressée au Premier ministre, quand Emmanuel Tjibaou a, lui, eu une réponse du Premier ministre. « C’est encore plus clair qu’hier le parti pris du nouveau gouvernement sur le dossier Calédonien », a-t-il estimé. « À mon niveau la censure du gouvernement de Michel Barnier se pose » avait-il aussi prévenu hier, après le discours de politique général du Premier ministre.