Emmanuel Macron a entamé jeudi en Nouvelle-Calédonie la partie la plus délicate de sa visite dans l'archipel par une nouvelle salve de rencontres avec des responsables politiques locaux pour tenter d'amorcer un retour au « dialogue » et à la « sécurité » après plus d'une semaine d'émeutes.
A la nuit tombée à Nouméa, le chef de l'État a rencontré dans un premier temps l'aile modérée des non-indépendantistes. Étaient notamment présents Philippe Gomès et Philippe Dunoyer, figures de Calédonie Ensemble, qui plaide pour un report du texte constitutionnel et du Congrès de Versailles.
En désaccord avec eux sur la marche à suivre, l'ex-secrétaire d'État Sonia Backès, cheffe de file de la branche radicale des loyalistes, et le député Renaissance de Nouvelle-Calédonie, Nicolas Metzdorf, ont été reçus dans un second temps. Avec le Rassemblement-LR, cette partie de la droite calédonienne demande un maintien de Congrès de Versailles, estimant qu'un report serait donner raison aux « aux casseurs, aux pilleurs et aux émeutiers ».
Emmanuel Macron a ensuite rencontré le camp indépendantiste, avec qui il s’entretient actuellement. Présents à cette discussion : Roch Wamytan (UC), Gilbert Tyuienon (UC), Pascal Sawa (UC), Jean-Pierre Djaïwé (Palika), Victor Tutugoro (UPM), Adolphe Digoué (Palika) ou encore, Alosio Sako (RDO). Tous sont cadres du FLNKS. Plus surprenant, la délégation indépendantiste comprend Christian Stein, leader de la CCAT, assigné à résidence. L’organisation avait qualifiée de « mafieuse » par le ministre de l’Intérieur et des Outre-mer.
Hier encore, le FLNKS réitérait sa demande de retrait du projet de réforme constitutionnelle, et exige la création d’une mission du dialogue, une demande formulée dès le 23 mars. Le Front espère que la visite du président de la République, ce jeudi, permettra d'« impulser un nouveau souffle en vue de renouer un dialogue apaisé et serein entre les trois partenaires politiques des accords ». Appelant au calme, le FLNKS considère que cette crise « ne peut avoir que pour réponse une solution de nature politique ».
Une première réunion, jeudi matin à Nouméa, a notamment été boycottée par le Sénat coutumier, une institution consultative dont le rôle est de défendre l'identité kanak. Son président, Victor Gogny, a ainsi voulu dénoncer « un passage en force de l'État » qui a rompu « le contrat de confiance » avec son projet de réforme constitutionnelle du dégel du corps électoral, rejeté par les kanaks.
« Décisions » dans la journée
Le chef de l'État ne s'est pour l’heure pas prononcé sur un éventuel report du Congrès qui doit réunir députés et sénateurs avant la fin juin pour entériner la réforme, sauf si un accord sur un texte global entre indépendantistes et non indépendantistes intervient d'ici là. Mais son objectif est clair : un retour « le plus vite possible (...) à la paix, au calme, à la sécurité » et une reprise du « dialogue », a-t-il déclaré dès sa descente de l'avion à l'aéroport de Nouméa.
Il a promis des « décisions » et des « annonces » à « l'issue de cette journée », même s'il a assuré n'avoir « pas de limite » de temps sur place. Alors que depuis le début des émeutes, six personnes ont été tuées, dont deux gendarmes mobiles, le chef de l'État a observé une minute de silence en préambule d'une première réunion avec des élus et acteurs économiques, poursuivie par un déjeuner informel et la visite d'un commissariat.
Ce « mouvement d'insurrection absolument inédit », « personne ne l’avait vu venir avec ce niveau d’organisation et de violence », a-t-il lancé aux gendarmes et policiers présents. Un peu plus tôt, il a assuré que les quelque 3 000 membres des forces de sécurité déployés « resteront aussi longtemps que nécessaire, même durant les Jeux olympiques et paralympiques » de Paris qui prennent fin début septembre.
Quant à l'état d'urgence en vigueur depuis une semaine, il « pense » qu'il « ne devrait pas être prolongé » au-delà des 12 jours légaux, à condition que « tous les dirigeants » de l'archipel « appellent à lever les barrages ».
Avec AFP