Interrogé sur la pharmacopée en Polynésie par le député Moetai Brotherson (GDR), le porte-parole du gouvernement Olivier Véran a assuré d’un possible accompagnement de l’État pour l’exploitation de la flore polynésienne traditionnelle.
« La Polynésie est une Collectivité d’Outre-mer à statut particulier, qui a la compétence de la santé, mais bizarrement pas celle des médicaments » a déclaré le député de Polynésie, Moetai Brotherson dans sa question au gouvernement, ce mardi. Par conséquent ajoute le député : « Tout un ensemble de plantes endémiques utilisées depuis le fond des âges pour soigner se retrouvent interdites d’utilisation, parce qu’à défaut d’être inscrites à la pharmacopée nationale, ce qui suppose un long processus de reconnaissance via l’ANSM, elles sont tout simplement interdites ».
Soulignant les « menaces » dues à cette interdiction, notamment la « disparition de la mémoire collective », Moetai Brotherson a aussi évoqué la « bio-piraterie de grands groupes qui viennent étudier ces plantes, déposer des brevets, et déposséder ces plantes des Polynésiens de leur patrimoine naturel ». Sur ce sujet sensible, dont d’autres territoires comme la Guyane, La Réunion ou la Martinique se sont aussi saisis, le député, cadre du parti indépendantiste polynésien, assure ne pas vouloir opposer l’État et la Collectivité.
Il appelle davantage à « établir des passerelles entre l’exécutif polynésien et les exigences compréhensible de sûreté des médicaments pour que cette médecine traditionnelle, ces praticiens traditionnels, puissent trouver leur place au sein de la République et garder la place qui est la leur depuis le fond des âges en Polynésie ».
En l’absence de l’actuel ministre de la Santé, c’est Olivier Véran, porte-parole du gouvernement et anciennement mandataire du portefeuille qui a répondu au député. Il a notamment rappelé que la pharmacopée officiellement utilisée a « franchi des étapes de validation scientifique sur les effets positifs, les effets potentiellement toxiques et donc délétères, avec des études qui permettent de définir la dose précise de telle molécule, y compris celles issues des plantes, qui permet de guérir, et éviter d’aggraver certaines maladies ».
Pas de « reconnaissance dérogatoire »
« Il n’est pas question d’exploiter tout ce qui peut l’être sur planète, y compris en matière de plantes en Polynésie française » a poursuivi le ministre qui, toutefois, assure que « le gouvernement est engagé pour pouvoir favoriser l’exploitation scientifique de toute ressource naturelle des territoires ultramarins ». « Si la question est de dire « est-ce qu’on peut avoir une reconnaissance dérogatoire sans passer par les fourches caudines de l’ANSM pour reconnaitre une plante comme médicament », le simple intitulé de l’ANSM m’oblige à vous répondre non. En revanche, s’il s’agit de savoir comment vous aider à pouvoir faire reconnaître au mieux les indications éventuelles de telle ou telle plante, dans telle ou telle pathologie, la science fourmille d’idées et nous avons l’intention de pouvoir accompagner l’exploitation de la flore polynésienne », a-t-il ajouté.
« Notre nature Mā’ohi regorge de plantes médicinales dont la maîtrise a survécu partiellement aux interdits de la colonisation » a développé plus tard le député dans une publication Facebook, dans laquelle il insiste sur le rôle de l’État, qui « doit être un facteur de progrès et non de blocage dans ce dossier ». Regrettant une réponse « révélatrice d’un prisme jacobin », il a toutefois salué qu’Olivier Véran « propose tout de même une collaboration ». « Ne perdons pas de vue que la réhabilitation de notre pharmacopée et de nos tradipraticiens doit profiter aux Polynésiens et à la Polynésie » a conclu le député qui a reçu le soutien d’un collègue siégeant de l’autre côté de l’hémicycle : Aurélien Pradié, député LR.