Crise politique aux Samoa : La Première ministre élue « investie » lors d'une cérémonie improvisée

Fiame Naomi Mata'afa prêtant serment ce lundi à l'extérieur du Parlement samoan ©Facebook / Moelana Faletutulu

Crise politique aux Samoa : La Première ministre élue « investie » lors d'une cérémonie improvisée

Fiame Naomi Mata'afa, première femme en passe de prendre la tête du gouvernement samoan, a été « investie » lundi Première ministre lors d'une cérémonie improvisée dans les jardins du Parlement, dont les portes avaient été fermées par le pouvoir sortant.

Cette « prestation de serment », qui risque d'être contestée en justice, peut d'aggraver un peu plus la crise politique apparue dans l'archipel après les élections très serrées du 9 avril. Au pouvoir depuis 22 ans, le Premier ministre Tuilaepa Sailele Malielegaoi a perdu le scrutin mais s'est à ce stade refusé à céder le pouvoir, au point que certains crient au coup d'État. 

La Nouvelle-Zélande et l'Australie ont lancé un appel au calme et enjoint l'archipel du Pacifique à respecter l'État de droit. De son côté, le président des États fédérés de Micronésie a reconnu la légitimité de Fiame Naomi Mata'afa, et a appelé à mettre fin à cette crise. 

Accompagnée de juges chargés d'assister à sa prestation de serment pour devenir la première femme Premier ministre, Fiame Naomi Mata'afa, 64 ans, s'était vue refuser lundi l'entrée dans la chambre de l'assemblée législative. Le Secrétaire de l'assemblée législative était sorti pour s'excuser, affirmant que, sur ordre du chef de l'État (poste honorifique) Tuimalealiifano Vaaletoa Sualauvi, il ne pouvait pas permettre au Parlement de siéger.

Tenues à l'extérieur de la chambre, Fiame Naomi Mata'afa et sa délégation parlementaire sont restées des heures sous un large chapiteau dans les jardins, tandis que leurs partisans du parti FAST scandaient des slogans. Les élus ont finalement prêté serment un à un lors d'une cérémonie qui, en dépit de son lieu insolite, avait tout d'une investiture officielle. Sa légalité a d'emblée été contestée par les opposants de la Première ministre élue.

« prise illégale du gouvernement »

Les vivas les plus forts se sont élevés quand Fiame Naomi Mata'afa a levé la main à la lumière du soleil descendant. « La démocratie doit toujours l'emporter. Il ne peut y avoir d'exception à ce principe fondamental », a indiqué son parti dans un communiqué. « Ceux qui prétendent le contraire et agissent en conséquence jouent avec le feu ». 

Après la « cérémonie », Tuilaepa Sailele Malielegaoi a continué de se présenter comme le Premier ministre légitime, alors même que la Cour suprême avait jugé dimanche « illégale » la décision du chef de l'État de suspendre le Parlement. D'où le risque que le bras de fer politique et juridique ne se prolonge. « J'ai été choqué, aucun d'entre eux, et pas même les ministres du culte qui étaient là, n'ont eu le cran de leur dire que c'est illégal », a déclaré Tuilaepa Sailele Malielegaoi. « Je ne pensais pas que nous avions ce genre de personne aux Samoa. Je pensais que la mafia n'existait qu'en Italie ».

Les îles Samoa sont devenues indépendantes en 1962, après près d'un demi-siècle sous le statut de protectorat néo-zélandais. A l'exception d'une courte période en coalition en 1986-1987, le Parti pour la protection des droits de l'homme (HRPP) de Tuilaepa Sailele Malielegaoi préside aux destinées du pays depuis 1982.

Fiame Naomi Mata'afa est la fille de l’ancien Premier ministre samoan, Faumuina Mulinu'u II, décédé en 1975. Elle passe pour une pionnière de la cause des femmes dans l'archipel très conservateur et très religieux, majoritairement protestant. Elle appartenait auparavant au HRPP et fut même l'adjointe de Tuilaepa Sailele Malielegaoi jusqu'à ce qu'elle se brouille avec ce dernier en raison de divergences politiques.

Elle est largement reconnue à l'étranger comme une voix dans le combat pour l'égalité entre les hommes et les femmes, et comme une militante engagée contre le réchauffement climatique. « C'est une prise illégale du gouvernement, c'est ce que sont les coups d'État », a dénoncé dimanche Fiame Naomi Mata'afa au média néo-zélandais Newshub. 

Avec AFP.