L'octroi de mer, une taxe sur les produits importés spécifique aux départements et régions d'outre-mer (Drom), est un impôt «à bout de souffle» qui doit être «réformé en profondeur», juge la Cour des comptes dans un rapport publié mardi.
Conçu initialement pour protéger les productions locales, l'octroi de mer est devenu un soutien indispensable aux finances des collectivités ultramarines. Mais cette taxe est aussi souvent considérée comme responsable de la cherté de la vie. «Le temps semble venu de réformer en profondeur une fiscalité désormais à bout de souffle à de nombreux égards et qui ne répond plus aux enjeux structurels auxquels font face les outre-mer», affirme la Cour dans son rapport.
Poursuivant «trop d'objectifs simultanément», selon la cour, l'octroi de mer «connaît de ce fait des problèmes sérieux de cohérence et d'efficience» et souffre d'une «complexité excessive au regard des recettes collectées». L'institution financière estime ainsi que le système enferme les économies ultramarines «dans un modèle peu porteur d'avenir», évoquant un «protectionnisme inscrit dans la longue durée, limitant la concurrence, l'innovation, et préservant des situations acquises».
Le «scénario réformiste»
La Cour envisage trois scénarios pour l'avenir de la taxe, dont un statu quo qui «paraît devoir être écarté» et un «scénario de rupture» imaginant la suppression de l'octroi de mer dès 2027. Le scénario privilégié, dit «scénario réformiste», «ne doit pas se limiter à quelques mesures éparses», estime la Cour qui émet douze recommandations. Parmi celles-ci, outre des mesures de renforcement du contrôle du dispositif, la Cour préconise de réduire le nombre de taux, allant actuellement de sept à 16 selon les Drom.
Elle souhaite aussi que les collectivités consacrent davantage cette ressource à l'investissement, l'octroi de mer servant aujourd'hui majoritairement à financer leurs dépenses de fonctionnement. Enfin, pour atténuer les effets de l'octroi de mer sur les prix, principale critique, la Cour recommande de le plafonner pour des produits de première nécessité et d'exclure du dispositif les produits pour lesquels il existe un monopole local, ou à l'inverse pour lesquels la production locale est très faible. «L'expiration du régime actuellement en vigueur fin 2027 laisse le temps nécessaire pour une évolution apaisée et concertée», conclut la Cour, le dispositif bénéficiant d'un accord européen régulièrement renouvelé.
Reste à convaincre des territoires où «la plupart des élus sont très attachés» à cet impôt, concède la Cour. En 2022, selon ses calculs, l'octroi de mer a généré 1,64 milliard d'euros de recettes pour les cinq Drom (Guadeloupe, Guyane, Martinique, Mayotte, La Réunion) qui la perçoivent, apportant notamment 32% des ressources des communes.
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Avec AFP