Créée au mois d’octobre, la mission flash de la Délégation aux Outre-mer de l’Assemblée nationale sur le coefficient géographique appliqué aux établissements de santé en Outre-mer vient de rendre son rapport. Très critique envers le système actuel, il préconise notamment des réévaluations plus transparentes, une obligation de révision bisannuelle, et l’instauration d’une dotation forfaitaire compensatoire dès que possible pour l’ensemble des hôpitaux ultramarins.
En principe, la continuité territoriale devrait s’appliquer dans tous les domaines, et surtout celui de la santé publique. Cependant les réalités d’accès et d’offres de soin demeurent spécifiques aux Outre-mer, dues à leurs singularités structurelles : « la réalité ultramarine rend beaucoup plus onéreux l’exercice d’une médecine performante dans les Outre-mer : le transport des matériels de pointe depuis l’Europe est coûteux ; le climat humide et la salinité dégradent ces matériels plus rapidement qu’ailleurs et les réparations y sont difficiles ; les salaires des praticiens doivent être plus élevés qu’ailleurs pour faire face à une vie chère historique, et aussi pour inciter médecins, infirmiers et techniciens à servir dans ces territoires, etc. », note la mission.
De ce fait, des mesures d’adaptation ont été prises pour couvrir le financement des établissements ultramarins. Les dotations globales attribuées annuellement ont été remplacées, en 2004, par une tarification basée sur le nombre d’actes réalisés. Comme leurs homologues corses et franciliens, confrontés à des réalités spécifiques, la mission constate que les établissements de santé ultramarins ont vu leurs ressources affectées d’un coefficient multiplicateur, de manière à réduire leurs contraintes. Mais cette méthode n’est plus adaptée, selon le rapport : « les centres hospitaliers universitaires (CHU) ultramarins sont chroniquement déficitaires, endettés et paient leurs fournisseurs avec difficultés ».
« La Délégation aux Outre-mer de l’Assemblée nationale a donc décidé de se saisir du sujet pour retracer l’évolution et – surtout – la non progression du coefficient géographique et lancer une réflexion sur l’adaptation (ou le remplacement) de ce dispositif qui, de toute évidence, ne donne pas entièrement satisfaction », écrivent les rapporteurs.
Durant ses auditions, la mission a relevé que la seule revalorisation des coefficients géographiques apparaît insuffisante pour revenir à l’équilibre financier des établissements de santé d’Outre-mer et s’interroge sur l’intérêt de conserver le dispositif en l’état. « Ne vaudrait-il pas mieux revenir à une dotation globale qui prendrait en compte toutes les spécificités locales plutôt que de continuer à vouloir corriger un coefficient géographique qui fait office de « béquille », dont le montant continue d’être globalement insuffisant, notamment aux Antilles ? », demande-t-elle.
Pour les rapporteurs, le ministère de la Santé doit faire un choix. Poursuivre le financement des établissements de santé d’Outre-mer en s’appuyant sur le coefficient géographique, mais en prenant en compte les remarques mentionnées dans le rapport (voir conclusions ci-dessous) pour gagner en crédibilité. « Soit il modifie en profondeur le mode de financement des hôpitaux ultramarins pour prendre en compte la spécificité de patientèles de taille réduite, l’insuffisance de concurrence, les caractéristiques locales, etc. pour aboutir à une attribution de ressources qui permette une gestion saine des établissements de manière équilibrée et avec une visibilité suffisante pour réaliser les investissements nécessaires, ainsi qu’un apurement durable de l’endettement de ces structures ».
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En conclusion, les rapporteurs font une série de propositions, dont, entre autres : « rendre les prochaines réévaluations du coefficient géographique plus transparentes en associant dès le début les ARS et les directeurs des CHU ultramarins aux choix méthodologiques ; instaurer une obligation de révision bisannuelle du coefficient géographique appliqué aux établissements de santé Outre-mer ; programmer les aides à la trésorerie sur une échelle pluriannuelle de manière à permettre aux hôpitaux ultramarins de gagner en visibilité et d’anticiper. Les verser en début d’année en non en fin d’année comme c’est actuellement le cas ; et évaluer l’impact sur le financement des hôpitaux ultramarins du sous-financement des activités externes ainsi que la non prise en compte par la tarification nationale journalière de certaines prestations ».
PM