Christopher Luxon a pris ses fonctions de Premier ministre, six semaines après la victoire aux élections nationales de sa formation politique conservatrice, le Parti national. Ce scrutin a mis fin aux six années passées au pouvoir du Parti travailliste conduit par Jacinda Ardern.
Âgé de 53 ans, l'ancien PDG d'Air New Zealand a prêté serment comme chef du nouveau gouvernement de coalition lors d'une cérémonie dans la capitale Wellington. « C'est un honneur et une énorme responsabilité », a déclaré Christopher Luxon aux journalistes. « La tâche numéro un est de restaurer l'économie. Nous devons réduire le coût de la vie et maîtriser l'inflation afin de pouvoir baisser les taux d'intérêt et rendre l'alimentation plus abordable ».
L'ancien gouvernement travailliste avait eu du mal à contrôler l'augmentation du coût de la vie, un problème mondial imputé en partie aux difficultés d'approvisionnement des matières premières en raison de la pandémie puis de l'invasion de l'Ukraine par la Russie. L'ancien Premier ministre, le leader du Parti travailliste Chris Hipkins, a succédé à Jacinda Ardern en janvier. Élue une première fois en 2017 puis réélue en 2020, la plus jeune Première ministre de l’histoire de l’archipel avait mis fin à son mandat de cinq ans, n'ayant « plus assez d'énergie ».
Coalition à trois
Christopher Luxon devient le 42e premier ministre de Nouvelle-Zélande après avoir mis en place un gouvernement de coalition au cours de longues négociations qui ont pris fin vendredi, six semaines après les élections. Le Parti national de Christopher Luxon a formé une coalition tripartite avec le parti conservateur ACT et le parti populiste New Zealand First pour gouverner au sein du Parlement de 123 sièges.
Pour la première fois en Nouvelle-Zélande, le rôle de vice-premier ministre sera partagé en deux mandats de 18 mois. Le dirigeant de New Zealand First, Winston Peters, 78 ans, a prêté serment aux côtés de Christopher Luxon en tant que vice-premier ministre, mais abandonnera ses fonctions fin mai 2025. Il sera remplacé par le leader d'ACT, David Seymour, pour le reste de la législature qui doit durer trois ans.
Winston Peters (à gauche sur la photo) et son parti New Zealand First sont considérés comme des faiseurs de rois. Ancien membre du Parti national, Winston Peters a été plusieurs fois ministre ou vice-Premier ministre de gouvernements conservateurs ou travaillistes. Il fut notamment ministre des Affaires étrangères de la travailliste Helen Clark en 2005, puis vice-Premier ministre de Jacinda Ardern de 2017 à 2020. La victoire sans appel du Parti travailliste en 2020 permet à l’ancienne Première ministre de former un gouvernement sans l’apport de New Zealand First.
Criminalité, téléphones portables, hausse des taxes
Au cours de ses 100 premiers jours au pouvoir, le Parti national a promis de lutter contre la criminalité, d'interdire les téléphones portables dans les écoles et d'abandonner les hausses de taxes sur les carburants prévues. Christopher Luxon, père de deux enfants, est un homme riche, qui ne boit pas d'alcool, un amateur de musique country, qui s'est fait connaître à la tête de la compagnie aérienne nationale pendant sept ans avant de se lancer en politique
Élu député en 2019, l'ancien PDG prend pour modèle John Key, ancien banquier de Merrill Lynch qui a remporté trois élections pour le parti National et a été Premier ministre de 2008 à 2016. Son mentor lui-même avait juré que Christopher Luxon dirigerait le pays. Après l'avoir rencontré, John Key s'était déclaré « absolument convaincu » que Christopher Luxon « serait non seulement un homme politique, mais qu'il serait Premier ministre ». En quatre ans d'ascension politique, ce conservateur cultive une image de père de famille, qui aime le bricolage, le ski nautique et fait valoir son sens des affaires.
« Je suis venu en politique parce que je sais comment résoudre les problèmes et faire avancer les choses », a-t-il déclaré dans son premier discours. Critique du bilan de Jacinda Ardern et du Parti travailliste néo-zélandais, il estimait alors que la Nouvelle-Zélande « allait dans la mauvaise direction », affirmant que son expérience de chef d'entreprise était nécessaire au pays pour redresser une économie chancelante.
« Expérience du monde réel »
« J'ai bâti ma carrière en redressant des entreprises en difficulté et j'apporterai cette expérience du monde réel pour le rôle » de Premier ministre, a-t-il aussi promis dans ce premier discours. Né à Christchurch, la deuxième plus grande ville du pays, Christpher Luxon a été élevé dans une famille catholique avec ses deux frères cadets, et a rencontré sa femme Amanda dans un groupe de jeunes de l'église.
Pendant ses études de commerce, le jeune Luxon a fait ses armes en travaillant dans un hôtel et en assistant aux conférences de son père sur les techniques de vente. Embauché chez Unilever, juste après un stage, l'ancien patron a dirigé plusieurs marques du géant de l'agroalimentaire et des produits d'hygiène à travers le monde, avant de devenir PDG d'Unilever Canada avant même ses 40 ans.
De retour en Nouvelle-Zélande où il veut élever ses deux enfants, il affiche un appétit insatiable de croissance, à la tête de la compagnie aérienne nationale, au prix de relations tendues avec les syndicats. Il devient aussi un allié commercial du gouvernement de John Key, alors Premier ministre. Ses sept années aux commandes d'Air New Zealand ont été marquées par une croissance record des bénéfices, aidée en partie par l'essor du tourisme.
« Position pro-vie »
L'ancien chef d'entreprise, riche propriétaire de sept maisons, a cependant du mal à répondre à ceux qui l'accusent d'être déconnecté de la vie réelle, au moment où de nombreux Néo-Zélandais font face à des difficultés économiques aggravées par l'inflation. Ses prises de positions conservatrices, notamment sur l'avortement, ont également été critiquées. Interrogé lors d'une interview télévisée en 2021 sur le fait de savoir si l'avortement était « équivalent à un meurtre », il a semblé répondre par l'affirmative. « C'est ce qu'est une position pro-vie », a-t-il répondu.
Il a ensuite modéré ses propos et rejeté l'étiquette de chrétien évangélique. A l'aise en public, il l'est moins pendant les interviews et est parfois enclin à commettre des erreurs. L'année dernière, il a été critiqué pour avoir déclaré que la Nouvelle-Zélande était devenue un « pays très négatif, mou, pleurnichard et replié sur lui-même ».