La direction du Centre hospitalier de Mayotte invitait hier la presse à assister à l’un de ses comités de direction hebdomadaires. L’occasion de présenter la nouvelle équipe mais aussi d’afficher la volonté proclamée de faire preuve de transparence quant aux futurs projets et axes d’orientations de l’hôpital. Hospitalisations à domicile, lutte contre la cybercriminalité, hausse de la natalité, projet d’établissement, certifications de l’hôpital... Les sujets étaient nombreux. Un article de notre partenaire France Mayotte Matin.
« C’est la première fois depuis 10 ans que toute l’équipe de direction est complète » expliquait Catherine Barbezieux hier, présidant le comité de direction de l’hôpital. Une réunion hebdomadaire qui prenait donc des allures exceptionnelles puisque la presse y était conviée. L’occasion de faire preuve de « transprence » selon les mots de la directrice actuelle du CHM, mais aussi de présenter les différents projets. Comme chaque semaine, l’on débutait par les sujets d’actualité. Pour ouvrir le bal, la question des hospitalisations à domicile était évoquée.
Un service d’hospitalisation à domicile qui tend à se pérenniser ?
L’un des directeurs adjoints annonçait alors qu’à l’issue d’une récente réunion avec l’ARS, la question des hospitalisations à domicile pourrait bien tendre à devenir pérenne : une réponse est en cours d’attente pour le moment. Ainsi, ce service créé pendant la crise Covid pour faire face à un afflux important de malades et compte tenu de la nécessité de libérer des lits, s’est avéré d’un réel secours. Dernier département dénué de ce type de service, Mayotte aura, l’un des rares effets positifs de la crise sanitaire, commencé à rattraper son retard. En 2020, 110 patients étaient ainsi suivis, pour la plupart concernant des soins palliatifs (à hauteur de 30%) ou des suivis de cancer (30 % également). Une initiative qui permet de répondre à une demande forte de la population : offrir un accompagnement à domicile.
Ainsi dans l’HAD polyvalent, il serait possible de prendre en charge les pathologies classiques, mais aussi obstétriques et peut-être à terme, psychiatrique.
Une augmentation massive des accouchements
Autre sujet d’une importance fondamentale, tout particulièrement sur l’île au lagon : les naissances. Comme l’expliquait la référente en périnatalité, les chiffres sont exceptionnels cette année. Depuis février, le nombre de naissances par jour s’est élevé de 26 à 30. Depuis trois jours, nous sommes à 40 naissances par 24 heures. Une augmentation que l’on n’a pas connu depuis 2015, laquelle crée « une grande difficulté au niveau de l’hébergement de ces patientes ». La capacité avait été largement augmentée à l’époque, et la question de l’ouverture temporaire d’une autre unité est à l’étude, afin d’accueillir ces dames dans des conditions décentes.
L’hôpital de Petite-Terre
La directrice de l’hôpital souhaitait également revenir sur un certain nombre de points, notamment la rumeur comme quoi la direction aurait changé le projet médical : une rumeur injusti-
fiée selon madame Barbezieux. Elle reprendra ainsi l’historique, expliquant que le dossier élaboré en 2010 avait reçu des financements européens, attribués à la structure pour un service de soins de suite et de réadaptation. Une opportunité rare à l’époque, ce type de service étant inexistant. Jusque-là, les patients en convalescence étaient obligés de partir à La Réunion.
Il s’agissait initialement d’ouvrir une structure de 50 lits adultes et enfants, et fermer les lits de médecine pour les rouvrir en Grande-Terre.
La commission de sécurité est, plus tard, venue visiter l’établissement avant l’ouverture. Mais en raison d’une entreprise de construction ayant déposé le bilan, tout n’était pas fini, le chantier était reporté.
Parmi les revendications actuelles des syndicats, la création d’un service de balnéothérapie. Mais cela n’avait jamais été prévu à l’origine, et la direction n’entend pas retarder le chantier. Et même si des études pour la création de ce service de balnéothérapie ont été réalisées, ce service n’était pas prévu dans le projet initial, cela entrainerait des pénalités financières importantes.
La certification B, une amélioration du niveau des soins
En 2019, le CHM n’avait qu’une certification niveau C. C’est -à-dire que l’établissement est certifié mais qu’il reste des choses à améliorer. La certification, établie suite à un audit qui va évaluer le niveau de qualité et de sécurité des soins, a désormais atteint le niveau B. Un niveau similaire à celui de la Réunion. Et pourtant l’hôpital de Mayotte partait de
loin : en octobre 2016, le CHM n’était pas certifié, le niveau n’était que de E, avec 30 non conformités relevées. Rien que sur le bloc opératoire, l’on recensait 8 non conformités en 2016. il n’y en a désormais plus aucune.
La cybercriminalité sous la surveillance du CHM
Suite aux cyberattaques de 27 hôpitaux en métropole en 2020, la question de la protection contre la cybercriminalité est devenue une préoccupation importante du CHM. Par mois, l’hôpital de Mayotte connaît pas moins de 400 cyberattaques. De la même façon, 30 % des mails reçus par l’établissement sont des spams, sur les 3000 mails mensuels. Et l’impact peut être fort sur l’hôpital : outre les logiciels de rançons qui bloquent les données, beaucoup d’équipements sont biomédicaux, gérés par ordinateur. Les conséquences peuvent être
graves. Ainsi il s’agit pour les équipes du CHM de lutter sur deux volets distincts. D’un côté les risques internes, comme les accès physiques, les comptes, les mots de passe, l’obsolescence des équipements non mis à jour qui restent des portes ouvertes pour les hackers. Ou encore l’absence de sensibilisation des utilisateurs exposés à des spams en continu.
De l’autre côté, les risques externes, comme les infiltrations par mail, les attaques web, les connexions des prestataires, mais aussi les accès utilisateurs à distance : le télétravail ajoute des risques potentiels.
Alors dans les solutions proposées, l’on évoque la sécurisation des accès physiques, le renforcement des modalités de connexions, la suppression de comptes génériques, des solutions de filtrage des mails, de pare-feux...Mais aussi la sauvegarde des données à Petite-Terre, en cas de catastrophe naturelle ou autre.
Le projet d’établissement
En parallèle, le CHM travaille toujours sur son projet d’établissement, et les orientations stratégiques de l’hôpital pour un minimum de 5 ans. Afin d’avancer plus vite, le CHM a demandé à
être accompagné de consultants qui aident à améliorer le projet, le tout en intime concertation avec l’ARS au sein d’un groupe de travail mixte. Un séminaire s’est tenu cette semaine, et de nombreux projets sont à l’étude, notamment la mise en place d’une gouvernance plus stricte pour chacun des projets.
La promesse en somme, de nombreuses initiatives d’envergures menées dans les prochaines années, à l’instar du nouvel hôpital qui semble désormais se concrétiser. Le visage de la santé mahoraise serait-il sur le point de connaître une évolution réelle ?
À l’image de cette nouvelle équipe de direction, le renouveau a parfois du bon...
Mathieu Janvier