« Les sœurs Nardal, les oubliées de la Négritude » : Un documentaire pour rendre hommage à ces deux martiniquaises figures de proue de la « conscience noire »

© DR

« Les sœurs Nardal, les oubliées de la Négritude » : Un documentaire pour rendre hommage à ces deux martiniquaises figures de proue de la « conscience noire »

Un documentaire inédit intitulé « Les sœurs Nardal, les oubliées de la négritude » sera diffusé le 12 mars prochain sur France 5. L’occasion de découvrir la véritable histoire de ces deux martiniquaises intellectuelles, journalistes, féministes et figures de proue méconnues de la « conscience noire » et leur rôle prépondérant joué dans la construction du mouvement de la négritude. Détails.


Du concept de la négritude, l‘histoire a retenu pendant un temps surtout les pères fondateurs : Césaire, Senghor et Damas qui ont mis en lumière ce courant littéraire, politique et culturel et en ont fait un terreau de luttes de libération. Mais peu de gens connaissent le rôle essentiel joué par les sœurs Nardal dans la construction et le cheminement de ce mouvement.

Pourtant, les deux martiniquaises, intellectuelles – Paulette Nardal fut la première femme noire à être inscrite à la Sorbonne – journalistes, féministes ont été des figures centrales et les véritables théoriciennes de la « conscience
noire » qu’elles ont contribué à éveiller dans les années 20.

Lire aussi: Histoire : la Martiniquaise Jane Nardal, figure emblématique du célèbre « salon littéraire des sœurs Nardal », naissait il y a 120 ans

Issues de la haute bourgeoisie mulâtre martiniquaise, Paulette et Jane Nardal ont tenu salon dans leur maison de Clamart, en région parisienne et y ont côtoyé l’intelligentsia noire. De Césaire à Marcus Garvey, le célèbre militant
panafricaniste, au politicien guyanais Félix Eboué, de René Maran, le premier prix Goncourt noir, ou Damas en passant par Senghor jusqu’à l’écrivain noir américain Claude McKay ou encore l’artiste Alan Locke, le Tout-Paris noir
fréquente le salon des sœurs Nardal. Leurs discussions autour de l’internationalisme noir et du panafricanisme forment la « genèse » de la négritude.

© DR-DR – Fonds Christiane Eda-Pierre

Une influence très peu évoquée

Fortes de ces influences, ces dernières fondent la revue du monde noir, la première revue dédiée à l’art, à la littérature et à la pensée noire. Une revue où elles tenteront de déconstruire la pensée dominante blanche. Pourtant, pendant très longtemps, nulle part il n’est fait mention de leur contribution à la naissance du mouvement de la négritude. Leur influence n’a été que très peu évoquée par Senghor, jamais par Césaire et ce n’est que très récemment que leur rôle éminent a été mis en relief notamment dans le milieu intellectuel noir américain.

Lire aussi : À Paris, inauguration de la « Promenade Jane et Paulette Nardal », égéries de la « négritude »

On a tenté d’expliquer ce silence et cette mise à l’écart des sœurs Nardal par leurs positions férocement anticommunistes et anti-autonomistes. Des positions très minoritaires dans une époque où prévalaient surtout dans ce milieu estudiantin et intellectuel les idées progressistes et les théories de la libération des peuples opprimés. On a également évoqué la prégnance de la misogynie et du patriarcat de cette période. On a enfin considéré que leur
œuvre était mineure par rapport à celles d’auteurs d’ouvrages célèbres destinés à la postérité.

Un hommage en résonance avec la journée internationale du 8 mars dédiée à la lutte pour les droits des femmes

Toujours est-il qu’en dépit de leur contribution et de leur rôle particulièrement important joué dans l’architecture de la négritude, les sœurs Nardal restent lesgrandes oubliées de ce concept et de « l’historiographie française », même si
elles en étaient les « vraies pionnières ». C’est ce que s’attache à montrer le documentaire intitulé « Les sœurs Nardal, les oubliées de la négritude » que s’apprête à diffuser le 12 mars prochain France 5, dans la rubrique « case du
siècle outre-mer ».

Lire aussi : La femme de lettres martiniquaise Paulette Nardal parmi les 315 noms destinés à rendre visibles les figures issues de la diversité

Un documentaire inédit de 52 minutes écrit par la journaliste martiniquaise Léa Mormin –Chauvac et Marie-Christine Gambart, réalisé par cette dernière et dans lequel interviennent notamment des historiens et universitaires américains, des parents des sœurs Nardal, des associatifs et l’auteur des mémoires de Paulette Nardal. Bref, des personnalités qui contribuent à les réhabiliter et à les replacer au centre de cette histoire tronquée.

Ce documentaire en forme d’hommage pour ces femmes égéries de la négritude et figures de proue de la « conscience noire » est en résonance avec la journée internationale du 8 mars dédiée à la lutte pour les droits des femmes. Une célébration qui est aussi l’occasion de mettre en avant les initiatives qui placent les femmes au cœur de la création ainsi que leur participation à la vie sociale, politique et économique. En ce sens, on peut sans conteste dire que les sœurs Nardal furent nettement en avance sur leur temps.
 

Lire aussi : Google célèbre la naissance de l'écrivaine martiniquaise Paulette Nardal

E. B.
 

« Les sœurs Nardal, les oubliées de la négritude »

Documentaire de 52 minutes
Diffusé le dimanche 12 mars 2023 à 22h55
Sur France 5
Ecrit par Léa Mormin-Chauvac et Marie-Christine Gambart
Réalisation : Marie-Christine Gambart
Produit par Amélie Juan et Catherine Rouault