Conférence des Régions de France : « Sans agriculture, il n’y a pas de civilisation » lance Huguette Bello

©Outremers360

Conférence des Régions de France : « Sans agriculture, il n’y a pas de civilisation » lance Huguette Bello

La Conférence des Régions de France (et des Outre-mer naturellement) a eu lieu ce mercredi au Salon international de l’Agriculture, en présence de sa présidente Carole Delga, présidente de la Région Occitanie, mais aussi d’Huguette Bello pour La Réunion, d’Ary Chalus pour la Guadeloupe, de Lucien Saliber pour la Martinique et de Gabriel Serville pour la Guyane. 

Les présidents des Régions de France se sont réunis ce mercredi au Parc des expositions de la Porte de Versailles. L’objectif : profiter de la force médiatique du Salon international de l’Agriculture pour marteler un message : « les Régions sont fières du travail que fournissent les agricultrices et agriculteurs » a déclaré Carole Delga en introduction, assurant du soutien des Régions à la politique de souveraineté alimentaire, mais aussi à une rémunération plus décente des salariés agricoles, et à une valorisation des produits sur place des produits agricoles de qualité (dans le cadre de l’achat directement chez le producteur).

Pour autant, l’agriculture française connaît des difficultés : celles liées à l’attractivité du secteur à l’égard des jeunes, celles liées au foncier ou encore, celles liées au changement climatique avec, en lame de fond, le manque d’eau. Cet hiver, le territoire hexagonal a, par exemple, battu des records de sécheresse, avec dans certaines régions, plus de 40 jours sans pluie. Une sécheresse qui, déjà présente l’an dernier, a eu pour conséquence un été marqué par d’importants feux de forêts.

C’est ainsi que le président de la Collectivité territoriale de Guyane, Gabriel Serville, a proposé de mettre à disposition l’eau, qui tombe en abondance sur ce territoire, à disposition des autres Régions. « La Guyane se trouve sur le bassin amazonien, une des zones les plus arrosées du monde » rappelle Gabriel Serville, avec « une recrudescence absolue en termes de pluviométrie ». « Je me suis permis d’imaginer une forme de solidarité entre la Guyane et l’Hexagone » pour « véhiculer des tankers d’eau », « que la Guyane soit pourvoyeuse d’eau douce ». « Ça paraît utopique, ça fait rire certaines personnes » concède le président, rappelant toutefois une maxime de Victor Hugo : « l’utopie est la vérité de demain ».

De son côté, la présidente de la Région Réunion a défendu « l’agriculture d’exception » dans les territoires ultramarins, citant les sucres de La Réunion et de Guadeloupe, « les seuls sucres de canne d’Europe » ou encore la vanille. Huguette Bello a aussi adressé un message à ses confrères hexagonaux, celui de la concurrence : « pour nous, ce n’est pas seulement la Chine et l’Inde, c’est aussi les régions de l’Hexagone avec les produits de dégagement, par exemple les poulets de dégagement qui arrivent (…) à 2 euros le kilos », des « produits de mauvaise qualité, mauvais pour nous » dans des territoires où les enjeux liés à l’alimentation sont colossaux.

Si La Réunion produit 73% des fruits et légumes qu’elle consomme, pour la présidente de la Région, ce n’est pas assez. Et pour augmenter cette part, l’île a besoin de foncier : « Il nous manquera 1 000 hectares pour atteindre la souveraineté alimentaire ». Même combat sur la pêche. Huguette Bello déplore la place de l’importation dans les produits de la pêche, qui représente « 98% de mauvais poisson importé chez nous », et plaide pour un renforcement de la pêche réunionnaise dans l’océan Indien. « Nous avons 0,21% de prises dans une mer aussi poissonneuse, 191 navires contre 600 000 navires étrangers qui viennent racler les fonds », souligne la présidente qui demande notamment que les « bateau de moins de 12 mètres soient financés » et que l’île devienne « le vaisseau amiral de la France et l’Europe dans l’océan Indien ». « Nous souhaitons une vraie politique maritime » insiste-t-elle.

Autre sujet : la compétence agricole. Pour l’heure, la Région Réunion, qui a la compétence sur l’économie, n’a pas celle de l’agriculture, deux sujets pourtant indissociables pour la présidente Huguette Bello. « Nous sommes la seule Région à ne pas avoir la compétence agricole, le FEADER, les fonds européens pour l’agriculture, ce n’est pas nous qui les gérons, mais en 2028, il est prévu que nous le fassions » explique-t-elle, lançant ce qui deviendra, pour Carole Delga, le mot de la fin de cette conférence des Région : « sans agriculture, il n’y pas de civilisation », de même que « sans agriculture, il n’y a pas d’économie ».  

Enfin, Lucien Saliber, président de l’Assemblée de Martinique, est revenu sur le travail entamé par la Collectivité territoriale, relatif à une « nouvelle stratégie agricole basée sur l’agroécologie ». Et le président de l’Assemblée de détailler les enjeux, tels que la protection de la petite paysannerie qui favorise la diversité agricole, l’installation des jeunes, la production locale ou encore, la répartition des fonds européens. Sur le sujet de l’attractivité de la filière auprès des jeunes, c’est avant tout un travail foncier qui s’est engagé pour libérer les terres non disponibles : il s’agit pour la Collectivité de « discuter avec tous les grands propriétaires terriens (…) pour que les terres en jachères puissent être redistribuées aux jeunes agriculteurs ».

« Nous souhaitons que la diversité, l’autonomie alimentaire augmente chez nous : nous importons 80% de ce que nous consommons, on veut passer de 20% de production à 40 voire 50% » a poursuivi Lucien Saliber. Enfin sur le financement, le nerf de la guerre, la Collectivité veut changer le « fonctionnement du POSEI qui consacre la majeure partie de ses financements à la banane et au rhum : il faut absolument une autre répartition des fonds POSEI pour plus d’équité » insiste-t-il.