Paris 2024 : Face à la pression en Polynésie, le COJO étudie deux solutions de repli pour la future tour des juges

Manifestation à Teahupo'o le 15 octobre, contre la nouvelle tour des juges ©Vai Ara o Teahupo'o

Paris 2024 : Face à la pression en Polynésie, le COJO étudie deux solutions de repli pour la future tour des juges

Face à la pression des associations et des surfeurs de Teahupo’o, qui sont vent debout contre le projet de nouvelle tour des juges, Paris 2024 étudie deux solutions de repli. Mais les voir aboutir semble improbable. Pour l’organisation, c’est un énième effort à faire dans ce dossier. Explications de notre partenaire Radio 1 Tahiti.

Le Pays et le comité organisateur des Jeux vont-ils s’asseoir sur une tour à 550 millions ? « On ne peut plus faire marche arrière », a plusieurs fois répété la ministre des sports Nahema Temarii. Pourtant, sous la pression des riverains, et notamment de certains surfeurs et de l’association Vai ara o Teahupo’o, Paris 2024 étudie des solutions pour éviter d’envenimer le conflit. Alors que le montage de cette nouvelle tour, ouvrage complexe, est en cours à terre, celle-ci pourrait bien ne jamais arriver dans le lagon.

Face à la pétition qui circule contre les retombées environnementales que pourrait engendrer le chantier de la tour en aluminium (108 000 signatures à ce jour), et particulièrement ses fondations, les organisateurs des Jeux révisent leur copie. « L’enjeu prioritaire est d’obtenir un avis favorable d’une commission de sécurité au sujet des fondations existantes et de la tour en bois, et la garantie d’une homologation », explique Barbara Martins-Nio, responsable du site de Tahiti pour le comité olympique.

L'ancienne tour des juges, qui ne serait pas aux normes pour les JO de Paris 2024 ©Radio 1 Tahiti

Ce qui s’était avéré impossible au moment de l’annonce du projet. Pour tenter de convaincre un bureau de contrôle technique de valider l’ancienne structure, Paris 2024 explique « revoir nos besoins à la baisse ». A savoir, alléger encore plus la structure, en y mettant moins de monde, histoire d’avoir « des besoins identiques à ceux de la WSL », qui utilise cette tour chaque année, avec un cahier des charges loin des exigences olympiques.

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« Nous sommes prêts à faire l’effort et nous travaillons avec le gouvernement et l’IJSPF (qui est maître d’œuvre), pour donner plus de précisions », ajoute Barbara Martins-Nio. Mais, ceci dit, « si l’avis reste défavorable, on ne pourra pas ». Difficile d’imaginer qui voudra bien homologuer une structure qui ne possède « ni plan d’exécution, ni plan d’assemblage, ni calcul de charge ». La qualité du bois pourrait également être rédhibitoire. Autant dire que voir l’actuelle tour en bois accueillir les juges olympiques semble aussi probable qu’il neige un jour à Teahupo’o.

La tour sur le rivage ?

Autre solution, actuellement prônée par les associations : utiliser la tour en aluminium mais sur la rive, soit à plus de 700 mètres de la vague. Un pas de géant en arrière, alors que les fondations de la nouvelle tour doivent être creusées juste à côté des anciennes, à 250 mètres du reef break. Là encore, Paris 2024 étudie cette solution. « Est-ce qu’on peut juger à 750 m, de visu ? Non. Est-ce que les moyens techniques renforcés le permettraient ? Certainement », répond la responsable de Teahupoo pour le CIO. 

« Mais, ajoute-t-elle, il faut bien avoir conscience que pour juger une vague, il faut la voir de sa formation jusqu’à la sortie du surfeur. Et à 750 mètres, ce n’est pas possible. » Même chose pour la captation d’images, qui seront diffusées en mondovision : « être aussi loin ne permettrait pas d’avoir une visibilité totale de la formation de la vague ». Ce qui n’empêche pas l’organisation des Jeux de faire preuve de bonne volonté, puisqu’elle interroge actuellement la Fédération internationale de surf et son diffuseur audiovisuel pour étudier cette possibilité.

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Un nouvel effort pour Paris 2024, pour qui la polémique « est assez dure » à encaisser. « Elle divise, et ce n’est pas l’objectif des Jeux, nous souhaitons fédérer », rappelle Barbara Martins-Nio, qui voit là « un petit coup d’assommoir ». D’autant que Paris 2024 a déjà fait de nombreux pas en avant vers les riverains, et pensait avoir tout bien fait.

Les travaux n’étaient pas soumis à une étude d’impact ? Une mission environnementale a tout de même été commandée. Mission « insuffisante » pour l’association Vai ara o Teahupo’o, qui rappelle que c’est aux Jeux de s’adapter au site, et non l’inverse. « Nous avons montré que nous avons la volonté de nous adapter. Nous sommes revenus sur nos projets de pont pour les voitures et de ponton. Même chose pour les fare (maisons, ndlr) », liste Barbara Martins-Nio.

Problème pour cet énième écueil organisationnel, le compteur tourne. Alors que Vai ara o Teahupo’o vient d’annoncer une manifestation pour le 10 novembre à Papeete, les travaux des nouvelles fondations sont censés durer trois semaines et être livrés avant la fin de l’année. Tic tac, tic tac, « la décision doit être prise très rapidement », souligne Barbara Martins-Nio.

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De leur côté, les opposants à leur nouvelle tour restent fermes, pas question pour eux de voir l’édifice en aluminium se planter dans le lagon. Pas question non plus de voir la barge de forage s’approcher du site, quand bien même un tracé a été balisé pour éviter les coraux. « Paris 2024 a tout intérêt à respecter les associations et ceux qui ont signé la pétition », prévient Cindy Otcenasek, présidente de Vai ara o Teahupo’o. Reste à savoir qui aura le dernier mot. Une chose est claire, hors de question pour Paris de renoncer à ces jeux tahitiens.

Waldemar de Laage pour Radio 1 Tahiti