Alors qu’il annonçait devant l’Assemblée nationale que le texte de réforme constitutionnelle sur le dégel du corps électoral provincial en Nouvelle-Calédonie ne serait pas soumis au vote du Congrès de Versailles, le Premier ministre a rectifié le tir devant les sénateurs ce mercredi.
« Le projet de loi constitutionnelle sur le dégel du corps électoral adopté en mai dernier par les assemblées parlementaires ne sera pas soumis au Congrès », avait déclaré le chef du gouvernement dans sa déclaration de politique générale, mardi devant l’Assemblée nationale. Une non-soumission au Congrès qui vaut pour un abandon du texte qui a mis le feu aux poudres dans l’archipel, le 13 mai dernier, jour de son adoption au palais Bourbon.
Mercredi devant le Sénat, il a néanmoins précisé que la « mission de concertation et de dialogue » conduite par les présidents de l'Assemblée nationale et du Sénat, Yaël Braun-Pivet et Gérard Larcher, devrait se saisir de cette question. « La composition du corps électoral et son élargissement pour les prochaines élections provinciales (...) devront être abordés », a-t-il clarifié. Plus tôt en QAG, Michel Barnier avait aussi déclaré vouloir « retravailler la question du corps électoral », assurant que « c’est en accord avec le président de la République » que le report des élections provinciales et la non-soumission du texte de dégel au Congrès avait été décidée.
« Pas de rétropédalage »
Selon nos informations toutefois, le Premier ministre se serait, à ce sujet, avancé trop rapidement. Alors que seul le chef de l’État est compétent pour convoquer le Congrès, ce dernier n’aurait pas été averti que le Premier ministre irait aussi loin sur le dégel du corps électoral, rapporte également Politico. « Il avait demandé à Michel Barnier de ne pas parler de ce sujet-là et de se concentrer sur l’économie », confie une source à la Newsletter politique matinale.
« Pas de rétropédalage » assure toutefois Matignon à Public Sénat : « il n’y aura pas de réunion du Congrès ». « Le Président était d’accord pour l’annonce du Premier ministre » ajoute-t-on. Et si l’on se fie à ce dernier, les élus calédoniens devraient en être fixés en novembre, lorsqu’ils seront reçus par Emmanuel Macron à l’Élysée. De notre propre analyse, le texte voté en mai dernier devrait laisser place à un « consensus politique », qui prendrait en compte, parmi les nombreux sujets sur l’avenir de l’archipel, l’élargissement du corps électoral et ce, avant les élections provinciales reportées à fin 2025.
La clarification devant le Sénat a rassuré le député Renaissance de Nouvelle-Calédonie, Nicolas Metzdorf, parmi les têtes d’affiches de la droite non-indépendantiste de l’archipel. « Les choses sont désormais plus claires. Et la France a moins mal à sa démocratie » a-t-il estimé mercredi soir, alors que la veille, il n’excluait pas le vote d’une motion de censure après le discours de politique générale à l’Assemblée nationale. Outre l’abandon du texte de dégel, Nicolas Metzdorf avait aussi fustigé l’absence de mesures économiques pour la Nouvelle-Calédonie, dont l’économie déjà en difficulté a été mise à terre par les émeutes.
Le site Public Sénat a aussi noté une autre différence entre son discours à l'Assemblée nationale et celui du Sénat. Devant l'hémicycle du palais Bourbon, Michel Barnier Michel Barnier assurait vouloir « personnellement » s’employer à trouver une sortie de crise, signant un retour du dossier calédonien à Matignon, assorti d'une « délégation interministérielle placée auprès du premier ministre et du ministre des Outre-mer », qui permettra « de garantir une gestion dans la durée de l’ensemble des enjeux calédoniens ». Un passage qui n'a pas été repris dans le DPG prononcé devant le Sénat. Michel Barnier n’a pas non plus repris son annonce de la veille, faite « en accord avec le Président de la République », de « reporter les élections provinciales jusque fin 2025 ».
On apprend toutefois ce matin que le report des élections provinciales devrait s'appuyer sur une proposition de loi organique socialiste déposée ces derniers jours sur le bureau du Sénat, qui propose de reporter le renouvellement général des membres du congrès calédonien et des assemblées de province au « 30 novembre 2025 ». Le texte sera examiné le 23 octobre par le Sénat, selon l'ordre du jour dévoilé mercredi à l'issue d'une conférence des présidents à la chambre haute. Dans une lettre envoyée avant son discours aux parlementaires calédoniens, Michel Barnier a affirmé que « cette période de quelques mois permettra de mener la concertation sur l'avenir institutionnel et le développement de la Nouvelle-Calédonie ».
Michel Barnier a également assuré les parlementaires de son « engagement à faire face à l'urgence économique et sociale en Nouvelle-Calédonie », promettant d'examiner les « conditions de prolongation sur les prochaines semaines des aides d'urgence » déjà mises en place et évoquant « de nouvelles mesures de soutien ».