Six mois après le second référendum d’indépendance, le Congrès de Nouvelle-Calédonie est désormais, selon l’Accord de Nouméa, en mesure de déclencher un troisième référendum d’indépendance.
En effet, l’Accord de Nouméa, inscrit dans la Constitution en tant que loi organique, prévoit qu’un minimum de 18 élus du Congrès calédonien, sur 54, peut voter en faveur d’un référendum, six mois après le précédent. En théorie, les indépendantistes, favorables à un troisième et dernier référendum, et au nombre de 29 (16 pour l’UC-FLNKS et Nationalistes avec l’Éveil océanien, 12 pour l’UNI et une élue non inscrite du Parti travailliste), sont en mesure de le déclencher. Toujours selon l'Accord de Nouméa, un président du gouvernement et un gouvernement de plein exercice n'est pas nécessaire pour déclencher un référendum. Mais en pratique, qu’en est-il ?
Si l’explosif dossier de la vente de l’usine de Vale dans le sud calédonien a finalement donné lieu à un accord politique ouvrant la voie à une cession apaisée, l’impasse politique pour l’élection du président du 17èmegouvernement permettant une entrée en plein exercice de ce dernier a souligné les dissensions chez les différents groupes indépendantistes. Début mars, l’image « historique » de Sonia Backès, présidente de la province Sud, Roch Wamytan, président du Congrès, ainsi que le Collectif « Usine du Sud : Usine Pays » signant ensemble un accord sur l'usine du Sud, laissait entrevoir une éclaircie dans le ciel politique calédonien.
Lire aussi : Vale Nouvelle-Calédonie : Épilogue d’une reprise tempétueuse avec la signature de l’accord de cession
Après des mois de tensions autour du dossier, avec en fin 2020 des manifestations tournant à la confrontation, la sortie par le haut de l’avenir de l’usine adossée au massif de Goro apparaissait comme une réussite pour les opposants, coutumiers ou indépendantistes. Bien que le groupe suisse Trafigura, qui cristallisait en partie les oppositions, reste à l’actionnariat de l’usine, la réappropriation des titres miniers par la province Sud et la notion d’ « usine Pays » défendu par le collectif étant des acquis dans l’accord de cession, fait office d’une mobilisation réussite pour l’ICAN, le Collectif « Usine du Sud : Usine Pays » et les indépendantistes.
Cependant, les deux principaux groupes indépendantistes au Congrès n’arrivent pas à se mettre d’accord sur le nom d’un président pour diriger le gouvernement collégial calédonien. D’un côté, l’UC-FLNKS et Nationalistes, 3 sièges au gouvernement, défend la candidature de Samuel Hnepeune, ancien patron du Medef. De l’autre, l’UNI, 3 sièges également, défend celle de Louis Mapou. Et au bout de trois tentatives d’élection, le 17ème gouvernement, majoritairement indépendantiste, n’est toujours pas en exercice. Lorsqu’en février les membres indépendantistes du précédent exécutif avaient provoqué sa chute, ils mettaient en avant le dossier de l’usine du Sud et la préparation d’un projet politique et économique en vue du 3ème référendum.
Lire aussi : Nouvelle-Calédonie : Troisième et vaine tentative d'élection d'un président du gouvernement
Et c’est sur ce second thème que les deux principales formations indépendantistes semblent diverger. Mais les indépendantistes calédoniens ont-ils réellement besoin de s’entendre sur un projet politique commun d’une Nouvelle-Calédonie indépendante avant le référendum ? Pas forcément. En effet, si les principales formations indépendantistes avaient fait front commun pour le « OUI » à l’autodétermination lors des précédentes consultations, leur vision respective de l’après a toujours été différente. Et après tout, le référendum n’est pas une fin en soi.
Si le « OUI » l’emporte au troisième et dernier essai, s’en suivra une période de transition qui pourrait durer quelques années permettant notamment de mettre en place les modalités pour le transfert des dernières compétences. Défense, sécurité intérieur, justice, nationalité, monnaie : autant de sujets propices aux discussions, aux négociations, non seulement avec Paris mais aussi entre politiques calédoniens. Au regard des écarts qui se resserrent, un troisième « NON » à l’indépendance devrait, là aussi, être la base de nouvelles négociations.
Quelle que soit la décision qui sera prise dans les prochains jours, voire semaines, sur l'éventualité d'un troisième référendum, difficile d'imaginer les indépendantistes défendre le “OUI” à l'indépendance sans avoir, en amont, acté une candidature unique, et surtout un programme et une vision politique et économique commune, pour l'élection du président du gouvernement.