En visite depuis ce samedi en Nouvelle-Calédonie, le ministre de l’Économie et des Finances a annoncé un « pacte pour le nickel calédonien » qu’il souhaite signer avec les parties prenantes début 2024.
Interrogé par Radio Rythme Bleu, Nouvelle-Calédonie La 1ère et Caledonia, Bruno Le Maire, accompagné par Gérald Darmanin, veut conclure un « pacte pour le nickel calédonien » pour sauver cette filière dont les trois principaux opérateurs sont en difficultés financières.
« Ce n’est pas la compétence de l’État mais tout ce que je peux faire pour construire une filière nickel rentable dans l’avenir, je le ferais », a assuré Bruno Le Maire, qui avec le ministre de l’Intérieur et des Outre-mer, a visité les sites miniers de Prony Resources dans le sud et de Koniambo dans le Nord. Estimant que « la solution doit être trouvée dans les semaines qui viennent », Bruno Le Maire avance, pour « avoir un projet économique viable pour tous les calédoniens », l’élaboration et la signature d’un pacte d’ici début 2024, avec les parties prenantes politiques et économiques.
Selon le ministre, ce pacte reposera sur trois volets. L’exploitation et exportation, « condition essentielle pour la rentabilité financière immédiate des trois sites industriels » ; la subvention à l’énergie, « l’État est prêt à prendre toute sa part aux côtés des autorités cal pourvu que ce soit sur la base d’un projet rentable » ; et les débouchés économiques vers l’Europe, où la construction de véhicules électriques et hybride nécessite un approvisionnement sur ce minerai.
« Il y a deux types d'activité en Nouvelle-Calédonie » avait rappelé le cabinet du ministre avant son départ : « l'extraction minière et le traitement métallurgique qui transforme ce nickel ». « L'essentiel des difficultés se concentre sur la partie de traitement local, donc sur les usines, puisque l'activité minière est rentable et que les activités métallurgiques sont très fortement déficitaires. Cela fait qu'au global, les trois entreprises qui ont des activités métallurgiques sur le territoire sont en déficit », ajoute-t-il.
Le ministère a ciblé trois types de difficultés. Tout d'abord, « on a du mal à opérer à leur plein potentiel ces usines d'une part parce que l'approvisionnement minéral est compliqué par des difficultés de permis, d'autre part parce que les usines ont des difficultés techniques qui les empêchent d'atteindre leur pleine capacité », indique cette source.
Deuxième origine des difficultés, « c'est un système énergétique extrêmement coûteux. Les usines payent une électricité entre 150 et 200 euros du MWh, alors que les autres usines dans la région sont à des niveaux inférieurs à cela », poursuit le ministère. Enfin, « la très forte croissance des capacités de production de nickel dans les pays de la région, notamment en Indonésie, augmente la concurrence sur le marché et pèse sur les prix du nickel ».
L'industriel historique, la Société Le Nickel (SLN) est fortement endettée (493 millions d'euros de dette financière nette fin 2022) et son actionnaire majoritaire Eramet a confirmé fin octobre qu'il n'injecterait pas plus d'argent dans sa filiale. Or la SLN a effectué en août le dernier tirage d'un important prêt de 60 millions d'euros consenti par l'État. Prony Resources, dans le sud du territoire, est placée sous mandat ad hoc avec un endettement qui atteignait fin 2022 149 millions d'euros.
Enfin, l'usine de production de ferronickel Koniambo Nickel SAS, projet phare du rééquilibrage entre les provinces nord et sud, affiche une dette record de 13,7 milliards d'euros. La province nord en est actionnaire à 51%. Or le groupe anglo-suisse Glencore qui détient les 49% restants, a fait savoir en septembre par communiqué qu'il se retirerait du projet si « aucune nouvelle solution de financement n'est trouvée d'ici-là ».
Le scénario de la fermeture de ces usines est sérieusement envisagé par l'Inspection générale des finances, dans un rapport sur le secteur rendu début juillet. « Le statu quo n'est pas possible. Nous devons bouger parce que c'est la condition indispensable pour garantir la rentabilité financière immédiate des trois sites industriels » a insisté Bruno Le Maire.
« L'État n'est pas un puits sans fond » a aussi rappelé le ministre, alors que Paris soutient l'économie calédonienne à hauteur d'1,5 milliard d'euros. « J'ai une confiance très forte dans la capacité de la Calédonie à sortir de la crise économique sur la base de projets rentables, sains, qui feront l’objet d’un engagement collectif », a conclu le ministre qui poursuit ses visites localement jusqu’à lundi. Sur place, il est aussi attendu sur le sujet du tourisme.