Le 28 mars 2025 à Papeete, le gouvernement polynésien a rejoint l’Appel à l’action des peuples du Pacifique pour la protection de l’océan, en présence de plusieurs délégations de la région. En amont de la troisième Conférence des Nations unies sur les océans (UNOC3), cet appel exhorte la communauté internationale à mieux prendre en compte les bouleversements climatiques et la destruction des fonds marins, et à respecter son engagement de protéger au moins 30% des océans d’ici 2030. La Polynésie est le premier pays à signer cette déclaration.
Au cours d’une cérémonie solennelle réunissant des représentants des peuples autochtones du Pacifique (Polynésie, Nouvelle-Calédonie, Wallis-et-Futuna, Nouvelle-Zélande, Tonga, Samoa, Saipan, Îles Mariannes, Niue, Rapa Nui, Îles Cook, Fidji, Hawaï et Guam), un Appel à l’action des peuples du Pacifique pour la protection de l’océan, « Te Reo O Te Moana » (La voix de l’océan), a été lancé le 28 mars à la Présidence et à l'Assemblée de la Polynésie à Papeete. Objectif : mettre en place des actions urgentes dans le cadre de la troisième Conférence des Nations unies sur les océans qui se tiendra à Nice en juin 2025.
« Nous vous demandons de comprendre que Te Moana (l'océan) est notre ancêtre, notre maison. Notre relation avec Te Moana est fondée sur une relation de réciprocité constante où il y a donner et recevoir. Avec de plus en plus d'extractions, l'équilibre a été rompu. L'expropriation a entraîné la surpêche, le changement climatique, la pollution et la destruction de l'habitat. Nous sommes unis pour rétablir cette réciprocité », débute l’Appel.
Le document porte des revendications bien précises. En premier lieu, « Vivre, honorer et préserver les liens autochtones, communautaires et ancestraux profonds avec l'océan, qui servent de fondement à notre identité commune ». Les signataires souhaitent valoriser les savoirs des peuples du Pacifique, à travers les connaissances transmises de génération en génération, comme les méthodes de navigation et la gestion maritime, avec une pleine participation dans l’administration des ressources naturelles et des prises de décision.
Deuxièmement, l’Appel demande la « création d'aires marines protégées et conservées en tant que sanctuaires pour l'avenir » ainsi que la protection de la vie marine, « symboles vivants de nos cultures ». Le texte appelle notamment à l’instauration d'un réseau de sanctuaires océaniques dans les zones économiques exclusives (ZEE) sous juridiction nationale dans le but de contribuer à la protection de 30% des habitats océaniques mondiaux. Il demande également « l'interdiction immédiate de toutes les pratiques nuisibles et destructrices, telles que le chalutage de fond, la pêche illégale, l'utilisation de dispositifs de concentration de poissons dérivants et l'extraction minière ».

L’Appel Te Reo O Te Moana souhaite aussi « promouvoir la pêche artisanale locale, un patrimoine vivant ». Les signataires préconisent ainsi la création de zones réservées à la pêche artisanale autour des îles et des côtes, afin d'assurer la durabilité et l'accès aux ressources marines. « Par ces pratiques, nous garantissons une alimentation saine, locale et respectueuse de l'environnement pour nos communautés », ajoutent-ils.
Quatrièmement, le document insiste sur la nécessaire prévention de l'exploitation minière des grands fonds, qui entraînent la perturbation d’écosystème fragiles et indispensables à la santé de l’océan. « Nous appelons à un moratoire immédiat ou à une pause de précaution, reconnaissant que les fonds marins ne doivent pas devenir une zone de destruction, honorant les valeurs de respect et de sagesse portées par nos ancêtres ».
Enfin, l’Appel encourage la communauté internationale à soutenir et mettre en œuvre l'Accord au titre de la Convention des Nations unies sur le droit de la mer sur la conservation et l'utilisation durable de la biodiversité marine des zones situées au-delà de la juridiction nationale (Accord BBNJ). Cela signifie l’adoption de « mesures claires qui protègent les écosystèmes critiques dans au moins 30% des zones situées au-delà des juridictions nationales, en lien et en cohérence avec les protections nationales ». Et les signataires de conclure : « Ensemble, nous affirmons que la protection de l'océan est une responsabilité sacrée. L'océan est notre passé, notre présent et notre avenir. Protégeons-le, ensemble, pour nos ancêtres, pour nous-mêmes et pour les générations à venir ».
Notons également qu’à l’occasion du sommet international SOS Océan, le 31 mars à Paris, le célèbre navigateur hawaïen Nainoa Thompson et le réalisateur polynésien Matahi Tutavae ont remis l’Appel Te Reo O Te Moana au président Emmanuel Macron et à Olivier Poivre d’Arvor, ambassadeur français pour les pôles et les enjeux maritimes, en charge de l’organisation de la troisième Conférence des Nations unies sur les océans (UNOC3), qui se déroulera à Nice en juin 2025.
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PM