Quelques jours après le troisième et dernier référendum d’autodétermination dans le cadre de l’accord de Nouméa, Mimsy Daly, patronne du Medef et membre du consortium NC Eco s’exprime dans les colonnes d’Outremers360. Elle évoque notamment la phase « de convergence et de stabilité » qui s’ouvre et le rôle que les acteurs socio-économiques veulent jouer. « Il faudra que chacun prenne ses responsabilités » souligne Mimsy Daly qui appelle à « trouver maintenant les solutions collectives pour notre territoire ».
Le troisième et dernier référendum d’autodétermination prévu dans l’accord de Nouméa a eu lieu à la date prévue. Il a eu pour issue la large victoire du non à l’indépendance sur fond d’abstention record. Dans quel état d’esprit le monde économique que vous représentez se trouve aujourd’hui ?
Nous sommes soulagés. Déjà parce que ce référendum s’est organisé et déroulé de façon sereine, apaisée et il marque la fin d’un processus référendaire qui a profondément divisé la Nouvelle-Calédonie. Ce processus a également marqué économiquement notre territoire avec les incertitudes et la fracture sociale qui la crée. Nous sommes très heureux de sortir de cette phase et de nous tourner désormais vers la construction d’un projet d’avenir pour la Nouvelle-Calédonie.
Ce projet d’avenir, comment le voyez-vous d’un point de vue économique ?
L’ensemble du monde économique s’est rassemblé au sein du consortium NC Eco pour porter des propositions qui vont vers une refonte de notre modèle économique et social, visant à la réduction des inégalités et à la reprise économique dans un cadre soutenable.
Aujourd’hui, l’autonomie acquise de la Nouvelle-Calédonie n’est pas financée. Il nous semble important de redéfinir les fondamentaux de notre modèle économique vers un modèle qui soit soutenable et plus égalitaire. C’est pourquoi nous avons porté des propositions notamment sur l’économie sociale et solidaire en terre coutumière, sur une réforme fiscale d’ampleur de la Nouvelle-Calédonie qui permettra de reposer les bases pour une meilleure compétitivité économique de notre territoire, et sur le développement de filière d’avenir qui permettent là-aussi d’attirer les investisseurs et créer de l’emploi.
Le ministre des Outre-mer a évoqué un après-référendum en trois temps, le premier étant celui des urgences : crise sanitaire, difficultés budgétaires de la Collectivité, nickel avec les usines du Nord et de la SLN. Est-ce que vous espérez être associés aux discussions ?
Absolument, et nous pensons que c’est nécessaire. La Nouvelle-Calédonie a besoin d’unité et la contribution de la société civile et du monde économique est nécessaire pour les discussions qui vont s’ouvrir. Nous saluons la méthode que Sébastien Lecornu a détaillée, méthode qui intègre très clairement la société civile : le monde économique, mais aussi les étudiants, la jeunesse. C’est ainsi que le modèle pourrait être à la fois consensuel et partagé.
Je reviens sur la question du nickel. Maintenant que la problématique de l’Usine du Sud est réglée, viendra celle de l’Usine du Nord avec le départ possible de Glencore et de la SLN en difficulté. Est-ce qu’il n’existe pas une impasse avec le nickel ?
Je n’appellerais pas cela une impasse. Le problème est que la « doctrine nickel » a longtemps été dictée par des impératifs politiques. Aujourd’hui nous demandons un grand pragmatisme économique par rapport à la gestion de cette « doctrine nickel ». Il y a un équilibre à trouver entre l’exportation de minerai brut et l’exportation de minerai transformé. La Nouvelle-Calédonie a beaucoup d’atouts à faire valoir sur le marché du nickel mais aujourd’hui elle est dans une situation d’impasse et de blocage liée à des considérations pour l’essentiel politiques. Il est absolument nécessaire d’écrire une nouvelle stratégie nickel pour la Nouvelle-Calédonie qui, je le répète, a énormément d’atouts à faire valoir sur le marché mondial du nickel.
Sur les discussions institutionnelles, concernant le futur statut de la Nouvelle-Calédonie, qui devrait s’ouvrir après la Présidentielle et les Législatives, là aussi vous souhaitez apporter votre contribution ?
Nous considérons que les institutions doivent être au service d’un projet économique et social. Donc dans la méthode et le calendrier définis par l’État et Sébastien Lecornu, il y a d’abord la réflexion sur le projet économique et social de la Nouvelle-Calédonie et ensuite, la définition des institutions. Pas l’inverse.
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En Nouvelle-Calédonie, l’État a défini un fonctionnement institutionnel à vocation essentiellement politique pour le rééquilibrage et aujourd’hui, nos institutions doivent se mettre au service d’un projet de société. C’est dans le cadre de la définition du projet de société que nous souhaitons être associés, et ensuite nos élus, dont c’est la responsabilité, définirons nos institutions qui pourront au mieux servir ce projet de société. C’est une question de cohérence dans l’approche et surtout de changement de paradigme.
Vous avez évoqué les incertitudes liées à ces trois référendums qui se sont suivis. C’était d’ailleurs un des arguments pour faire ce référendum « le plus tôt possible ». Mais est-ce qu’avec l’issue de ce 3ème référendum et tous les paramètres que l’on connaît comme la position des indépendantistes et l’abstention record, la Nouvelle-Calédonie n’est-elle pas encore dans cette incertitude ?
L’accord de Nouméa prévoyait la situation qui s’est produite. Nous avons eu trois consultations qui ont produit leurs résultats. Il est de la responsabilité de chacun de se réunir, et comme l’accord le stipule, d’examiner la situation ainsi créée et de proposer un nouveau dispositif pour la Nouvelle-Calédonie. Nous sommes bien évidemment dans l’attente et je pense qu’il faut laisser le temps passer. Ensuite, il faudra que chacun prenne ses responsabilités. L’accord de Nouméa arrive à son terme et il faut trouver maintenant les solutions collectives pour notre territoire. Tout ce qui compte, c’est que la Nouvelle-Calédonie soit gagnante à l’issue de ce processus. Que nous sortions finalement plus forts et plus unis qu’avant et je pense que c’est tout à fait possible. Bien évidemment, il y a une responsabilité politique très forte vis-à-vis des populations.