Changement climatique : En Nouvelle-Calédonie, un projet pour renforcer la résilience alimentaire des îles Loyauté et du Vanuatu voisin

©Anthony Tejero / Les Nouvelles Calédoniennes

Changement climatique : En Nouvelle-Calédonie, un projet pour renforcer la résilience alimentaire des îles Loyauté et du Vanuatu voisin

Dévoilé à l’occasion des cinq ans de l’Initiative Kiwa, conçue pour lutter contre le changement climatique dans le Pacifique, le projet « Resico » prévoit le développement de serres et de pépinières aux Loyauté et sur neuf îles du Vanuatu. Objectif : introduire de nouvelles espèces et variétés afin de renforcer la sécurité alimentaire des populations, particulièrement exposées aux effets du changement climatique. Explications de notre partenaire Les Nouvelles Calédoniennes.

Il est le dernier né des projets Kiwa, un vaste programme visant à adapter les territoires insulaires du Pacifique aux effets du changement climatique. Piloté par l’Institut agronomique calédonien (IAC), « Resico » s’apprête à se déployer sur les trois îles Loyauté et sur neuf îles du Vanuatu, avec l’ambition de parvenir, en trois ans, à renforcer la sécurité alimentaire des populations qui y vivent.

La méthode : « développer des systèmes agroforestiers pour assurer un enrichissement de la biodiversité », expose Laurent L’huillier, directeur général de l’IAC, partant du principe, scientifiquement étayé, que « plus un écosystème dispose d’une diversité, plus il saura se montrer résilient face aux pressions extérieures ».

Pratiques agricoles traditionnelles

Le programme a été dévoilé jeudi 22 mai à l’occasion des cinq ans de Kiwa. Il se décline en plusieurs axes stratégiques, dont le premier consiste à dresser un état des lieux « et des connaissances traditionnelles des populations face aux aléas climatiques auxquels ils font face depuis toujours », détaille Laurent L’huillier. Elles viendront s’ajouter aux connaissances scientifiques de l’IAC et des partenaires du projet (IRD, UICN…) pour définir les pratiques les plus adaptées.

Un diagnostic sera également réalisé sur la consommation alimentaire des habitants de ces 12 îles. « On le sait, nous consommons de plus en plus de produits importés, les communautés rurales ne sont pas épargnées par ce phénomène », observe le directeur de l’IAC. « La conséquence, c’est aussi l’abandon des pratiques agricoles. Le projet 'Resico' porte la volonté que les populations se nourrissent mieux en consommant leurs propres produits. »

À ces diagnostics succédera la partie plus concrète du programme : la construction, sur chacune des îles, de serres de quarantaine et de pépinières afin d’introduire de nouvelles espèces et variétés. « On sélectionnera surtout des plantes à multiplication végétative, comme les patates douces, qui correspondent également aux pratiques agricoles des populations ». Une méthode qui vise à faciliter l’introduction de nouvelles variétés en suscitant une adhésion immédiate.

L’IAC travaille actuellement à constituer les « communautés » du projet Resico, qui seront composées à terme d’une centaine de personnes par île, chargées d’assurer le développement des parcelles agricoles et de promouvoir cette diversification. « On espère que ça puisse sortir de cette sphère pour s’étendre à toute la population de ces territoires, voire aux autres îles du Pacifique », envisage Laurent L’huillier.

Lutte contre les nuisibles

Il s’agira également d’élaborer avec les membres de ces communautés (habitants, agriculteurs, coutumiers…) des « cartes participatives » listant un certain nombre d’informations : pluviométrie, emplacement des forêts… Autant de données nécessaires à l’identification des parcelles idoines qui accueilleront les nouvelles espèces et variétés extraites des pépinières. Dernier axe de travail : la lutte contre les nuisibles. « On n’est pas à l’abri d’aiguiser leur appétit en introduisant de nouvelles plantes, il faudra être vigilants. »

Le programme profite d’un financement de 493 millions de francs, dont 394 millions apportés par l’Initiative Kiwa. Cela en fait « le projet le plus important porté par l’IAC », note le président de l’Institut, Charles Washetine, également élu au Congrès (UNI) pour la province des Îles.

Initiative Kiwa : 26 projets développés et un budget en progression

Il y avait beaucoup de monde, ce jeudi 22 mai, sur la photo de famille. Sur la terrasse du Château Royal, les partenaires de l’Initiative Kiwa ont pris la pose pour immortaliser les cinq ans de ce programme, à l’occasion d’un comité d’orientation stratégique organisé, probablement pas par hasard, en pleine Journée internationale de la biodiversité.

Évoquée pour la première fois par Emmanuel Macron lors du One Planet Summit de 2017, l’Initiative Kiwa a vu le jour en 2020 avec l’ambition de permettre à 19 pays et îles du Pacifique identifiés de monter des projets locaux et régionaux pour lutter contre le changement climatique ou, à défaut, s’adapter à ses effets. Avec un principe central : s’appuyer sur des « solutions fondées sur la nature ».

Après cinq années de fonctionnement, le programme compte « neuf projets régionaux et 17 projets locaux », s’est félicitée Virginie Bleitrach, directrice régionale Océan Pacifique de l’AFD en Nouvelle-Calédonie et présidente 2025 du Comité d’orientation stratégique de l’Initiative Kiwa.

Le programme, financé par l’Union européenne, la France (via l’AFD), le Canada, l’Australie et la Nouvelle-Zélande, disposait à son lancement d’un budget de 4,2 milliards de francs. Aujourd’hui, il profite d’une enveloppe de 9,2 milliards de francs. Outre le projet « Resico », l’Initiative Kiwa prévoit de porter plusieurs projets nouveaux en 2025, dont « Women’s Work », qui promeut la gestion durable des écosystèmes en Micronésie à travers la valorisation du rôle, essentiel, joué par les femmes.

Baptiste Gouret pour Les Nouvelles Calédoniennes