Une conférence sur la gestion de l'eau sur le plateau des Guyanes officialise la création d'un observatoire régional

Une conférence sur la gestion de l'eau sur le plateau des Guyanes officialise la création d'un observatoire régional

La conférence Bio-plateaux a permis la création d'un observatoire régional des bassins versants transfrontaliers du plateau des Guyanes a été en présence de plusieurs personnalités politiques, comme le président du Suriname, Chan Santokhi, Jean-Paul Ferreira, premier vice-président de la Collectivité Territoriale de Guyane en charge du développement durable, Patrick Lecante, président du Comité de l'eau et de la biodiversité de Guyane ainsi que des représentants de l’Amapá et des peuples autochtones des trois territoires. Reportage de notre partenaire Radio Péyi.

Le projet Bio-Plateaux, un programme de coopération transfrontalière initié en 2021 pour la gestion intégrée des ressources en eau entre la Guyane, l'État de l’Amapá au Brésil et le Suriname, a permis du 31 octobre au 2 novembre une rencontre majeure à Paramaribo. Pendant trois jours, des acteurs politiques et environnementaux des trois territoires ont visité des infrastructures hydrauliques, comme le barrage de Brokopondo, et ont participé à des conférences, des débats et des discussions stratégiques. Cette rencontre a marqué une avancée avec la création d’un observatoire régional des bassins versants transfrontaliers du plateau des Guyanes, une initiative visant à promouvoir le partage d’informations et d’expériences dans les domaines de l’eau et de la biodiversité aquatique.

Un outil stratégique pour la résilience écologique

Jean-Paul Ferreira a souligné que cet observatoire représente une étape décisive vers une gestion commune des cours d’eau entre les trois pays, permettant : « C’est un renforcement des moyens mis en œuvre pour que la gestion commune des milieux aquatiques soit intelligente avec plusieurs partenaires et surtout de trouver des solutions ensemble sur les milieux de vie de population au regard des conséquences des aléas climatiques transposables d’un pays à l’autre ».

Riad Nurmohamed, ministre des Travaux publics du Suriname, s’est félicité de la convergence des territoires et de la politique nationale surinamaise, axée sur le changement climatique, la gestion de l’eau et la réduction de la pollution. L’importance de cette coopération transfrontalière a également été rappelée par le président surinamais Santokhi, qui revenait tout juste de la COP16 sur la diversité biologique en Colombie. Il a insisté sur des solutions qui pourraient s’appuyer sur des modèles éprouvés dans la région amazonienne via l’ACTO (Organisation du Traité de Coopération Amazonienne).

Parmi les actions concrètes qui seront mises en place dans les prochaines semaines et mois avenir l’installation d’une unité de mesure de turbidité, financée par Bio-plateaux, sur l’embouchure de l’Atapaoni affluent du Maroni. « La turbidité de l’eau est un marqueur important pour le suivi des exploitations aurifères. L’idée est d’aller sur le terrain et d’installer la station de données ensemble et d’avoir des données qui soit retransmises aux experts Surinamais et Guyanais », explique Luken Delinthe, coordinateur local en Guyane du projet BIO-PLATEAUX pour l’Office international de l’eau.

Sensibilisation et consultation des populations Autochtones

Les représentants des peuples autochtones, dont Sônia Jeanjacque, secrétaire des peuples autochtones de l’Amapá (SEPI), ont profité de cette rencontre pour rappeler l’impact direct de la pollution de l’eau et des changements climatiques sur leurs communautés. Même son de cloche du côté des autorités coutumières de Guyane. « L’activités aurifères menées sur la rive surinamaise du mercure alors que chez nous l’activité légale l’interdit. Elles polluent le fleuve et impactent les populations qui vivent de la chasse et de la pêche », rappelle Bruno Apouyou, du Grand conseil coutumier.

Le Grand conseil coutumier de Guyane a insisté sur la nécessité pour les autorités de consulter les instances coutumières avant d’autoriser certaines activités, notamment minières, sur le fleuve Maroni. Cependant, Sylvio Van Der Pijl, le président du Grand conseil coutumier reconnaît que le processus est complexe, en raison des différences législatives, des enjeux économiques de chaque pays et de leur souveraineté : « Il y a matière à provoquer des discussions directement avec les autorités surinamaises sur leur réglementation très différentes. On tentera malgré même si on connaît certains freins ». Riad Nurmohamed, ministre des Travaux publics du Suriname, interpellé sur ce sujet par notre rédaction ne s’est pas montré fermé à en discuter.

Une gestion de l’eau qui ne peut se faire sans législations ni formations

La réunion a permis d'aborder la lenteur des processus législatifs en matière de gestion de l’eau et de protection des écosystèmes aquatiques, comme l’a indiqué Gonda Asadang. La secrétaire permanente du département de l’approvisionnement en eau du ministère des Ressources naturelles du Suriname assure que des avancées sont réalisées pour établir un plan commun de gestion de l’eau : « Sans législation, on ne peut pas proposer une gestion de l’eau satisfaisante. On a des propositions de loi en cours et il y a des avancées. La prochaine réglementation et l’observatoire permettront d'aller vers l’élaboration d’un plan de gestion de l’eau au Suriname ».

Du côté brésilien, Mirna Pinheiro Caniso, responsable de l’unité de conservation au Secrétariat d’État de l’environnement de l’Amapa, a souligné l’importance de la formation des agents environnementaux pour renforcer la coopération entre les trois territoires : « Il est important que les universités forment des agents compétents pour la gestion de l’eau et plus généralement pour la gestion de la biodiversité amazonienne. Les universités des trois pays doivent mener davantage de travaux communs ».

Lire aussi : Coopération régionale en Guyane  autour de la gestion de l 'eau : visite du barrage de Brokopondo dans le cadre de la conférence Bio Plateaux

Le défi pour ces trois territoires sera donc de concilier développement économique et préservation de la biodiversité, en intégrant les savoirs locaux et en sensibilisant les populations à l’importance d’une gestion durable de l’eau. A terme, il s’agirait de créer un organisme de gestion commune pour la prise de décision, sur les modalités d’actions et leur financement à l’instar de ce qui se fait sur lac Titicaca ou dans les bassins versant du Danube.

Radio Péyi