PORTRAIT. La productrice et présentatrice "Ayden "continue de tisser des liens entre l’Europe, les Caraïbes et l’Afrique

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PORTRAIT. La productrice et présentatrice "Ayden "continue de tisser des liens entre l’Europe, les Caraïbes et l’Afrique

Productrice de télévision, présentatrice, styliste, entrepreneure, ambassadrice de la mode et des cultures… Depuis plus de vingt ans, la journaliste Nadine Ramin, plus connue sous le nom d’Ayden, incarne l’excellence afro-caribéenne sur les scènes médiatiques et artistiques internationales. Originaire de Guadeloupe et de Martinique, celle qui a bâti sa carrière en tissant des passerelles entre les Caraïbes, l’Afrique et l’Europe s’apprête à vivre une rentrée 2025 particulièrement intense. Entre nouveaux projets de création et rendez-vous culturels incontournables, Ayden poursuit la mission qu’elle s’est fixée depuis 2005 : mettre en lumière les talents africains, caribéens et d’ailleurs.

Son pseudonyme, elle le doit à une ancienne vie, déjà placée sous le signe des arts et de la culture. « J’étais choriste pour pas mal d’artistes. On m’avait alors demandé de trouver un nom de scène. J’ai choisi l’anagramme de mon prénom Nadine… Ayden est resté. » Depuis, que de chemin parcouru. ‘En vingt ans, Ayden est devenue la présentatrice de référence des grands événements culturels, de mode et de prestige en Europe, en Afrique et aux Antilles françaises’, peut-on d’ailleurs lire sur le dossier de présentation qui lui est consacré. Preuve en est, s’il le fallait, son planning des prochains jours, digne d’un véritable marathon culturel. « Cette année, tout s’accélère. J’ai l’impression que les événements s’enchaînent à une vitesse folle », confie-t-elle avec un sourire mêlé d’excitation et de gravité. Dès septembre, la présentatrice retrouvera une collaboration qui lui tient à cœur avec Air Caraïbes : un défilé en plein vol, expérience atypique où la mode s’élève littéralement dans les airs. Ce même mois, elle animera le FIMO, grand festival de mode afro-caribéenne, organisé cette année à l’Orangerie Roland-Garros. « C’est un événement unique qui permet, à chaque édition, de faire dialoguer les créateurs du continent africain avec ceux des Antilles et de l’Europe. Être au centre de ce carrefour me rappelle pourquoi je fais ce métier. »

À l’automne, les rendez-vous s’enchaîneront avec un gala littéraire caribéen, les Afro Excellence Awards dans le cadre du Mondial Coiffure Beauté à Lyon, sans oublier la célébration de la 12ᵉ édition du Madras Day en novembre. Autant de scènes où Ayden endossera le rôle d’animatrice, mais aussi d’ambassadrice culturelle. « Le Madras raconte notre histoire, il porte la mémoire de nos ancêtres.Aujourd’hui, il disparaît peu à peu des ateliers et des usages. Le porter, c’est déjà un acte de résistance. C’est dire haut et fort que notre patrimoine est vivant, qu’il mérite d’être réhabilité, valorisé, réinventé. »

Pour la jeune femme originaire de Guadeloupe et de Martinique, c’est depuis toujours à travers la mode, le tissu et les vêtements qu’elle a choisi de porter ses messages. « Bien sûr, la mode est politique. Selon ce que vous portez, on ne va pas vous considérer de la même manière. Donc pour moi, il est très important de connaître l’histoire, la symbolique des tissus que l’on porte, et d’avoir conscience que les formes de vêtements choisis vont nous positionner d’une certaine manière également. »

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Une carrière reconnue et primée

En vingt-cinq ans de médias et dix ans de mode, Ayden s’est imposée comme une figure de référence, tant auprès du public que des professionnels. Son émission Planète Mode, qu’elle a produite pendant près d’une décennie, reste l’un de ses plus grands accomplissements. « Planète Mode a été un tournant. Elle a permis de mettre en avant les créateurs d’Afrique et de la Caraïbe, les mannequins, les professionnels du secteur, et surtout de montrer une Afrique différente : une Afrique glamour, inventive, pleine d’énergie », raconte-t-elle avec fierté. Cette démarche a d’ailleurs largement été saluée par le monde professionnel. L’émission a reçu le Prix de l’Excellence à Cotonou, tandis qu’Ayden a été couronnée Meilleure animatrice de mode aux Trophées de la Mode Africaine à Dakar. « Ce n’est pas seulement une reconnaissance personnelle, c’est aussi la validation d’un combat collectif : celui de donner une visibilité à nos talents et de propulser leurs carrières. » Chaque événement a été en effet l’occasion pour la présentatrice de mettre en avant des créateurs ou des stylistes. « Pendant des années, dans Planète Mode, je tenais absolument à porter les créations de jeunes stylistes. Je les citais. C’était ma façon de leur offrir une vitrine », raconte-t-elle. « Très souvent encore aujourd’hui, les designers me sollicitent pour que je présente leurs pièces lors d’un gala ou d’une émission. Si cela correspond à ce que je recherche, c’est pour moi un honneur de les accompagner. »

En retraçant le parcours de la journaliste, on pourrait croire que tout s’est fait très simplement. Et pourtant. « Il y a eu beaucoup de sacrifices, des obstacles, des trahisons aussi. J’ai dû faire preuve de ténacité et de persévérance pour avancer. Être productrice indépendante, sans soutien officiel, c’est un défi permanent. Mais quand je regarde en arrière et que je vois le chemin parcouru, je sais que ça valait la peine. »

Un papillon à la conquête du monde

Si Ayden a construit une carrière hors normes, c’est d’abord parce qu’elle a suivi un instinct puissant : celui de la curiosité. « Je viens de l’île papillon, la Guadeloupe. Alors je me définis souvent comme un papillon à la conquête du monde. J’ai quitté la Guadeloupe très tôt, à 17 ans, juste après le bac. Mes parents n’étaient pas d’accord, mais j’avais soif de découvrir le grand monde. Nos îles sont magnifiques, mais elles restent à taille réduite. Moi, je voulais voir plus grand. »

À Paris, la réalité la rattrape. Après son bac+5, la jeune diplômée se heurte à un mur. « J’ai voulu intégrer les grands médias classiques. J’envoyais des candidatures, mais je recevais des refus polis. » C’est finalement à TéléSud qu’elle obtient sa première chance. Pas de salaire au départ, mais une expérience de terrain inestimable. « Je n’ai peut-être pas été rémunérée au début, mais j’ai tout appris : le journalisme de terrain, le montage, la présentation. Et surtout, j’ai eu l’occasion de couvrir de grands événements panafricains. Très vite, on m’a demandé de prendre le micro, d’animer sur scène. C’est comme ça que tout a commencé. » De fil en aiguille, les sollicitations se multiplient : des shows de mode à Paris, des festivals en Afrique, des événements à Londres. « À chaque fois, je me laissais guider par cette curiosité culturelle. J’étais fascinée par la manière dont la mode et les arts pouvaient raconter l’histoire des peuples autrement. C’est ce qui m’a poussée à rester dans ce métier. Je n’ai jamais regretté ce choix. »

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D’autres rêves à concrétiser

Aujourd’hui, et depuis maintenant dix ans, Ayden s’est également affirmée comme créatrice en lançant sa propre marque : Glam Ethnic. Son ambition : concilier modernité et héritage culturel. « Ma marque est contemporaine et consciente. Contemporaine, parce que les pièces sont pensées pour être portables au quotidien : une jupe crayon, une chemise, une combinaison… Consciente, parce qu’elles portent des tissus chargés de mémoire. »

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Après vingt-cinq ans de médias et plus de dix ans consacrés à la mode, Ayden pourrait se reposer sur ses lauriers. Et pourtant, elle l’affirme sans détour : « Mes objectifs sont atteints aux deux tiers. J’ai pu vivre du métier que je voulais, j’ai rencontré des personnes incroyables, j’ai parcouru le monde… mais il me reste encore un rêve à accomplir. »

Ce rêve, c’est celui d’une grande émission de société sur une chaîne nationale française. «Ce qui me passionne, ce sont les débats de société, les échanges vrais, profonds, empathiques… Je rêve d’animer une émission qui permettrait de parler de famille, de couple, d’amitié, de toutes ces questions qui nous concernent. » Elle cite d’ailleurs volontiers ses modèles : « J’admire Oprah Winfrey. Elle sait amener les gens à se livrer, à toucher des sujets intimes tout en les élevant. En France, j’aime beaucoup Faustine Bollaert, qui réussit à créer ce climat de confiance sur le plateau. »

Pour Ayden, ce désir, plus qu’un rêve à accomplir, relève de l’engagement. « Nous avons besoin de voix caribéennes et africaines dans l’espace public. Pas seulement pour parler de musique, de mode ou de culture, mais aussi de sujets de société. Nous avons une vision à apporter. »