Patrick Cazaban, Directeur Régional Outre-mer TotalEnergies : Les énergies renouvelables, la clé de l’indépendance énergétique des Outre-mer

Patrick Cazaban / Ferme photovoltaïque aux abords de l'aéroport de Pierrefonds, au sud de La Réunion ©DR

Patrick Cazaban, Directeur Régional Outre-mer TotalEnergies : Les énergies renouvelables, la clé de l’indépendance énergétique des Outre-mer

En 2021, Total devenait TotalEnergies. Au-delà du changement de nom symbolique de la transformation de l’entreprise en compagnie multi-énergies actrice de la transition énergétique, cette dynamique s’est aussi traduite par un ancrage territorial renforcé en France. C’est le rôle de la direction France, avec ses 13 directeurs régionaux, présents sur tout le territoire métropolitain et ultramarin. Parmi eux, Patrick Cazaban, directeur Outre-mer, qui a pour mission de renforcer le dialogue de TotalEnergies avec les différents acteurs dans les Outre-mer. Il a accordé un entretien à Outremers360.

Outremers360 : Pourquoi TotalEnergies a-t-il décidé de nommer il y a quelques mois un directeur Outre-mer ?

Patrick Cazaban : Dans notre organisation, chaque territoire est rattaché à sa zone géographique. La Guadeloupe, la Martinique et la Guyane sont rattachées à la zone Amérique. La Réunion et Mayotte sont rattachées à l'Afrique. La Nouvelle-Calédonie et La Polynésie française sont rattachées à l'Asie. Mais ce sont avant tout des territoires français. Il y avait donc un besoin d’ancrage avec l’Hexagone, tout en prêtant attention aux spécificités de chaque territoire. L’idée, c’est aussi d’avoir une certaine uniformité dans nos actions et de pouvoir faire le lien entre énergie carbonée et énergie décarbonée… Sur chaque territoire, nous avons des activités marketing, de vente de produits hydrocarbures, mais nous avons aussi des activités renouvelables avec principalement du photovoltaïque et de l’éolien.

Outremers360 : Quel est votre rôle exactement ?

Patrick Cazaban : Notre mission principale est de dialoguer, communiquer, échanger avec l’ensemble des parties prenantes locales publiques et privées sur la transition énergétique. Nous avons l’ambition d’atteindre la neutralité carbone en 2050, ensemble avec la société, nous voulons être un acteur majeur de la transition mais nous ne pouvons pas y aller seuls. Pour cela, nous avons besoin que l'État légifère, afin que nous puissions simplifier et accélérer le développement des énergies renouvelables. Mais nous avons également besoin des conseils régionaux, des élus locaux parce que ce sont eux qui ont le plan d'aménagement de leur propre territoire, ainsi que de l’adhésion des populations, avec un vrai défi d’acceptabilité à relever.  

Outremers360 : Quels sont les grands axes stratégiques pour les Outre-mer ? 

Patrick Cazaban : Nous allons intensifier et accélérer le développement des activités renouvelables de TotalEnergies dans les territoires ultramarins. Cette stratégie s’inscrit sur le long terme, au plus proche des acteurs locaux, en intégrant l’ensemble des parties prenantes et des spécificités territoriales. La transition énergétique est déjà en route, nous avons des outils fonctionnels, l’éolien et le photovoltaïque notamment qui nous permettent de produire de l’énergie décarbonée abordable. Dans les territoires d'Outre-mer, c'est encore plus vrai.

Ferme photovoltaïque de Tiéa en Nouvelle-Calédonie (DR)

Nous allons également favoriser le développement de l'électromobilité, en augmentant notre nombre de points de charge pour répondre à la forte croissance des ventes de voitures électriques dans certains territoires d’Outre-mer. En Guadeloupe et en Martinique, par exemple, nous allons installer des super-chargeurs pour recharges rapide dans 48 stations-service, d’ici 2024. Nous avons une quinzaine de bornes à La Réunion que nous allons remplacer également par des super-chargeurs. Nous souhaitons devenir un acteur clé de l’électromobilité en Outre-mer, en tenant compte des spécificités de chaque territoire, bien évidemment. 

Outremers360 : Et en termes d'investissements ? 

Patrick Cazaban : Nous allons investir massivement dans l’éolien et le solaire au cours des prochaines années, avec un objectif : faire partie d’ici 2030 du top 5 mondial des producteurs d’énergies renouvelables. À Mayotte, nous en sommes à la phase d'études pour le photovoltaïque. À La Réunion, nous augmentons la capacité des éoliennes tout en réduisant leur nombre. Nous avons également des projets éoliens en Guadeloupe et plutôt photovoltaïques en Martinique, et nous nous préparons à répondre à des appels à projets en Polynésie française. 

Parc éolien à La Réunion (DR)

En Guyane, nous développons le projet Maya, un projet ambitieux de centrale solaire à puissance garantie, grâce à un système de stockage. La centrale produira 24h/24 et 7j/7, permettra d’alimenter environ 60 000 Guyanais en électricité verte, et va créer plus de 40 emplois. En Nouvelle-Calédonie, nous accompagnons le consortium minier Prony Resources New Caledonia dans leur volonté de décarbonation, avec un projet solaire de 160 MWÀ terme, en remplaçant l’électricité produite à partir de charbon par de l’énergie solaire, ce projet permettra d’éviter chaque année l’émission de près de 230 000 tonnes de CO2.  

Outremers360 : Quelles sont les difficultés rencontrées sur le terrain ? 

Patrick Cazaban : Les tensions sur le foncier, la topographie et les spécificités de chaque territoire font que nous pouvons développer des énergies nouvelles plus ou moins facilement, plus ou moins vite… En Polynésie Française par exemple, la problématique d’accès au foncier est particulièrement difficile. Cela ne nous empêche pas de développer des solutions, mais c'est moins facile qu'en Guyane, par exemple, où l'on peut envisager des projets de centrales photovoltaïques de plus grande taille pour produire de l'électricité décarbonée. 

Outremers360 : Concernant la hausse des prix dans les territoires d’Outre-mer, il y a cette réduction de 20 centimes que vous avez mis en place depuis quelques mois, mais qui n’est pas appliquée partout... 

Patrick Cazaban : Nous l’avons fait dans tous les territoires où il nous a été possible de le faire. Effectivement, sur certains territoires, des prises de position tenues par la profession ne nous ont pas permis d'aller jusqu'au bout de la démarche, mais cette baisse a bien été appliquée jusqu’au 31 décembre 2022 à Mayotte, en Nouvelle-Calédonie et en Polynésie. Pour le reste, dans les Outre-mer les prix sont encadrés par les préfectures. Même si on enregistre une hausse dans beaucoup de secteurs, ici, le bouclier tarifaire fonctionne. 

Propos recueillis par Abby Said Adinani

Vous pouvez retrouver Patrick Cazaban à l'événement « Les Outre-mer aux avant-postes », conférence organisée le 2 février par le Point en partenariat avec Outremers360 sur la séquence « Renouvelables en plein boom et dépendance aux énergies fossiles : vers l’autonomie énergétique des Outre-mer ? ».

Informations et inscriptions ici