PORTRAIT. La Polynésienne Oriane Sarrouy en mission au plus près de l’innovation à San Francisco

©  DR

PORTRAIT. La Polynésienne Oriane Sarrouy en mission au plus près de l’innovation à San Francisco

Originaire de Tahiti, Oriane Sarrouy est aujourd’hui en poste chez Business France, à San Francisco, où elle accompagne les entreprises françaises désireuses de s’implanter sur les marchés nord-américains. Ses domaines de prédilection : l’énergie, l’environnement, ou encore les cleantech. C’est donc tout naturellement qu’elle a cherché, il y a quelques années, à s’installer au cœur de la Bay Area, l’un des épicentres mondiaux de l’innovation durable. Depuis, la jeune femme de 27 ans s’emploie à créer des ponts entre la France et l’Amérique du Nord en connectant notamment les savoir-faire industriels aux nouvelles urgences écologiques. Lauréate du Prix V.I.E Outre-mer – bassin Polynésie en juin dernier, Oriane Sarrouy milite pour une meilleure visibilité des opportunités qui peuvent s’offrir aux ultramarins dans des écosystèmes globaux.

Dès l’obtention de son diplôme à l’ESSEC Business School en 2023, Oriane Sarrouy en a la conviction : son avenir professionnel se fera ailleurs, dans un écosystème international, à la croisée des enjeux économiques et environnementaux. C’est sur San Francisco que se porte son choix, tant pour des raisons stratégiques que personnelles. « J’étais proche de mon territoire d’origine. Il n’y avait que deux heures de décalage », explique la Polynésienne en introduction. « Au début, j’étais juste venue pour prendre la température, découvrir l’écosystème… mais j’ai vite compris que je voulais rester, et qu’il fallait que je trouve un travail ici, coûte que coûte. » Problème : elle n’a aucun contact sur place. C’est sur LinkedIn que la jeune femme commence ses recherches. À la recherche de Polynésiens installés localement, elle finit par étendre ses démarches aux anciens élèves de ses écoles, puis aux Français de la région, avant de se tourner vers les Américains actifs dans les cleantech ou l’environnement. « J’ai envoyé des dizaines et des dizaines de messages. Parfois, ça aboutissait à un simple échange en visio, parfois à un café. Je recevais surtout des silences. Mais à chaque fois que quelqu’un répondait, c’était une victoire. » La persévérance d’Oriane Sarrouy finit par payer. Elle rencontre celle qui deviendra sa future collègue. Cette dernière l’informe qu’un poste va prochainement s’ouvrir chez Business France. La jeune consultante prend les devants, contacte directement le manager, et se positionne avant même la publication de l’offre. Quelques semaines plus tard, elle est recrutée. « Ce poste, je l’ai décroché sans passer par les voies classiques. Je n’ai jamais vu passer l’annonce. Ce que je veux dire aux jeunes, c’est qu’il faut oser. Il faut sortir de sa zone de confort, provoquer les choses, parce que vraiment, rien n’arrive comme ça. » Depuis bientôt 2 ans, la Bay Area de San Francisco est son terrain d’exploration. « Je travaille sur des sujets liés à la durabilité. Ici, c’est le cœur mondial de l’innovation dans ces domaines. Tous les jours, je découvre des projets incroyables. »

 Se rapprocher de son territoire d’origine

Oriane Sarrouy est une enfant de la Polynésie française. Elle y est née et y a fait pratiquement toute sa scolarité, avant de partir pour l’Hexagone finaliser ses études. C’est également pour se rapprocher de sa Polynésie natale qu’elle a choisi, il y a 2 ans, San Francisco. « C’était une façon de rester connectée avec Tahiti. Mais au-delà de ça, je sentais qu’il y avait ici des choses à faire pour les Outre-mer, des passerelles à construire, des liens à retisser avec des écosystèmes qui nous ignorent encore trop. J’ai envie que les talents ultramarins soient visibles, écoutés, et intégrés dans ces dynamiques mondiales. » En intégrant Business France à San Francisco, la jeune femme s’est également donnée pour mission de rendre plus visibles certains dispositifs. En juin dernier, Oriane Sarrouy parvient à intégrer deux entreprises ultramarines à la délégation française, dont une issue de Polynésie. « J’avais moi-même contacté les chambres de commerce ultramarines pour leur présenter le projet, leur montrer les opportunités que pouvait représenter un événement comme celui-là. » Pour elle, ces initiatives sont essentielles, car les entreprises ultramarines sont encore trop peu présentes dans les grands rendez-vous internationaux. Cette invisibilité, elle l’a ressentie dès son arrivée à San Francisco, en cherchant à entrer en contact avec des profils ultramarins. « Je pensais qu’il y en avait très peu ici, mais en réalité, il y en a davantage qu’on ne le pense. Le problème, c’est qu’ils sont peu visibles, peu valorisés. » Derrière son engagement, il y a cette conviction : les Outre-mer ont leur place dans les écosystèmes mondiaux, à condition de mieux communiquer et de mieux se connecter. « On a grandi dans des territoires insulaires, avec une proximité forte à notre environnement. On a cette sensibilité-là. On a les compétences, on a les idées. Ce qui manque souvent, c’est l’accès à l’information. Il faut qu’on sache que c’est possible. »

© DR

Travailler, transmettre, faire circuler

Depuis son poste chez Business France, Oriane Sarrouy accompagne les entreprises françaises désireuses de se développer en Amérique du Nord. Elle les oriente sur les stratégies d’implantation, réalise des études de marché, organise des missions B2B dans les secteurs de l’énergie, de l’environnement et des cleantech. « Mon travail, c’est d’identifier les bonnes opportunités, les bons interlocuteurs, de comprendre les barrières à l’entrée, et de créer du lien. » Au sein de son équipe, les objectifs sont clairs : générer des projets concrets et durables.  En parallèle, elle continue à défendre une vision plus inclusive du rayonnement économique français, en impliquant autant que possible les Outre-mer dans les grands rendez-vous internationaux. « On commence à avoir de très belles initiatives côté Polynésie, notamment sur l’entrepreneuriat. Ce serait formidable que des entreprises locales puissent à leur tour embaucher des V.I.E. C’est tout un cycle qu’il faut enclencher. »

Dans six mois, son contrat en VIA (Volontariat International en Administration) prendra fin. Mais Oriane Sarrouy ne compte pas repartir. Elle souhaite rester dans le secteur de San Francisco pour continuer à travailler sur la transition écologique, peut-être en rejoignant une startup. Malgré de grands projets à venir, la jeune femme demeure disponible pour partager son expérience et rencontrer d’autres ultramarins : « Je suis toujours partante pour échanger. Que ce soit avec des jeunes qui se posent des questions, ou des entrepreneurs des Outre-mer. Ce que j’ai appris, c’est que quand on demande, on reçoit. »

Abby Said Adinani