Le tribunal foncier de Papeete a annulé les effets d'un acte de notoriété acquisitive sur les îles Actéon, dans l'archipel des Tuamotu, dans l'océan Pacifique, dont l'Eglise catholique revendiquait la propriété, a-t-on appris de sources concordantes samedi.
Les îles Actéon sont un ensemble de sept atolls appartenant depuis les années 1950 à deux SCI détenues par des Paumotu (habitants des Tuamotu) des îles voisines, mais dont le Camica -personne juridique représentant l'Église catholique en Polynésie française- revendiquait la propriété par usucapion (ou prescription acquisitive), un mécanisme juridique permettant de devenir propriétaire d'un bien après 30 ans d'occupation continue et paisible.
Pendant trois décennies en effet, le Père Joël Aumeran a organisé des campagnes de nettoyage, de plantations et d'exploitation des cocoteraies qui profitaient aux Paumotu ou à d'anciens détenus. Il poursuivait ainsi le travail initié par un autre prêtre avant lui. Une démarche sociale dans ces atolls inhabités en dehors de ces missions.
En 2019, le Camica avait donc fait dresser un acte de notoriété acquisitive par un notaire de Papeete pour obtenir la propriété des atolls. Mais le tribunal foncier l'a jugé entaché de "multiples irrégularités" et déclaré "de nul effet". Cette démarche de l'Eglise avait indigné les Paumotu qui s'estimaient propriétaires légitimes. "Honte à l'Eglise de s'être comportée ainsi, c'est très bas d'avoir agi comme ça. Ils se sont accaparé les sept îles, dont trois étaient exploitées, mais par les Paumotu, pas par l'Eglise", a déclaré à l'AFP Astrid Brander-Hoffmann, descendante d'un coprahculteur qui a travaillé plusieurs années sur ces atolls.
Les deux SCI, auxquelles la Polynésie avait cédé les îles Actéon, ont été dissoutes mais non liquidées et les derniers copropriétaires sont décédés en 2024. Un liquidateur judiciaire va donc répartir les parts de SCI dissoutes entre les descendants de leurs propriétaires.
La Polynésie française, qui contestait elle aussi, comme les ayants droit des SCI, l'acte de notoriété acquisitive, n'a pas non plus eu gain de cause. "Le volet pénal suit son cours puisque l'acte de notoriété n'a pas a été annulé, mais déclaré de nul effet, donc il appartient au Camica d'apporter des preuves complémentaires et l'affaire n'est pas terminée", a précisé Arcus Usang, avocat du Père Joël Aumeran.
L'archevêché de Papeete n'a pas souhaité commenter cette affaire.
Les îles Acteon ont la particularité d'abriter un oiseau endémique en danger d'extinction, la gallicolombe érythoptère, dont la population totale est estimée à 200 individus par l'association ornithologique Manu.
Avec AFP