Polynésie : Devant l’Assemblée territoriale, le président Édouard Fritch détaille ses mesures contre l’inflation et la vie chère

©Présidence de la Polynésie française

Polynésie : Devant l’Assemblée territoriale, le président Édouard Fritch détaille ses mesures contre l’inflation et la vie chère

Évitant les débats politiques du moment, le président de la Polynésie Édouard Fritch s’est employé, à la tribune de l’Assemblée ce jeudi, à détailler l’action gouvernementale. Celle du passé, avec un bilan détaillé et globalement satisfait, de la mandature. Et celle du futur avec une série d’annonces de nouveaux dispositifs destinés à préserver le pouvoir d’achat en ces temps d’inflation. À sept mois des territoriales, « c’est Noël avant l’heure », ironise l’opposition. Reportage de notre partenaire Radio 1 Tahiti.

Édouard Fritch, ce matin, avait laissé à Gaston Tong Sang le discours incisif, à l’égard des transfuges et des démissionnaires. Le président du Pays a préféré se cantonner à la politique de fond et a commencé par défendre le bilan d’une mandature dont s’ouvre la dernière session parlementaire. Covid, tourisme, inflation, transition énergétique ou PSG…

Le chef de file du parti autonomiste Tapura Huira’atira a insisté sur le contexte difficile de ces quatre dernières années, dans lequel « notre majorité n’a pas à rougir de ses actions et de son bilan ». « Diriger notre pirogue par ces temps perturbés relève davantage du sacerdoce que d’une balade paisible sur le lagon », a-t-il insisté, reconnaissant tout de même des maladresses « dans notre façon d’agir » et surtout dans la façon de communiquer. Des regrets vite nuancés : « sauf à faire montre de malhonnêteté intellectuelle, nul ne peut nier l’engagement de mon gouvernement pour servir notre pays pendant ces temps troublés ».

Pour preuve de l’efficacité de son action, Édouard Fritch liste les réformes menées, compare le taux d’inflation à celui de l’étranger, met en avant les commentaires des agences de notation sur la situation financière du pays, et surtout insiste sur les recettes fiscales qui témoignent d’une reprise économique plus forte qu’espérée. Mais ce discours d’ouverture a surtout été l’occasion de détailler de nouvelles mesures contre la vie chère, principal sujet de frustration des Polynésiens depuis la fin de la période Covid. Et elles sont nombreuses.

Prime pouvoir d’achat, panier gelé et augmentations des aides

Certaines avaient déjà été annoncées de longue date, comme la baisse des cotisations maladie d’ici le mois d’octobre, qui devait être liée à la mise en place de la TVA sociale et dans laquelle le président voit aussi l’occasion de « baisser le coût du travail » en Polynésie. Ou l’exonération de charges sociales pour une « prime pouvoir d’achat » distribuable par les entreprises à leurs salariés, qui avait été demandée par le Medef et bien accueillie par le ministre des Finances Yvonnick Raffin.

Édouard Fritch y ajoute la défiscalisation et l’exonération de charges sur les primes de départ à la retraite et d’intéressement. La revalorisation du moni ru’au (allocation complémentaire de retraite, ndlr) et des allocations familiales, qui reste à chiffrer, avait aussi déjà été évoquée, de même que l’aide alimentaire exceptionnelle de l’État, destinée aux plus modestes, mais dont les modalités d’attribution ne sont pas précisées.

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Mais l’arsenal « vie chère » de cette fin de mandat va au-delà des mesures déjà annoncées. Le gouvernement devrait rapidement proposer un texte instituant un « panier bloqué » composé de produits de base dont les prix seront gelés. L’exécutif, qui avait annoncé une hausse du prix de l’électricité pour septembre, mais avait choisi de temporiser, a aussi négocié, avec EDT un chèque énergie, « destiné exclusivement aux plus démunis » et qui sera financé par le Pays autant que par la filiale d’Engie.

Comme évoqué au mois d’août, la hausse des tarifs, toujours pas chiffrée, ne devrait pas toucher les « petits consommateurs » et devrait être « lissée » sur trois ans pour les autres catégories. Édouard Fritch a aussi annoncé l’extension des dispositifs de défiscalisation locale à l’habitat intermédiaire « en faveur des jeunes ménages, primo accédant, dont le salaire est inférieur à 4 SMIG », une mesure demandée depuis longtemps par les professionnels de l’immobilier pour aider à résorber la congestion du marché.

Aéroport : « il faut avancer »

Édouard Fritch a aussi évoqué certains dossiers économiques. Le tourisme bien sûr, avec l’annonce d’une uniformisation du taux de TVA à 5% pour les pensions de famille. Le fret maritime, sur lequel le Pays aurait obtenu des limitations d’augmentation des prix. Ou encore le dossier de la concession de l’aéroport, attribué à Vinci Airports. Le regard est tourné vers Stéphane Chin Loy, le président de la CCISM avec une demande claire : abandonnez les recours pour que l’on puisse avancer. « Le développement de notre pays ne mérite pas d’être obstrué par des procédures juridiques sans fin », insiste-t-il.

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En fin de discours, le président s’est écarté de sa ligne technique pour une question beaucoup plus politique : celle des « propos stigmatisant », voire « haineux » proférés à l’encontre de « telle ou telle catégorie de la population ». « On commence par les désigner puis les accuser des différents maux de notre société », explique le chef de file du Tapura Huira’atira. « Je dois vous l'avouer, ça me fait peur, car ça nous renvoie à des heures sombres de l’histoire, à de la démagogie et à un populisme qui n’a, à mon sens, pas sa place dans ce Pays ».

« C’est Noël avant l’heure »

Un discours qui, sans surprise, a beaucoup fait réagir dans les rangs l’opposition. À 7 mois des territoriales « c’est Noël avant l’heure » ironise-t-on à la fois tant du côté des indépendantistes du Tavini Huira’atira que du groupe A Here ia Porinetia de l’ancienne députée Nicole Sanquer. Tony Géros, président du groupe indépendantiste à Tarahoi, s’étonne en outre du satisfecit du chef du gouvernement. Les bons chiffres financiers seraient seulement dus à l’alourdissement de la fiscalité – avec la TVA sociale notamment – et ce discours serait le témoin, selon lui, du « déni », par le leader rouge et blanc, des problèmes de sa majorité et de ceux du Pays.

Charlie René pour Radio 1 Tahiti