Interrogé par le député calédonien Emmanuel Tjibaou (GDR, indépendantiste), le ministre des Outre-mer a appelé les élus de l’archipel à « sortir de toutes les positions radicales », rappelant que les accords de Matignon et de Nouméa « sont le socle » des discussions ouvertes ce mardi à Paris avec les partenaires politiques.
Alors que les bilatérales ont débuté au Ministère des Outre-mer, dans un huis clos scrupuleusement mis en place par l’ancien Premier ministre, celui-ci a été interpellé à l’Assemblée nationale, lors des traditionnelles QAG, par le député indépendantiste Emmanuel Tjibaou, lui-même membre de la délégation du FLNKS.
« L'Accord de Nouméa (…) inscrit au cœur de la Constitution française demeure aujourd'hui la matrice politique qui régit la Nouvelle-Calédonie » a rappelé le député. Un accord qui « marque l'exception démocratique française, un acte de courage politique auquel l'État s'est tenu avec constance malgré les nombreux défis ». « Nous interpellons l'État sur la nécessité de poursuivre dans cette voie » a insisté le député Tjibaou.
« Nous entendons les analyses de nos partenaires loyalistes. Après 40 ans d'histoire politique commune, nous ne sommes pas prêts à revenir en arrière. Nous redoutons que la vision proposée par certains qui prennent un fédéralisme interne, exacerbe et finissent par institutionnaliser une fracture territoriale et ethnique » a prévenu le député, « si nous acceptons une telle trajectoire, l'État contribuerait à créer un apartheid ».
« Nous sommes face à un moment décisif, historique » a répondu l’ancien Premier ministre qui avait, en son temps, réuni plusieurs comités des signataires de l’Accord de Nouméa, avant de passer le flambeau du dossier calédonien à Édouard Philippe. Celui qui avait été membre des cabinets de Michel Rocard et Lionel Jospin a « le sentiment d'un terrible retour en arrière ». « On parle de racisme, de guerre civile de nouveau » tandis qu’« économiquement, les dégâts liés aux violences et destructions de mai 2024 sont considérables ».
« Seul le dialogue permettra de reconstruire un projet commun et partagé » a martelé le ministre qui insiste ce qu’il avait déjà énoncé lors de ses vœux la semaine dernière : « Les accords de Matignon et de Nouméa, avec la perspective du processus de décolonisation sont (…) le socle de nos discussions. Elles sont mon ADN ».
« Nous ne devons rien oublier de Michel Rocard et de Lionel Jospin, de Jacques Lafleur et de Jean-Marie Tjibaou » a poursuivi le ministre. « Comme eux, il nous faudra être inventifs, ambitieux, courageux pour sortir, pour bâtir un compromis et sortir des positions radicales, de toutes les positions radicales, monsieur le député, et proposer un projet commun pour la Nouvelle-Calédonie, pour sa jeunesse, pour la concorde et pour la paix ».
Jusqu’à cette fin de semaine, Manuel Valls recevra six délégations calédoniennes, indépendantistes et non indépendantistes, et réunira samedi les acteurs économiques de l’archipel. Paris espère toujours réunir l’ensemble des partenaires politiques calédoniens, à l’issue de ces bilatérales, autour de la même table. L’autre possibilité, plus plausible, serait de poursuivre les discussions à la Nouméa courant février.