Nouvelle-Calédonie : En cas d’indépendance, plus de 9 000 personnes pourraient vivre en Polynésie

Nouvelle-Calédonie : En cas d’indépendance, plus de 9 000 personnes pourraient vivre en Polynésie

L’Assemblée de la Polynésie française a présenté ce matin les premières conclusions d’une mission d’information sur les conséquences pour la Polynésie d’un éventuel « oui » à l’indépendance à l’occasion du 3ème référendum en Nouvelle-Calédonie. Plus de 9 000 personnes pourraient souhaiter venir ou revenir en Polynésie, et le Pays doit être en mesure d’en prévoir l’impact. Les détails de notre partenaire Radio 1 Tahiti. 

En 2018, alors que les Calédoniens s’apprêtaient à répondre au premier référendum d’autodétermination, une mission d’information de l’assemblée de la Polynésie française, « préoccupée par l’avenir des ressortissants polynésiens installés sur le Caillou », avait été mise sur pied « pour quantifier la proportion de cette population susceptible de revenir prématurément au fenua, et définir les éventuelles mesures à mettre en place pour répondre à leurs attentes en Polynésie française ». Les Polynésiens représentent environ 5 300 personnes, soit 2% de la population en Calédonie, établies principalement dans la région du Grand Nouméa.

Suite au deuxième référendum organisé en octobre dernier, dont les résultats avaient été encore plus serrés (53,26% non, 46,74% oui), les membres de la mission, menée par Philip Schyle, ont souhaité poursuivre leurs travaux, en procédant en mars et avril à plusieurs auditions de représentants d’institutions politiques, économiques et religieuses, et commandant un sondage sur place. Le rapport complet de l’assemblée doit être rendu avant fin juillet, mais ce jeudi matin Philip Schyle, entouré du président de l’assemblée Gaston Tong Sang et du sénateur Teva Rohfritsch, ont présenté ce sondage réalisé par Quidnovi, qui montre que le ressenti des Polynésiens sur place s’est aggravé depuis 2018, dit-il.  

Cette fois, le travail de la mission a été élargi, et porte non seulement sur la communauté polynésienne sur le Caillou mais aussi, plus généralement, sur les personnes susceptibles de déménager en Polynésie, en cas d’accession à l’indépendance de la Nouvelle-Calédonie. « C’est un sondage qui repose sur du déclaratif et du ressenti », explique Philip Schyle. Un ressenti qui « s’est aggravé depuis 2018 parce que la situation référendaire, politique et socio-économique a tellement évolué », poussant les tenants de ces travaux à les « tourner vers les autres populations ».

Plus de 9 700 personnes attirées par la Polynésie

« Les résultats de l’étude ont ainsi mis en lumière le déplacement éventuel en Polynésie française en cas d’indépendance de 216 ménages ayant de la famille au fenua (soit 780 personnes) et de 3 000 ménages n’y ayant pas d’attache (soit 9 000 personnes), ce dernier volume dépendant toutefois du climat régnant en Nouvelle-Calédonie », sur un total de plus de 60 000 personnes susceptibles de quitter la Nouvelle-Calédonie dans les trois ans suivant une éventuelle accession à l’indépendance et/ou une dégradation du climat social. 

Mais les Polynésiens installés en Nouvelle-Calédonie de longue date ne souhaitent pas tous, loin de là, quitter leur terre d’adoption. Parmi les autres, plus d’un quart sont attirés par l’Australie ou la Nouvelle-Zélande. Et Polynésiens ou autres, c’est l’Hexagone qui arrive en tête des destinations envisagées par ceux qui quitteraient le Caillou.

Les critères qui pourraient décider d’un déménagement en Polynésie sont l’emploi, le cadre de vie, et le rapprochement familial. Sur les plus de 9 000 personnes (ventilées sur 3 ans) qui considèrent la Polynésie comme une destination possible, seul un tiers est réellement susceptible de passer à l’acte, estime l’institut de sondage qui rappelle que ce nombre comprend des enfants et des retraités.  « Il ne faut pas tomber dans le catastrophisme, on ne va pas être envahi », dit Philip Schyle. Mais la période post-covid qui s’annonce complique la perspective : « Il n’empêche que pour un pays dont la population est quasiment identique à celle de la Nouvelle-Calédonie, même un millier, 2 000, 3 000 personnes (…) c’est beaucoup ».

Le président du Pays et son gouvernement ont été informés des résultats de ce sondage, « et la réaction a été une réaction de surprise, personne ne s’attendait à ces chiffres-là. Les Polynésiens installés récemment en Nouvelle-Calédonie, et notamment depuis le début des années 2000, oui. Mais en revanche, les autres populations, on était loin d’imaginer qu’on arriverait à un tel volume ». « Il ne s’agit nullement de notre part de nous immiscer dans le débat qu’il y a là-bas, il est déjà assez compliqué », a conclu Philip Schyle pour qui « gouverner, c’est prévoir ».

Caroline Perdrix pour Radio 1 Tahiti