Accord de Bougival : bouleversements électoraux et nouveaux équilibres politiques en perspective

© Congrès de Nouvelle-Calédonie

Accord de Bougival : bouleversements électoraux et nouveaux équilibres politiques en perspective

S'il est adopté par les Calédoniens en février 2026, le compromis politique signé entre indépendantistes et non-indépendantistes le samedi 12 juillet entraînera l'ouverture partielle et progressive du corps électoral pour les prochains scrutins locaux. Il devrait aussi provoquer une recomposition des rapports de forces au sein du Congrès. Explications avec notre partenaire Les Nouvelles Calédoniennes.


Consultation sur l'accord et élections provinciales : qui pourra voter ?

L'épineuse question du corps électoral, dont le projet d'ouverture par l'Etat avait mis le feu aux poudres en mai 2024, a forcément été au cœur des négociations entre les formations politiques calédoniennes, lors des dix jours passés à Bougival. Ces dernières sont parvenues à un compromis, en définissant un corps électoral distinct en fonction des scrutins.

-Pour la consultation sur l'accord

C'est un des grands principes de l'accord signé samedi à Bougival : le compromis sera soumis au vote de la population en février 2026. Reste une question : quels seront les critères pour pouvoir participer à cette consultation ? "Le corps électoral appelé à se prononcer sur l'accord sera le corps électoral spécial pour la consultation (LESC)", indique le document. Elle comprend tous ceux qui ont pu voter lors des trois référendums d'autodétermination. Elle sera complétée par tous les natifs qui ont atteint (ou atteindront) la majorité entre la date du dernier référendum et la consultation sur l'accord.

-Pour les provinciales de 2026

Ce sera différent pour les prochaines élections provinciales. Une loi organique doit être votée d'ici la fin de l'année pour reporter le scrutin, initialement fixé à novembre 2025, à mai-juin 2026. Pourront y prendre part les personnes inscrites sur la liste électorale spéciale pour la consultation (LESC) ou sur la liste électorale spéciale à l'élection du Congrès et des assemblées de provinciales (LESP). L'accord prévoit également que puissent y participer tous les natifs, soit environ 12 000 personnes supplémentaires, ainsi que ceux résidant en Nouvelle-Calédonie depuis au moins quinze ans de manière continue.

Pour les provinciales suivantes

Le texte mentionne également les élections suivantes. Si l'accord est accepté, seules les personnes de nationalité calédonienne seront autorisées à voter à partir des provinciales de 2031. Cette nouvelle nationalité consacrée par le document sera ouverte aux natifs, à ceux inscrits sur les deux listes électorales spéciales ainsi qu'à toute personne qui réside depuis plus de dix ans en Nouvelle-Calédonie. Un délai réduit à cinq ans pour ceux mariés, depuis plus de cinq ans, à une personne disposant déjà de la nationalité calédonienne.

Le nouveau visage du Congrès

C'était une revendication de longue date des non-indépendantistes : que la province Sud, la plus peuplée, soit davantage représentée au sein du Congrès, alors qu'un mécanisme permettait, jusqu'ici, de renforcer artificiellement le poids des provinces Nord et Îles dans l'hémicycle. Les délégations politiques se sont mises d'accord sur ce point : à compter des prochaines élections provinciales - et si l'accord est validé par la population - le Congrès sera composé de 56 membres (contre 54 aujourd'hui), dont 37 issus de la province Sud (contre 32 aujourd'hui), 14 de la province Nord (contre 15 actuellement) et 5 de la province des Îles (contre 7 actuellement).

Dans l'état actuel des forces politiques, cela pourrait offrir, boulevard Vauban, une majorité solide aux non-indépendantistes, qui dominent la province Sud. Le scrutin étant proportionnel, tout dépendra toutefois des résultats de chaque camp aux prochaines élections. Si les indépendantistes parviennent à faire une percée en province Sud, cette majorité pourrait être plus relative. En 2019, la liste du FLNKS avait remporté 6 des 32 sièges de la province Sud au Congrès.

Transfert des compétences : vers de nouvelles consultations populaires ?

Il est un autre domaine pour lequel l'accord de Bougival prévoit un retour aux urnes des Calédoniens : le transfert des compétences régaliennes (défense, monnaie, sécurité et ordre public, justice et contrôle de légalité). En effet, le document prévoit que si le Congrès adopte, à la majorité qualifiée de 36 membres sur 56, une résolution demandant un tel transfert, "un comité de travail sera mis en place entre l'État et une délégation spéciale du Congrès de la Nouvelle-Calédonie afin d'étudier les modalités et les implications financières, juridiques et techniques de ce transfert" et un "projet conjoint de l'État et du Congrès de la Nouvelle-Calédonie pourra être soumis à l'approbation des Calédoniens par voie de consultation". Seront admis à y participer les électeurs disposant de la nationalité calédonienne.

Par Les Nouvelles Calédoniennes