« Le lien entre la Nouvelle-Calédonie et la France doit être puissant », assure Manuel Valls

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« Le lien entre la Nouvelle-Calédonie et la France doit être puissant », assure Manuel Valls

Deux jours après son arrivée en Nouvelle-Calédonie, le ministre des Outre-mer a accordé un entretien à Nouvelle-Calédonie La 1ère. Entretien dans lequel il revient sur ses enjeux : poursuivre les discussions et engager les négociations sur l’avenir institutionnel de l’archipel , et dérouler les aides économiques de l’État à commencer, ce dimanche, par la prolongation du chômage partiel.

« En accord avec le gouvernement de la Nouvelle-Calédonie, j'annonce la prolongation du chômage partiel jusqu'au 30 juin », a dit le responsable politique lors de cet entretien accordé à Nouvelle-Calédonie la 1ère. Ce dispositif devait s'achever au 31 mars. « Il est clair que l'arrêt du dispositif aurait des conséquences sociales et économiques particulièrement difficiles », a commenté Manuel Valls.

Les ressources « apportées par l'État, notamment à travers les prêts, doivent permettre d'aller jusqu'au 30 juin : je crois que c'est une mesure importante qui permet de rassurer beaucoup de Calédoniens, notamment ceux qui ont perdu un emploi », a-t-il ajouté, interrogé au Centre culturel Jean-Marie Tjibaou. Les émeutes de 2024, déclenchées le 13 mai par le projet de dégel du corps électoral calédonien contesté par les indépendantistes, ont fait 14 morts, plus de deux milliards d'euros de dégâts et détruit environ 20% du PIB local.

Le dégel du corps électoral « fera partie d’un accord général »

Pour les loyalistes, le corps électoral aux élections provinciales, gelé depuis 2007, doit impérativement intégrer les arrivants plus récents. Un casus belli s’il ne s’accompagne pas d’un accord politique global, pour les indépendantistes. Depuis mai, le processus politique est à l'arrêt et les deux camps ne se parlent plus. S’il considère qu’un « compromis » sur le dégel du corps électoral est « indispensable », ce dégel « fera partie d’un accord général » a-t-il assuré.

Par ailleurs, le ministre des Outre-mer s'est montré souple sur la date butoir du 31 mars fixée dans le cadre de la reprise des discussions sur l'avenir institutionnel de l’archipel. « Je n'ai pas de date butoir. Nous prendrons le temps nécessaire, mais le temps presse aussi. Parce que s'il n'y a pas d'accord avant le 31 mars, sans principe, il peut peser un risque sur les provinciales ».

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La date du 31 mars a été décidée en lien avec les prochaines élections provinciales, cruciales car la composition des assemblées des trois provinces, du Congrès et du gouvernement local découle d'elles. Prévues fin novembre, les provinciales ont déjà été reportées deux fois, d’abord faute d’accord politique, puis en raison des émeutes.

Manuel Valls a mis en garde contre un échec des discussions : « S'il n'y a pas d'accord politique, s'il n'y a pas une perspective claire, il n'y aura pas les investissements économiques ». « Et puis les braises de la violence sont toujours là. Il pourrait y avoir à ce moment-là de nouveau des affrontements, une forme de guerre civile », a encore redouté l'ancien Premier ministre.

« Respecter » le « peuple Kanak » et « ceux qui sont là depuis déjà très longtemps »

Le ministre des Outre-mer, ancien Premier ministre qui a déjà eu entre ses mains le dossier calédonien, a entamé sa visite samedi dans un contexte tendu, invectivé par des militants et une partie des responsables politiques loyalistes à l’issue d’une cérémonie d’hommage au gendarme Nicolas Molinari, tué par balle en mai dernier.

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« Mon rôle, c’est de bâtir un chemin politique, en mettant tous les acteurs devant leurs responsabilités » a rappelé le ministre des Outre-mer, appelant à « ne pas revenir sur des notions qui sont essentielles », comme celle de peuple premier ou peuple autochtone, source d’un vif échange avec le député loyaliste Nicolas Metzdorf. « Faisons attention aux mots qui déclenchent très vite des conflits » a insisté Manuel Valls. « J’ai vu des dirigeants indépendantistes expliquer que le sacrifice, la mort, étaient peut-être nécessaires pour accéder à l’indépendance, ce n’est pas possible ça non plus ».

« Il faut respecter une histoire millénaire, une culture, celle du peuple kanak, comme il faut, évidemment, accepter et respecter ceux qui sont là depuis déjà très longtemps, ces Européens qui sont arrivés, ces enfants, petits-enfants, arrière-petits-enfants de ceux qui sont arrivés à la fin du XIXème siècle » a déclaré le ministre. « Essayons de dépasser cela et de regarder vers l'avenir ».

L’Azerbaïdjan « joue contre les intérêts stratégiques de notre pays »

Manuel Valls a aussi « mis en garde les responsables politiques et les élus », notamment indépendantistes, « à ne pas jouer avec une puissance très proche de la Russie », l’Azerbaïdjan, « qui joue contre les intérêts stratégiques de notre pays ». « La Russie nous mène une guerre hybride en permanence, et l’Azerbaïdjan s’y associe ». « Et puis quel projet d’expliquer aux Calédoniens que l’Iran, la Chine ou l’Azerbaïdjan seraient des modèles » s’est-il interrogé.

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 « Le lien entre la Nouvelle-Calédonie et la France doit être puissant », a répété Manuel Valls, évoquant une nouvelle fois « la souveraineté avec la France ». Il plaide aussi pour « l’unité » de l’archipel comme « principe », tout en laissant la porte ouverte à « plus de différenciation, de décentralisation, de compétences nouvelles » pour les provinces et les communes.

Le ministre des Outre-mer rappelle avoir reçu « sa feuille de route » du Premier ministre François Bayrou, assurant que le président de la République, « garant des institutions », « sait qu’il faut avancer ». « Ceux qui pensent qu’on pourrait faire appel derrière au chef de l’État par rapport à ce que je suis en train de faire : non. C’est moi qui suis chargé de ce dossier ».

Mardi, le ministre doit réunir les groupes politiques calédoniens au Congrès de l’archipel pour « fixer la méthode » et les « axes » des discussions qui s’ouvriront le lendemain, mercredi. Ces discussions se poursuivront en bilatérales, comme ce fut le cas à Paris, mais le ministre espère toujours réunir l’ensemble des partenaires politiques calédoniens autour de la même table.

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Outremers360 avec AFP