Joe Biden, qui veut affirmer la présence américaine face à la Chine dans le Pacifique, a annoncé lundi qu'il reconnaissait officiellement comme « États souverains et indépendants » deux territoires du Pacifique, les îles Cook et Niue.
Le président américain, qui reçoit à la Maison Blanche de nombreux dirigeants océaniens à l’occasion du 2ème sommet entre les États-Unis et le Forum des îles du Pacifique, a rappelé dans un communiqué que les îles Cook avaient « une longue histoire de coopération » avec les États-Unis, et estimé que Niue, ce petit territoire aussi appelé « le rocher de Polynésie », jouait « un rôle important et constructif » dans le Pacifique, en particulier en matière de lutte contre le changement climatique.
Niue, minuscule État autonome, peuplé de seulement 1 700 habitants et en libre association avec la Nouvelle-Zélande, vient de lancer une initiative originale afin de protéger son écosystème : offrir de parrainer, pour 140 euros, la protection d'un km2 du Pacifique. Concernant les îles Cook, également en accord de libre-association avec la Nouvelle-Zélande, Joe Biden a rappelé dans son communiqué que les États-Unis y avaient construit des pistes d'aéroport.
La reconnaissance officielle de cet archipel de quelque 17 000 habitants doit, selon la Maison Blanche, permettre en particulier de mieux lutter contre la pêche illégale, et aussi contre le changement climatique, deux préoccupations communes à de nombreux États insulaires du Pacifique. Pour la seconde, les États-Unis devraient mobiliser 20 millions de dollars.
Ambassades, aides financières, coopération militaire
Le président américain organise lundi et mardi le deuxième « Sommet des États-Unis et du Forum des îles du Pacifique », quasiment un an jour pour jour après la première édition, qui avait aussi eu lieu à Washington. Un rendez-vous diplomatique initié en 2022 en présence également les dirigeants calédoniens et polynésiens, les indépendantistes Louis Mapou et Moetai Brotherson.
L'exécutif américain doit annoncer à l’occasion de ce sommet, selon de hauts responsables, une empreinte diplomatique plus forte, des projets d'infrastructure, et une coopération maritime renforcée. D’après le président de la Polynésie française, « cela va du doublement des quotas d’étudiants de notre région dans les universités américaines, à la mise en place de fonds spécifiques pour augmenter la résilience de nos économies, en passant par des partenariats approfondis avec la NOAA Headquarters pour anticiper les événements climatiques graves ».
Les Américains déroulent également des aides en matière d’infrastructures, notamment dans le domaine des câbles sous-marins de communications, pour un montant chiffré à 40 millions de dollars. L’administration Biden compte enfin proposer aux îles du Pacifique de rejoindre le Quad, ce forum de coopération de défense qui réunit les États-Unis, l’Australie, l’Inde et le Japon, en matière de surveillance maritime, notamment pour traquer les navires se livrant à la pêche illégale.
« Il est évident que la Chine joue un certain rôle dans tout cela, il est évident que ses ambitions et son influence dans cette région sont une raison pour nous de poursuivre notre offensive stratégique », a déclaré une haute responsable de la Maison Blanche, qui a requis l'anonymat, lors d'un entretien avec la presse. Washington devrait aussi annoncer de nouvelles ambassades, vraisemblablement au Vanuatu, après celles des Îles Salomon et des Tonga.
La Chine a aussi patiemment tissé sa toile dans la région ces dernières années. C’est le cas, notamment, aux îles Fidji (où s’est rendu le président chinois, Xi Jinping, en 2018), au Vanuatu, aux îles Samoa ou encore aux îles Salomon, qui ont intégré les « nouvelles routes de la soie ». Grâce à ce programme d’investissements internationaux « derrière lequel il n’y a aucun agenda géopolitique », selon la formule consacrée chère aux dirigeants chinois, Pékin a construit différentes infrastructures, comme celles qui abriteront les Jeux du Pacifique, prévus en 2023 aux îles Salomon.
D’ailleurs, l’influence chinoise se manifeste dans l’absence ce lundi et mardi du Premier ministre des îles Salomon, désormais étroitement alliées à Pékin. Manasseh Sogavare, après avoir participé à New York à l’assemblée générale de l’Onu, n’a pas souhaité prolonger son séjour américain. « Nous sommes déçus » de cette absence, a reconnu un autre haut responsable de la Maison Blanche.
Renouvellement des accords de libre-association avec les îles Marshall
Les Américains mènent également des discussions compliquées pour renouveler, avant la date limite du 30 septembre, leur accord de libre association avec les Îles Marshall. Cet accord, comme Washington l’a également conclu avec la Micronésie et l’archipel des Palaos, autres territoires anciennement sous administration américaine, permet aux États-Unis d’y avoir une présence militaire.
En échange, ils apportent une aide économique et des garanties de sécurité. Les habitants de ces îles sont libres de résider et de travailler aux États-Unis. Les Îles Marshall exigent que Washington tienne compte, dans tout nouveau partenariat, des effets de ses campagnes massives d’essais nucléaires dans les années 1940 et 1950. L’administration Biden espère annoncer des « progrès très significatifs » dans ces négociations, selon le haut responsable déjà cité. Pour le sommet lui-même, l’exécutif américain a préparé un programme riche, qui débutera sur une note sportive.
En amont du sommet, les dirigeants invités aux États-Unis ont été transportés dimanche en train vers la ville portuaire de Baltimore, sur la côte atlantique, où ils étaient les invités d’honneur d’un match de l’équipe locale de football américain, les Ravens. Ont suivi lundi des rencontres et un déjeuner avec Joe Biden, puis, jusqu’à mardi, plusieurs entretiens avec des ministres du climat et de l’économie, ainsi que des interviews au Congrès.
Outremers360 avec AFP.