En Nouvelle-Calédonie, meurtrie par les émeutes, Manuel Valls réussit une reprise du dialogue

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En Nouvelle-Calédonie, meurtrie par les émeutes, Manuel Valls réussit une reprise du dialogue

Au terme d'une visite d'une semaine, Manuel Valls a quitté samedi la Nouvelle-Calédonie avec la satisfaction d'avoir réuni l'ensemble des forces politiques autour de la table. Le ministre des Outre-mer reviendra courant mars pour la suite de discussions sur le statut du territoire, meurtri par les émeutes de 2024. 

« Les blocages politiques, le marasme économique et social, la peur, l’absence de perspectives créent une situation qui n’est plus tenable », a expliqué à la presse l'ancien Premier ministre avant de regagner l’Hexagone. « Chacun est responsable devant l’histoire et devant les Calédoniens. Une seule voie s’ouvre à nous, celle d’un accord politique, suivant un chemin de réconciliation. Sans ce chemin, aucune reconstruction de la Nouvelle-Calédonie ne sera possible », a souligné le ministre des Outre-mer. 

Manuel Valls reviendra ainsi fin mars dans l'archipel pour « poursuivre le dialogue », sans toutefois fixer de date butoir pour parvenir à un accord et ce, malgré le calendrier. Les élections provinciales doivent avoir lieu au plus tard au 30 novembre. « Avant il faut un processus institutionnel et constitutionnel », a-t-il précisé sur Nouvelle-Calédonie La 1ère. Manuel Valls ne veut toutefois pas « précipiter les choses », tout en assurant qu’il reviendrait avec « des propositions parce qu’il faut avancer le débat ».

Arrivé sous les huées

Arrivé le 22 février sous les huées des partisans de la Calédonie française, qui lui reprochaient d’avoir parlé de « souveraineté partagée » à propos du futur statut du territoire, Manuel Valls a réussi en une semaine à réunir autour d'une même table indépendantistes et non-indépendantistes, dix mois après les violences de mai et juin 2024, qui ont fait 14 morts et détruit l’économie de l’archipel.

« La méthode est bonne », s’est réjoui auprès de l’AFP le député (Renaissance) Nicolas Metzdorf, qui avait pourtant eu une altercation avec le ministre au premier jour de son séjour. L’élu, qui contestait l’existence d’un « peuple premier », s’était fait publiquement taxé de « révisionnisme » par le ministre des Outre-mer.

Manuel Valls, familier de la question calédonienne depuis ses passages à Matignon comme conseiller de Michel Rocard (1988-1991) puis de Lionel Jospin (1997-2002), a « passé énormément de temps à écouter les uns les autres, en cadrant les débats, tout en laissant des espaces d’expression libre », salue l'élu non indépendantiste.

« On a apprécié. On a pu avoir des échanges sereins, constructifs », confirme, côté indépendantiste, le député Emmanuel Tjibaou. La « méthode Valls » a consisté en des réunions plénières sur des thématiques précises (lien avec la France, gouvernance, droit à l’autodétermination), entrecoupées de réunions bilatérales avec les différentes formations politiques.

« Étape importante »

Le ministre des Outre-mer avait également défini des principes préalables auxquels l’État n’entend pas déroger : le lien avec Paris devra être maintenu et la Nouvelle-Calédonie devra rester « une et indivisible ».

Ni indépendance pure donc, ni fédéralisme trop poussé, qui verraient les trois provinces, collectivités qui concentrent aujourd’hui la plupart des compétences, vivre un « développement différencié », comme souhaité par exemple par la présidente de la province Sud, Sonia Backès.

Le ministre des Outre-mer a remis aux deux camps un document de synthèse de cette semaine de travail. « Il s’agit des orientations du gouvernement, elles ne valent pas accord, elles n’engagent pas les partenaires, mais nous avons franchi une étape importante. L’'État peut aider, peut faciliter. Mais ce sont les Calédoniens qui ont leur destin en main », souligne-t-il.

Les différentes formations indépendantistes ont réuni samedi leurs militants pour évoquer la suite à donner aux discussions. La décision de les poursuivre en vue de signer un accord, qui permettrait notamment la tenue des élections provinciales, prévues fin novembre, sera examinée mardi par le bureau politique du Front de libération national socialiste (FLNKS).

Les discussions sur l’avenir de la Nouvelle-Calédonie étaient au point mort depuis le référendum d’autodétermination de 2021 que l’État avait décidé de maintenir malgré la demande de report formulée par les indépendantistes, alors que l’archipel était touché par l’épidémie de Covid. Les indépendantistes avaient alors décidé de boycotter le scrutin, qui avait vu le « non » à l’indépendance l’emporter à 97%, mais avec un taux de participation de seulement 43,87%.

Depuis lors, toutes les tentatives d’organiser des discussions sur un nouveau statut institutionnel en réunissant indépendantistes et non-indépendantistes autour d’une même table se sont soldées par un échec.

Avec AFP