Biodiversité :  Le Comité local de l’Ifrecor Polynésie officiellement installé, a décliné sa stratégie et son plan d'actions

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Biodiversité :  Le Comité local de l’Ifrecor Polynésie officiellement installé, a décliné sa stratégie et son plan d'actions

Le Comité local de l’Ifrecor Polynésie a été officiellement installé le mardi 4 juin 2024 à la Présidence de la Polynésie française, sous la présidence conjointe du Président Moetai Brotherson, et de Xavier Marotel, secrétaire général du Haut-commissariat, représentant le Haut-commissaire de la République en Polynésie française, Éric Spitz.

 

Les écosystèmes coralliens ont un rôle central dans la survie, la sécurité alimentaire et le bien-être de la population polynésienne. Ils fournissent une source de nourriture et des ressources vitales aux communautés locales, protègent les côtes des événements climatiques extrêmes, absorbent 90% de l’énergie des vagues en agissant comme des brise-lames naturels, et sont intimement liés à la culture et l'identité des Polynésiens.

Le Comité local polynésien de l'initiative française pour les récifs coralliens (Ifrecor), déclinaison nationale de l'Initiative internationale pour les récifs coralliens (ICRI), fédère aujourd’hui une soixantaine d’acteurs locaux (État, Pays, communes, public, privé, enseignement supérieur et recherche, associations et ONG), tous mobilisés pour préserver ce patrimoine naturel vital pour les générations futures. Cette nouvelle structure a pour objectif d'agir en faveur de la préservation des récifs coralliens de Polynésie française, porter les enjeux auprès des instances locales et régionales, et sensibiliser les générations futures, les communautés locales, les pêcheurs, les opérateurs de tourisme, les clubs de plongée, les hôtels, les pensions de famille, à l’importance cruciale de la santé des récifs et des lagons pour l’avenir durable du Fenua.

Lire ici : Environnement : En Polynésie, l’Ifrecor publie son plan d’actions pour la protection, la restauration et la gestion durable des récifs coralliens

Une vingtaine d’acteurs des 6 collèges transversaux composant le Comité local étaient présents pour cette installation officielle et la validation de la stratégie et du plan d’actions 2024-2028 de l’Ifrecor Polynésie pour la protection, la restauration et la gestion durables des récifs coralliens et écosystèmes associés de Polynésie française.  Cette stratégie « constitue la feuille de route de la Polynésie française pour mettre en œuvre les actions concrètes indispensables à la résilience des récifs coralliens polynésiens. Elle se structure autour de 7 grands axes stratégiques, regroupant 24 activités prioritaires déclinées en 53 actions à mettre en œuvre sur les 5 prochaines années».  L'Ifrecor défend ainsi « une vision commune ambitieuse, un objectif partagé entre l’État et le Pays, qui sera placé au cœur de la contribution de la Polynésie à l’Année des océans et la préparation de la Conférence des Nations Unies sur l’Océan de Nice en juin 2025.»

Pour rappel, le développement socio-économique du territoire, basé principalement sur le tourisme, la pêche et la perliculture, est également étroitement lié à la santé globale de ses récifs coralliens. En Polynésie française, l’étude réalisée sur la valeur économique des écosystèmes coralliens de Polynésie française estime que les écosystèmes coralliens contribuent chaque année à hauteur de 462 millions d’euros (55 milliards de FCFP) à l’économie locale. Plus de 21 000 emplois dépendent de leur bonne santé.

 Interviews des coprésidents du Comité local de l’Ifrecor Polynésie à l’issue de son installation

  • Moetai Brotherson, Président de la Polynésie française : « Prendre conscience de notre impact sur les récifs »

Que pensez-vous de cette stratégie de l’Ifrecor Polynésie ?

« L’avantage de cette stratégie est qu’elle a été co-construite sur une approche « bottom-up » et non pas « top-down ». Ce ne sont donc pas trois personnes dans un bureau qui ont décidé de sa construction et de sa structuration, c’est parti d’une large consultation de plus de 60 acteurs, associatifs, scientifiques, économiques, privés, publics. Cette approche va faciliter sa mise en œuvre. Les actions ne sont pas imposées à ces acteurs, ce sont eux-mêmes qui les ont définies. J’aime beaucoup le projet des Trophées, pour inciter des personnes, des associations ou des structures à présenter des projets. Je pense que ça va être un succès. »

Comment expliquer aux gens que la situation est grave, mais qu’il n’est pas trop tard pour agir ?

« Il est important de trouver des synergies avec l’éducation parce que la sensibilisation c’est essentiellement les jeunes générations. Il faudra ensuite travailler avec les professionnels, tous ceux qui ont finalement un impact sur le récif, sans même le savoir parfois. Faire prendre conscience que certaines pratiques ne sont pas optimales ou sont néfastes. Par exemple le secteur du bâtiment, les professionnels ne réalisent pas toujours les conséquences des terrassements sur les récifs. C’est tout ça qu’il faut réussir à mettre en musique. Mais la sensibilité particulière des Polynésiens à l’environnement marin dont on est issu devrait nous aider. »

Est-ce que la protection et la gestion des récifs sont pour vous une priorité ?

« Les coraux sont un élément qu’on peut quantifier dans l’économie du Pays, leur apport a été évalué à 55 milliards. Sans coraux, pas de poissons, pas de surf, un tourisme complètement différent car les visiteurs aujourd’hui viennent voir des lagons vivants. »

 

  •  Xavier Marotel, secrétaire général du Haut- commissariat, représentant le Haut-commissaire : « Nous vivons une période charnière, il faut agir »


Que pensez-vous de ce plan d’actions 2024-2028, il est très ambitieux, est-il vraiment réalisable ?

« Oui, d’autant plus que la stratégie a été construite dans une logique ascendante. Elle est partie des acteurs de la base, qui se sont réunis ensemble depuis plusieurs mois dans un travail de co-construction. Pour la première fois depuis l’existence de l’Ifrecor, 25 ans aujourd’hui, la stratégie est construite par les Polynésiens pour les Polynésiens. Elle associe l’ensemble des associations, des chercheurs, des acteurs privés et publics, pour avoir quelque chose de sur-mesure et de très vaste avec sept axes différents, qui comprennent notamment des actions de prévention, de pédagogie, de communication et d’aide à la décision. Ce plan d’actions est réalisable et il y a urgence à le réaliser. Nous sommes dans un moment où il faut agir. »

L’urgence est là ?

« J’ai un naturel optimiste et je pense qu’il n’est jamais trop tard. On est dans une phase de changement climatique et nous allons devoir nous adapter. Il y a déjà eu des épisodes de blanchissement et on sait que les écosystèmes ont une capacité à se régénérer. Il est possible aussi de l’aider avec du travail de bouturage, de préservation… Ça prend du temps. Mais face à la nature, nous restons très petits, nous ne maîtrisons pas tout. Il ne faut pas baisser les bras non plus et continuer à avancer. Les initiatives du plan d’actions sont possibles et réalisables, elles permettent d’embarquer la population. Les récifs coralliens font partie de la vie des Polynésiens, c’est absolument nécessaire pour beaucoup de familles, tant en matière d’alimentation que d’activités économiques. Aujourd’hui, nous vivons une période charnière, il peut y avoir un basculement. C’est important d’avancer et l’État met les moyens financiers. »

L’année 2025 sera celle des océans : l’occasion de développer encore plus ce sujet des coraux ?

« Une enveloppe est allouée à l’Ifrecor pour toute l’animation, le pilotage des projets, dont 9 millions de FCFP pour venir en soutien direct des initiatives portées par les acteurs du Fenua. On peut aussi s’appuyer sur le Fonds vert qui est un outil extrêmement puissant qui nous a permis de subventionner beaucoup de projets en Polynésie notamment concernant la biodiversité. L’année 2025 sera consacrée aux océans et la conférence des Nations Unies
sur l’océan qui aura lieu en juin à Nice, sont l’occasion de fédérer des actions au niveau international. On voit bien notre positionnement au cœur du Pacifique, on ne pourra pas travailler tout seul sur ces questions. La gestion et la protection du récif, c’est à la fois notre quotidien car on est tous en permanence dans l’eau, le lagon ou à proximité et c’est à la fois mondial, car le changement climatique est une problématique globale. »
 

Propos recueillis par l’Ifrecor Polynésie