Élu le 17 février dernier avec 21 voix contre 14, le Professeur Jean-François Hoarau est devenu le nouveau président de l'Université de La Réunion. Quelques jours après son élection, Jean-François Hoarau s'est confié à Outremers 360 sur sa vision pour l'institution universitaire : il ambitionne de renforcer l'Université de La Réunion comme de «phare du savoir» et de l’innovation dans la zone indo-océanique et à l'international.
Après une période marquée par l’instabilité, l’une des priorités annoncées de la nouvelle présidence du Pr Jean-François Hoarau est de ramener «l’apaisement et la confiance» au sein de la communauté universitaire. « Si nous n'arrivons pas à ramener cet apaisement, il sera compliqué de poser un certain nombre de chantiers puisque, sans une gouvernance stable et efficace, il est difficile de concrétiser des projets en termes de formation et de recherche», a affirmé Jean-François Hoarau.
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Un retour à la stabilité pour une gouvernance participative
La transparence et l’éthique seront au cœur de cette nouvelle dynamique, notamment grâce à la mise en place d'une part, d’un collège éthique et déontologique et d’un dialogue social renforcé d'autre part. « Un vrai rapport sera produit chaque année et transmis à l'ensemble de la communauté. Il s'agit de faire la transparence sur les aspects liés aux évolutions de carrière, aux recrutements, aux concours à la constitution des différents jurys pour sortir en tout cas d'un certain nombre de dérives ou de suspicion de dérives». Le nouveau président élu souhaite également décentraliser la prise de décision pour une gouvernance plus efficace et participative, en remettant au centre « le rôle extrêmement important des composantes et des laboratoires», trop longtemps ignorées selon Jean-François Hoarau.
Trouver la stabilité financière aussi, les actions portées par l'administrateur Jacques Comby ont commencé à porter leurs fruits. « Je peux vous dire que les fonctions vitales de l'établissement ont été rétablies. Le Professeur Jacques Comby, l'administrateur provisoire, a réalisé un travail extrêmement important. Nous sommes aujourd'hui dans une situation financière qui a été très largement assainie. Ce qui est assez certain, c'est que nous ne sommes plus dans la situation très précaire d'il y a quelques mois encore. Il faut rester prudent, c'est-à-dire que les fonctions vitales ont été rétablies, mais le malade reste convalescent ».
Une université au service des étudiants
L’élément central de cette ambition reste l’étudiant. « Ils sont l'âme et le coeur battant de l'Université. Nous sommes tous là pour construire un cadre de formation, de recherche, mais aussi de conditions de vie permettant à nos étudiants de s'épanouir à la fois dans leur vie académique, personnelle et professionnelle.»
Plusieurs initiatives visent à améliorer les conditions de vie des jeunes, notamment la mise en place d’une allocation universelle pour lutter contre la précarité étudiante. L’université veut également transformer son environnement en une véritable "ville étudiante", intégrant logements, transports, alimentation, culture et sport. « Il est inadmissible qu'une partie de nos étudiantes et étudiants se retrouvent encore aujourd'hui à être obligés à aller faire des petits boulots ou à travailler dans les fast-foods pour pouvoir financer leurs études. L'idée est de permettre à nos jeunes d'avoir une certaine solidité financière pour pouvoir suivre leurs études dans de bonnes conditions. Bien sûr, l'Université ne peut faire ceci seul. C'est pour cela que nous souhaitons vraiment associer à la gouvernance l'ensemble des parties prenantes du territoire pour que nous puissions aussi faire aboutir un certain nombre de projets décisifs pour les étudiantes et les étudiantes.»
Une attention particulière sera portée à l’égalité des chances et aux conditions d’études des femmes, avec l’instauration d’un congé menstruel pour les étudiantes atteintes d’endométriose.
Un ancrage renforcé dans la région et à l’international
L’ouverture au monde est un pilier essentiel du programme porté par Jean-François Hoarau. L’université compte consolider ses collaborations avec les acteurs socio-économiques et culturels, mais aussi renforcer son réseau de recherche avec les organismes nationaux et internationaux. « On forme nos étudiants pour qu'ils puissent s'émanciper et affronter les réalités du monde, mais on forme aussi nos étudiants pour qu'ils puissent s'insérer professionnellement. Donc, on a besoin bien évidemment du monde socio-économique et culturel pour réaliser cet objectif, en termes d'emploi, mais aussi en termes de participation pour construire avec nous les formations qui seront les mieux adaptées, justement, pour préparer nos étudiantes et étudiants aux réalités d'aujourd'hui, de demain sur le plan professionnel.(...) Concernant la recherche, nous avons besoin de s'associer encore plus fortement, notamment dans le cadre d'une stratégie de site, avec les organismes nationaux de recherche. Nous avons prévu notamment de nous appuyer sur un outil non négligeable : le schéma régional de l'enseignement supérieur de la recherche et de l'innovation. Si la Région est là pour coordonner sur le plan politique, je pense que l'université doit être le chef de file sur le plan opérationnel de l'application de ce schéma, ce qui nous obligera à renforcer nos partenariats avec justement les organismes de recherche en mettant en place des contrats d'objectifs de moyens et de performance, avec les institutionnels (Région, Département, État) mais là aussi avec ces partenaires scientifiques qui sont incontournables. Nous avons besoin aujourd'hui de montrer que notre recherche est utile, s'inscrire vraiment dans les sciences de la durabilité, la science des solutions durables. On doit être capable aujourd'hui de montrer que nos activités de recherche conduisent à des actions concrètes, directement mobilisables, par notamment la société. Pour que ce soit une réussite, il faut associer des acteurs de la société au programme de recherche, nous avons prévu notamment, d'essayer de mettre en place un observatoire citoyen du développement durable pour montrer que la recherche n'est pas simplement une question de chercheur, on est capable d'associer aussi les citoyens à cette dynamique de recherche»
Le projet d’une Université de l’Océan Indien est également mis en avant, avec l’ambition de créer une plateforme collaborative en recherche et formation avec les pays de la région. « Il faut vraiment qu'on arrive à s'inscrire dans cette dynamique de coopération internationale pour construire des programmes de recherche internationaux, mais aussi, bien évidemment, avec une déclinaison en termes de formation. »
Le défi du numérique et de l’intelligence artificielle
Enfin, l’université veut anticiper les grands défis technologiques, notamment en intégrant l’intelligence artificielle dans ses formations et ses processus administratifs. Un engagement fort est pris pour accompagner ces transformations avec une approche éthique et inclusive. « On doit être une université qui innove et qui se prépare pour l'avenir. C'est aussi une université capable d'intégrer un outil qui est formidable qui - peut être détourné s'il n'est pas contrôlé mais malgré tout - peut nous offrir des opportunités à tout point de vue d'ailleurs, que ce soit sur les fonctions métiers, sur le plan administratif.sur les formations, la recherche. L'intelligence artificielle deviendra de toute façon incontournable. Donc, autant que l'on s'y prépare de manière précoce! »
Pour Jean-François Hoarau, le message adressé à la communauté universitaire est clair : il est temps de se rassembler, de dépasser les clivages et de travailler ensemble pour bâtir une université ambitieuse, innovante et tournée vers l’avenir.