Médias-Six mois après son lancement à La Réunion, un premier bilan pour le mensuel généraliste Territoire(s) Média

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Médias-Six mois après son lancement à La Réunion, un premier bilan pour le mensuel généraliste Territoire(s) Média

Dans un contexte où les usages de l’information continuent de se transformer sous l’effet des réseaux sociaux et de la consommation numérique, le mensuel Territoire(s) Média tente, à La Réunion, de proposer une autre manière d’informer. Lancé en février 2025 par Vincent Vibert, ancien directeur du Quotidien de La Réunion, ce titre indépendant parie sur le temps long, l’analyse et un traitement approfondi des grands enjeux sociaux, économiques et environnementaux à La Réunion et dans la région. Six mois après sa première parution, son fondateur dresse un premier état des lieux.

C’était il y a quelques mois déjà : on nous annonçait l’arrivée d’un nouvel acteur dans le paysage médiatique réunionnais : Territoire(s) Média. « Ce média indépendant et généraliste propose un magazine mensuel ainsi que des suppléments thématiques réguliers visant à valoriser les expertises de La Réunion et des territoires. Il s’accompagne également d’un site internet innovant (www.territoires.media), bientôt d’une application mobile, et met à disposition un répondeur ouvert 24h/24 pour permettre aux citoyens de partager idées, témoignages, coups de cœur et coups de gueule au 0262 79 01 21 », pouvait-on lire à l’occasion de la communication autour de la sortie du premier numéro, en février 2025. « À l’heure où l’information est devenue un flux ininterrompu, Territoire(s) Média choisit de prendre du recul, d’offrir un espace de réflexion et de débat. S’éloignant des logiques de l’instantanéité et du buzz, il mise sur des contenus approfondis et documentés. Loin d’être un simple relais d’actualité, Territoire(s) Média se veut un outil d’échange et de confrontation des idées, un lieu où les acteurs de La Réunion – citoyens, décideurs, entrepreneurs et experts – peuvent se rencontrer », était-il encore indiqué. Derrière ce nouveau venu, pourtant, des figures loin d’être inconnues. Le fondateur du média, Vincent Vibert, a passé 25 ans à La Réunion et dirigé plusieurs agences, notamment dans le digital, avant de prendre la direction d’une filiale du groupe La Sentinelle à Maurice, puis celle du Quotidien de La Réunion jusqu’à fin 2024. La rédaction, elle, est dirigée par Florence Labache, ancienne rédactrice en chef du même journal. « Territoire(s) Média est pensé pour rouvrir des espaces d’information et poser les débats de fond. » Le mensuel se positionne avec une ligne éditoriale généraliste, mais avec un objectif : favoriser le temps long, les analyses et les mises en perspective des grands enjeux qui traversent La Réunion et l’océan Indien. « On vit dans une époque de saturation informationnelle », poursuit Vincent Vibert. « On passe d’un sujet à l’autre sans jamais vraiment les comprendre. L’info est devenue un flux, parfois une performance. Territoire(s) mise sur des contenus pensés pour durer dans le temps, grâce à des dossiers de fond, des entretiens approfondis, des analyses thématiques, des portraits ou encore des tribunes d’experts. »

Chaque numéro est ainsi structuré autour de grands axes thématiques : société, économie, transition écologique, entrepreneuriat, innovation, ou encore coopération régionale.

 Un bilan plutôt positif

Six mois après sa première parution, Territoire(s) Média dresse un premier bilan. Si la prudence reste de mise, son fondateur, Vincent Vibert, observe un accueil encourageant, tant du côté du lectorat que du côté des partenaires économiques. « Le média a été bien accueilli, à la fois par les lecteurs et par les annonceurs. Certains nous suivent depuis le début, que ce soit des annonceurs privés ou des collectivités. »

Ce soutien, sans être massif, donne au projet une assise suffisante pour envisager la suite. « Si on est encore là aujourd’hui, c’est qu’il y a un besoin. » Le positionnement du titre, à la fois généraliste, local, et axé sur les transitions de société, semble avoir trouvé un écho, notamment auprès d’un public en recherche de contenus plus approfondis. « Le titre se fait petit à petit sa place dans le marché média de La Réunion, mais tout reste à faire », note Vincent Vibert.  Le rythme de publication permet au mensuel d’installer sa ligne éditoriale dans la durée, tout en maintenant une régularité indispensable à la visibilité. Le format papier, bien que contraint par des enjeux logistiques et économiques, reste un marqueur fort du projet. Le tirage, lui se fait à 5 000 exemplaires tous les mois.  « Ce n’est pas suffisant pour couvrir tous les i, mais c’est un socle. Ce qui compte, c’est que la demande existe, et qu’elle se manifeste. Ce serait malhonnête de dire que tout est facile mais on avance étape par étape. » Territoire(s) Média repose sur un format mixte : un magazine papier mensuel, un site web, une présence sur Facebook et LinkedIn, ainsi qu’un développement en cours sur Instagram. Des projets vidéo sont également à l’étude. « On veut aller plus loin. On veut poser les sujets, mais aussi aller à la rencontre des gens. »

Diversification et impact

Comme de nombreux médias papier aujourd’hui, le mensuel est confronté à des défis structurels liés à la distribution, à la relation avec le lectorat, et à l’évolution des pratiques des annonceurs. « Le modèle économique est assez classique », reconnaît Vincent Vibert. « Il repose sur la vente au numéro, avec toute la problématique de la distribution à La Réunion, sur les abonnements papier et digitaux, sur la publicité papier et digitale. » le secteur n’est malheureusement pas aidé. « On est confronté à de moins en moins de points de vente qui prennent la presse. Ce n’est pas qu’un problème de Territoire(s), c’est un vrai sujet pour tous les médias papier aujourd’hui à La Réunion. » Pour cette raison, et pour d’autres, Territoire(s) Média a été pensé, dès sa conception, comme bien plus qu’un simple mensuel. Le magazine s’inscrit dans une logique de diversification de ses canaux d’action, en misant sur la complémentarité entre information, diffusion et interaction avec le public. « Si on veut survivre aujourd’hui dans les médias, on ne peut pas se contenter de publier », confirme le fondateur du média. « Il faut aller à la rencontre des lecteurs, créer des ponts avec les acteurs du territoire, générer du lien, du débat. » C’est dans cet esprit qu’une activité événementielle a été mise en place dès le départ. En septembre, l’équipe coorganisera le Salon de la production locale, à Saint Paul. D’ici la fin de l’année, des événements autour de l’économie sociale et solidaire ou de l’alimentation pourraient voir le jour. « Pour nous, ce sont des prolongements naturels de notre ligne éditoriale. On parle de transition, de développement territorial, de circuits courts... C’est logique d’en faire des espaces concrets de discussion et de valorisation », explique Vincent Vibert.

Cette diversification ne s’arrête pas aux événements. En parallèle, l’équipe prépare aussi des services numériques à destination du public, notamment autour de l’emploi et de la formation. « Ce sera lancé progressivement. On veut proposer des outils utiles, adaptés au territoire, qui complètent notre rôle d’informateur », indique Vincent Vibert, sans entrer encore dans les détails. Cette logique de “média plateforme”, à la fois producteur de contenus, créateur d’événements et relais de services s’inscrit dans une stratégie et dans une volonté de renforcer la présence numérique du média, aujourd’hui concentrée sur Facebook et LinkedIn. Une réflexion est en cours pour adapter certains formats aux usages plus visuels et courts d’Instagram ou TikTok. « Ce sont des espaces qu’on ne peut plus ignorer, surtout si on veut reconnecter avec les plus jeunes. Mais il faut y aller sans trahir nos contenus. »

En ligne de mire : l’année 2026, avec de nouveaux formats, possiblement des podcasts ou de la vidéo courte, et une attention renforcée aux besoins des 18-30 ans. « Il y a une fracture informationnelle qui est en train de se creuser. Les jeunes s’informent autrement. Nous avons, en tant que média, une responsabilité de recréer du lien, mais il faut le faire à hauteur de leurs pratiques, et sans condescendance. »

Abby Said Adinani