Les défaillances des réseaux électriques, téléphoniques et informatiques après le passage samedi du cyclone Chido à Mayotte ont durement affecté l'écosystème des paiements, que les établissements bancaires sur place essayent tant bien que mal de rebrancher.
Le lendemain de la catastrophe, Cécile, employée de la collectivité de Koungou (est de l'île), raconte à l'AFP avoir regardé dans son porte-monnaie: il lui restait 24 euros, une somme dérisoire pour les besoins des jours à venir. La mère de famille de 43 ans, qui a quatre de ses enfants à Mayotte, s'est alors rendue à un distributeur automatique de billets (DAB), devant lequel se pressait une "foule de personnes". Lasse d'attendre, elle est partie, puis revenue le lendemain, mais trop tard: le DAB était vide.
Le Crédit agricole, qui compte 16 automates dans l'archipel, n'en a plus qu'un seul en état de marche, a indiqué mercredi à l'AFP Didier Estebe, le directeur général adjoint de la caisse régionale de cette banque à Mayotte, dont les 25 collaborateurs sont tous sains et sauf. Et il était en surchauffe, avec environ 100.000 euros retirés sur la journée, une somme 12 fois plus importante que d'habitude.
Outre les dégâts potentiellement subis par les appareils, le manque de connexion électrique et téléphonique les rend inutilisables, souligne M. Estebe.
Lorsque le courant revient, "le bouche à oreille fait qu'en l'espace de très peu de temps les gens se ruent pour retirer de l'argent", continue-t-il.
Reprise progressive
Se pose alors une autre question logistique complexe: réapprovisionner les DAB. Les défis à relever - manque d'essence, de personnel, sécurité à redoubler - restent nombreux pour les convoyeurs de fonds.
L’Institut d’émission des départements d’Outre-Mer (Iedom), présence de la Banque de France sur place, assure jeudi que les provisions d'espèces dont il dispose "sont suffisantes pour couvrir l’ensemble des besoins de la population". "Tout est mis en oeuvre pour rétablir un fonctionnement normal des services le plus rapidement possible", précise un communiqué cosigné par l'Iedom et les banques de l'archipel.
La Cepac, entité de la Caisse d'épargne présente à Mayotte, faisait état mercredi en fin de journée de distributeurs opérationnels et approvisionnés régulièrement par les transporteurs de fonds.
La banque, dont le personnel "va bien" et "est en sécurité", a d'ores et déjà pris des mesures pour "faire face à cette situation d'urgence": des reports systématiques des échéances de trois mois des crédits à la consommation ou immobiliers pour les particuliers, et de six mois pour les crédits moyens et longs termes contractés par les clients professionnels et entreprises.
"Prêt urgence"
La Bred, autre caisse du groupe BPCE présente sur place "de longue date", a réussi à joindre pour l'instant 16 de ses 20 employés, raconte le directeur du réseau Outre-Mer Jérôme Perrin.
La banque "se tient prête à reporter jusqu'à six mois les échéances de prêts pour les clients affectés par le cyclone" et commercialise un "prêt urgence", à taux préférentiel, "destiné à financer les besoins immédiats des entreprises".
La Banque française commerciale Océan indien (BFC), filiale de la Société Générale et de Mauritius Commercial Bank (MCB), qui exploite une trentaine de DAB dans l'archipel, a pris des nouvelles de l'ensemble de ses collaborateurs. Elle affirme être "mobilisée pour restaurer l'ensemble des services".
La reprise d’activité et le retrait d’espèces à la Banque postale (LBP), qui compte 24 DAB à Mayotte, "sont notamment conditionnés par le retour de l’électricité et du réseau", indique de son côté une porte-parole de la banque. Les difficultés d'accès aux réseaux électriques et informatiques compliquent également les paiements par carte, dépendants du bon fonctionnement des terminaux de paiement.
Les petits boitiers noirs peuvent "dans certains cas fonctionner en autonomie", sur batterie, explique M. Estebe, mais ils deviennent alors dépendants de l'espace disponible de leur mémoire interne "qui par définition est limitée". La priorité est aujourd’hui à la sécurité des populations, à l’accès aux biens et services de première nécessité dont les services de paiement", souligne de son côté jeudi la Fédération bancaire française (FBF).
Avec AFP