Gouvernance, stratégie, gestion des moyens et performance, la Cour des comptes a brossé dans un rapport publié récemment les évolutions de l'aéroport de La Réunion Roland-Garros (SA ARRG) sur les exercices 2011-2023. Le bilan est nettement positif, notamment en raison d’un trafic record en 2023 et d’une bonne santé financière, même si des efforts restent à faire dans certains domaines.
La SA (société anonyme, ndlr) ARRG est aujourd’hui le premier aéroport des Outre-mer et le onzième aéroport français concernant les trafics. La Cour des comptes constate qu’il est l’un des rares aéroports nationaux à avoir dépassé leur niveau de trafic suite à la pandémie de Covid. La plateforme « est d’ailleurs la seule de l’océan Indien à être restée ouverte pendant la crise sanitaire, répondant ainsi aux impératifs de continuité territoriale et démontrant son caractère névralgique pour la gestion des rapatriements sanitaires et du fret en période de crise ».
« L’évolution de la performance financière entre 2011 et 2023 est remarquable », se félicite le rapport. Le chiffre d’affaires a en effet augmenté de 72,6%, passant de 47,3 millions d’euros à 81,6 millions, composé des recettes aéronautiques, extra-aéronautiques et de la taxe de sûreté-sécurité. L’excédent brut d’exploitation a progressé de 103,5% passant de 14,6 millions à 29,8 millions. La capacité d’autofinancement a quant à elle crû de 167,6%, passant de 9,5 millions à 25,4 millions. Par ailleurs « l’endettement reste maîtrisé malgré un programme d’investissement ambitieux de 332 millions sur la période, qui bénéficie aussi d’aides publiques significatives ».
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En 2023, la SA ARRG a accueilli quelque 2,24 millions de passagers hors transit contre 2,08 millions en 2011, ce qui représente une croissance de 26,7%. « Pour l’Outre-mer, la situation est contrastée avec un dépassement du trafic 2019 dans les aéroports français de l’Océan indien [La Réunion Roland-Garros, Mayotte Marcel-Henry] et de Polynésie, et a contrario un trafic en retrait dans les Antilles et en Guyane » (voir graphique ci-dessus). À noter également que la plateforme de La Réunion est le premier aéroport de fret des territoires ultramarins avec un tonnage moyen annuel de 26 000 tonnes de fret marchandises embarquées ou débarquées.
En outre, le potentiel commercial des passagers a été stimulé par le chiffre d’affaires aéronautique tiré des redevances payées par les compagnies aériennes, en hausse de 42%, et surtout par les recettes extra aéronautiques en croissance de 146,1% (voir graphique ci-dessous). « Cette évolution confirme les effets positifs de la réforme de 2005 dont l’un des enjeux était de donner plus d’autonomie de gestion aux aéroports pour favoriser leur réactivité et leur efficacité économique », relève la Cour des comptes.
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« La SA ARRG s’est dotée d’une gouvernance opérationnelle structurée, unanimement saluée par ses partenaires », ajoute l’institution. Sa stratégie d'investissement est basée en autres sur la modernisation des infrastructures aéroportuaires pour accueillir de gros porteurs, l'expansion des espaces commerciaux pour augmenter les revenus non liés à l'aviation, et la construction d'une nouvelle aérogare bioclimatique pour les arrivées, afin de répondre aux besoins futurs et aux normes de sécurité.
Petits bémols toutefois, selon la Cour : une stratégie de développement de la plateforme qui gagnerait à être soutenue par des politiques territoriales plus lisibles en matière de tourisme et de mobilité ; « des risques de défaillances de ses principaux clients qui menacent sa solidité financière » (Corsair et Air Austral en particulier, engagées dans des plans de restructuration) ; une gestion perfectible en matière de contrôle interne (inventaires physiques, achats, ressources humaines) ; et un service d’assistance fret qui semble resté à l’écart du mouvement de modernisation de l’aéroport, justifiant « un chantier stratégique d’amélioration de la performance et de l’environnement de cette activité, que la direction peine à faire partager », déplore le rapport.
PM