Journée mondiale de l'Océan : De Bora Bora à Mayotte en passant par Ouvéa, une diversité de solutions pour protéger les Océans

©Titania Redon

Journée mondiale de l'Océan : De Bora Bora à Mayotte en passant par Ouvéa, une diversité de solutions pour protéger les Océans

Depuis 1992, la journée du 8 juin célèbre les océans pour sensibiliser le grand public au rôle crucial qu'ils jouent dans notre subsistance ainsi qu'aux différents moyens qui existent pour les protéger. Thème 2021 : « L’océan : vie et moyen de subsistance ». « Couvrant plus de 70% de la planète, c’est notre source de vie, soutenant la subsistance de l’humanité entière et celle de tous les autres organismes sur terre », indiquent les Nations Unies sur la page consacrée à la Journée mondiale de l'Océan.

2021-2030… nous entrons également dans la Décennie des Nations Unies pour les sciences océaniques au service du développement durable qui s’inscrit dans l’objectif 14 de l’Agenda 2030 :  « conserver et exploiter de manière durable les océans, les mers et les ressources marines aux fins du développement durable ». 

De la terre à la mer : le rôle des outre-mer dans la préservation des océans

Avec ses 11 millions de km2 de Zone Économique Exclusive (ZEE) - dont 97% relèvent des territoires d’outre-mer - le domaine maritime français est au 2ème rang mondial. La volonté de la France d’agir pour la préservation du milieu marin et le développement de l’économie bleue s’affiche dans les grands débats internationaux, avec un atout considérable : sa présence sur tous les océans de la planète.

En 2015, l’Accord de Paris (COP21) reconnaissait le rôle primordial de l’océan dans la régulation du climat et l’urgence de le préserver. Si la pollution marine - issue à 80% des activités humaines à terre - est mise en exergue, les impacts du changement climatique affectent particulièrement les territoires ultramarins. En outre, la concentration humaine sur les littoraux y est particulièrement forte : urbanisation, zones touristiques, installations portuaires… se traduisent par l’artificialisation des rivages au détriment des milieux naturels et par une exposition plus élevée aux risques naturels. 

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La qualité des eaux de baignade, indicateur de la santé de l’océan

Depuis 150 ans, les équipes de SUEZ et de ses filiales d’outre-mer innovent sans cesse pour traiter les eaux usées et les eaux pluviales. La qualité des eaux de baignade est ainsi un indicateur de la performance environnementale qui participe à l’attractivité des territoires. 

En Polynésie française, l’île de Bora Bora est dotée d’un environnement exceptionnel qui représente une ressource essentielle tant pour ses habitants que pour l’activité économique. La commune de Bora Bora et son maire, Gaston Tong Sang, se sont engagés depuis 1989 aux côtés de différents acteurs pour limiter les pressions sur les écosystèmes marins et terrestres liées notamment à l’activité touristique. Pour la 21ème année consécutive Bora Bora vient de se voir attribuer le Pavillon Bleu : 12 plages et la marina Taina ont reçu ce « label international de tourisme durable remis chaque année aux communes et aux ports de plaisance qui mettent en œuvre, de manière permanente, une politique de développement du tourisme respectueuse de l’environnement et des humains ». 

Mais il n’y a pas de hasard : le prestigieux label du Pavillon Bleu est le symbole d’une volonté environnementale exemplaire et le lagon est sous haute urveillance…

Entretien avec Gaston Tong Sang, tavana (maire, ndlr) de Bora Bora, président de l'Assemblée de la Polynésie française : 

©Commune de Bora Bora 

Bora Bora a décroché le célèbre Pavillon bleu pour la 21ème année consécutive le 20 mai dernier, en quoi est-ce important pour votre île ?

« Depuis trente ans, la commune de Bora Bora met le développement durable au cœur de sa politique liée à l’eau potable, à l’assainissement des eaux usées, à la gestion des déchets et à la transition énergétique. La protection de l’environnement exceptionnel de la « perle du Pacifique » est aussi un objectif majeur de la collectivité, pour le bien-être de ses habitants et des générations futures, mais également une condition indispensable à un développement économique touristique haut de gamme. Elle a ainsi su intégrer ses opportunités économiques à une justice sociale et à son histoire culturelle, vers un progrès écologique exemplaire.

A partir de 1999, la commune s’est engagée dans la démarche de labellisation du Pavillon Bleu comme moyen de contrôle de l’efficacité du traitement des eaux usées grâce à un suivi rigoureux de la qualité des eaux de baignade sur une vingtaine de points de baignade tout au long de l’année. Il y a bien sûr d’autres critères, comme la communication autour de l’environnement, la sensibilisation de la population, des écoles, la réalisation de nouveaux projets structurants, la prise en compte du handicap dans l’accès aux zones de baignade etc.

©SPE

Si les résultats de la qualité des eaux de baignade sont quasiment toujours « excellents », c’est également grâce à une dérogation du Pavillon Bleu international (à ma connaissance c’est le seul cas) pour un laboratoire d’analyse IDEXX sur l’île. En effet, ce laboratoire nous transmet les résultats des prélèvements en 18 heures (contre 3 à 4 jours avec un laboratoire conventionnel situé à Tahiti) ce qui nous permet d’être très réactifs en cas de suspicion de pollution bactérienne. 

« Avoir un lagon propre, c’est bien, encore faut-il qu’il soit vivant »

Comme je le dis souvent, « avoir un lagon propre, c’est bien, mais encore faut-il qu’il soit vivant ! ». C’est pour cela qu’un nouveau pas devait être franchi dans la connaissance de la santé des écosystèmes marins - réceptacle final des interactions homme-nature – et des impacts du réchauffement climatique afin de suivre précisément d’éventuels changements de trajectoire écologique et de pouvoir mener des actions en conséquence.

Le pilotage de ce projet a donc fait l’objet en 2019 d’un partenariat public/privé : CRIOBE, commune de Bora Bora, l’association environnementale Ia Vai Ma Noa Bora Bora et Polynésienne des Eaux, afin de mener une étude globale et complète de l’état environnemental actuel du lagon, c’est le projet Biodiv Bora, puis d’en suivre l’évolution, projet de monitoring BorAcoustic.

Les projets Biodiv Bora et BorAcoustic, visant à préserver la biodiversité marine locale, serviront de base de concertation pour élaborer et optimiser un plan de gestion de l'espace maritime à Bora Bora. Le projet Biodiv Bora permettra d’établir un état des lieux exhaustif du milieu lagonaire. Le projet BorAcoustic qui consiste à doter l'île de Bora Bora d'une plateforme de suivi environnemental renseignera l'ensemble des acteurs locaux (hôtels, associations, usagers etc.) sur les conditions en temps réel de l'état biologique et physico-chimique du lagon et de la pollution sonore engendrée par l’activité nautique.

« Bora Bora, première île du Pacifique à réutiliser ses eaux épurées »

Toujours dans un souci de préservation de la ressource en eau potable - la priorité étant à l’utilisation humaine - une partie des eaux épurées est réutilisée après ultrafiltration (traitement membranaire de haute technologie) pour des besoins « industriels ». La filtration sur membranes permet d’obtenir une eau d’excellente qualité dont l’essentiel est destiné à l’arrosage des espaces verts des hôtels, mais, compte tenu de sa qualité, le service a pu être étendu à d’autres besoins : la protection incendie, le nettoyage industriel, le lavage des bateaux (dont les bateaux-navettes d’Air Tahiti), des engins de chantier (lavage des camions de collecte des ordures ménagères) et la construction (fabrication des bétons). 

Station d'épuration de Povai à Bora Bora ©SPE

L’utilisation de cette technologie devrait connaitre un nouveau développement avec le projet de golf à Tevairoa, voire une réutilisation en eau potable via une filtration géologique ou par osmose basse pression.  

Une « Smart Island » pour répondre aux enjeux climatiques

Le développement et l’utilisation des techniques innovantes sont indispensables pour faire face aux enjeux liés au réchauffement climatique (sécheresse, élévation du niveau de la mer) et à notre économie insulaire et touristique. Il est nécessaire de pouvoir compter sur des sociétés qui disposent de moyens pour la recherche et l’innovation. 

Nous favorisons aussi la mise en place d’une transition énergétique vers des énergies « vertes » (énergie thermique des mers, solaire, hydrogène) afin de limiter au maximum l’utilisation d’énergie fossile. Pour ce projet, nous avons été retenus par la Communauté Européenne dans le cadre du projet IANOS (IntegrAted SolutioNs for the DecarbOnization and Smartification of Islands - H2020) où nous représenterons la France.

©SPE

La réalisation de ce programme est une suite logique à la transition durable déjà mise en place à Bora Bora et il contribuera à sa croissance économique et touristique. Ces projets étant pour la plupart pionniers dans le Pacifique, ils pourront devenir une activité touristique à part entière et être visités, ce qui permettra également de sensibiliser les touristes aux problématiques des îles.

En matière d’investissement, notre collectivité peut compter sur l’aide du Pays, de l’État et de partenaires privés. La commune de Bora Bora a aussi mis en place une tarification solidaire où la contribution des établissements hôteliers est prépondérante. Cela permet à tous les habitants de l’île d’avoir accès à des services de qualité et de protéger le capital naturel de la « perle du Pacifique » dont les 10 600 habitants accueillent chaque année plus de 100 000 touristes venus du monde entier ». 

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Dessalement : quand l’océan produit de l’eau potable

Dans le Pacifique, certaines îles de Nouvelle-Calédonie et de Polynésie française en manque de ressources hydriques mettent en place des solutions alternatives. 

Ouvéa, atoll de la mer de Corail, d’une superficie de 132 kmpour 4 300 habitants, doit dessaliniser l’eau de mer pour obtenir de l’eau potable. Les trois usines de dessalement de la Calédonienne des Eaux permettent de produire les ressources en eau potable nécessaires à la vie des Ouvéens. Comment ça marche ? L’eau de mer est pompée dans le lagon via un forage à 25 m dans le corail, elle est ensuite décantée et les particules de sables sont éliminées par hydrocyclone (dispositif qui utilise la force centrifuge pour séparer des particules plus lourdes que l’eau). 

©CDE

Pour être dessalée, l’eau sous pression traverse une membrane semi-perméable qui retient sels et particules. L’eau produite est ensuite reminéralisée pour devenir potable puis désinfectée au chlore et stockée dans une cuve. La distribution est assurée par 2 camions citernes de 15 m3 et permet d’alimenter 60 familles ainsi que l’hôtel Paradis d’Ouvéa qui est le plus grand consommateur de l’île. 

7 usines de dessalement ont été mises en service par la Calédonienne des Eaux & Aquanord en Nouvelle-Calédonie et dans plusieurs îles du Pacifique dont Fidji. 

Dessalement par osmose inverse pour Bora Bora 

A Bora Bora le dessalement se fait par osmose inverse. Grâce aux osmoseurs mis en place en 2001 sur Anau et Faanui, la commune de Bora Bora est pionnière du dessalement d’eau de mer en Polynésie française. Avec ces osmoseurs, les 10 600 habitants et 800 bungalows des 7 principaux hôtels de l’île sont alimentés en eau potable. La capacité de production des usines est de 3 000 m3/jour.

Osmoseur de Anau à Bora Bora ©SPE

Le grand défi de la pollution plastique des océans : les solutions sont à terre

La production mondiale de plastique s’élève à plus de 400 millions de tonnes par an. Une partie est actuellement recyclée mais chaque année plusieurs millions de tonnes finissent également dans les océans Pour agir à la source et déployer des solutions de toutes natures, la responsabilité est à la fois collective et individuelle : nouveaux modes de consommation,

lutte contre les dépôts sauvages, mise en place d’une économie circulaire qui passe par la collecte des déchets, la sensibilisation au tri sélectif et la mise en place de filières de recyclage et de valorisation. 

ECOPOLE de Koungou à Mayotte ©StarMayotte

Les solutions de recyclage et de valorisation des déchets - notamment plastiques -  permettent ainsi d’anticiper et de préserver le capital naturel et l’environnement. 

A Koungou, l’écopole de STAR Mayotte traite les DASRI (déchets d’activités de soins à risques infectieux) et valorise également les déchets d’emballages, de cartons, de plastique, de batteries, de piles, de canettes et de verre… Le site traite chaque année près de 48 300 tonnes de déchets, participant ainsi à la préservation du lagon mahorais. 

Construit par SUEZ à Sainte-Suzanne, île de La Réunion, INOVEST est le premier site industriel de l’océan Indien qui intègre 3 filières de valorisation des déchets ménagers et industriels. Il permettra de valoriser 72,5 % des déchets, un taux inédit en Europe.

Plastik’Akoz : 5 acteurs économiques réunionnais s’engagent à réduire leur impact environnemental

Toujours sur l’île de La Réunion, cinq acteurs locaux s’engagent dans la lutte contre l’usage du plastique et la protection de l’environnement du territoire : le 7 juillet 2020, Antenne Réunion, le Crédit Agricole de La Réunion, EDF Réunion, E. Leclerc Réunion et SUEZ R&V Réunion ont acté la création de l’association Plastik' Akoz

Pour Hervé Madiec, directeur du Territoire Outre-Mer recyclage et valorisation SUEZ à La Réunion, « nous intervenons dans l’univers du déchet depuis 35 ans à La Réunion et constatons leur augmentation constante, notamment celle du plastique, et les conséquences dramatiques pour notre territoire. En tant qu’acteur local, nous sommes sensibles à cet enjeu primordial pour la préservation de l’environnement et avons déjà engagé au sein de notre entreprise diverses actions en ce sens (réduction du plastique dans nos locaux, tri des déchets). Il nous a donc paru évident de nous unir avec nos quatre partenaires pour créer cette association. Fiers de cette initiative, nous espérons pouvoir changer les mentalités et inciter d’autres entreprises à nous rejoindre ». 

A l’occasion de la journée mondiale des océans, la Polynésienne des Eaux rejoint ce mardi la Brigade Verte pour une croisière pédagogique entre Tahiti et Moorea : une centaine d’élèves de Tahiti seront initiés à l’importance environnementale de l’assainissement collectif des eaux usées tandis qu’en Guadeloupe les équipes de Karuker’Ô se sont mobilisées pour l’opération « J’agis pour l’océan », une collecte de déchets organisée sur la commune du Moule.