« Il n’y aura plus le même droit du sol à Mayotte » a assuré le ministre de l’Intérieur et des Outre-mer, Gérald Darmanin, alors qu’il débute ce dimanche matin une visite de trois jours sur l’île, sur le thème notamment de la lutte contre l’immigration clandestine.
« D’abord, l’un des deux parents devra être régulièrement depuis plus d’un an sur le territoire afin que leur enfant soit reconnu comme français », a poursuivi Gérald Darmanin, dans une interview parue au JDD ce matin. « En clair, il n’y aura plus le même droit du sol à Mayotte qu’il y a sur le reste du territoire français ». Jusqu’ici, le délai de résidence pour l’obtention du droit du sol à Mayotte est de trois mois. Cette mesure devait déjà figurer dans le projet de loi spécifique à Mayotte avorté début 2022 après son rejet par les élus locaux.
« Avant la conception de l’enfant, il faudra être en situation régulière » a-t-il ajouté, soulignant un « changement profond et historique ». Gérald Darmanin justifie cette modification du droit du sol à Mayotte par une « situation très préoccupante » sur l’île, créant « une énorme délinquance ». « Nous accueillons mal ces nouveaux venus, qui ne vivent bien souvent que de rapine, de prostitution, de travail illégal et dans des conditions d’insalubrité inadmissibles ».
Le ministre de l’Intérieur et des Outre-mer a évoqué « la reconnaissance frauduleuse de paternité » comme « autre grand sujet de Mayotte ». « Des hommes, soit mahorais, soit étrangers en situation régulière, font des certificats de paternité à des enfants d’immigrés fraîchement arrivés » explique le ministre qui veut « revoir intégralement ce système » : « il faudra que ces pères prouvent qu’ils entretiennent l’enfant pendant trois ans et non plus seulement deux », a-t-il ajouté.
« Dernière mesure, portée par le garde des Sceaux, dans le cadre du projet de loi immigration, nous allons proposer au Parlement de passer de délit à crime certains trafics d’êtres humains les plus graves, dans des circonstances où des passeurs professionnels et organisés entassent des étrangers dans un camion ou un bateau et provoquent la mort de certains d’entre eux, afin qu’ils puissent être condamnés à des peines de prison de plus de dix ans ».
Gérald Darmanin, qui a tenu tout l'été un discours ferme sur l'immigration, qui doit faire l’objet d'un grand débat au Parlement à l'automne prochain avant la présentation d'un projet de loi, sera accompagné lors de son déplacement à Mayotte par Jean-François Carenco, ministre délégué en charge des Outre-mer, et Charlotte Caubel, secrétaire d’État en charge de la Petite enfance.
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Selon l'Insee, près de la moitié de la population de Mayotte ne possède pas la nationalité française, mais un tiers des étrangers sont nés sur l'île. Peuplée de 350 000 à 400 000 personnes selon les autorités, l’île a vu sa population quadrupler entre 1985 et 2017, sous l'effet conjugué d'une forte natalité (plus de quatre enfants par femme) et de l'importante émigration d'habitants venus de l'archipel voisin des Comores.
Le gouvernement met en avant ses chiffres de reconduites à la frontière, plus de 23 000 en 2021, soit une hausse de 78% par rapport à 2020, année marquée par le Covid, et l'augmentation des interceptions de « kwassas-kwassas », embarcations légères à moteur utilisées par les migrants comoriens. Mayotte, où l'âge moyen s'élevait à 23 ans en 2017, peine à insérer sa jeunesse dans la vie active : l'an dernier, 25 000 jeunes de 15 à 29 ans n'étaient ni en emploi, ni en études, ni en formation, selon l'Insee, soit 36% de cette tranche d'âge, une part trois fois plus élevée que sur le reste du territoire français (13%).
L'île, théâtre régulier d'affrontements entre bandes ou avec les forces de l'ordre, connaît aussi une délinquance élevée, bien plus importante qu'en France hexagonale, avec quatre fois plus de dépôts de plainte pour cambriolages et des agressions physiques beaucoup plus fréquentes. Une insécurité alimentée par une grande pauvreté : 194 000 Mahorais, soit 74% de la population, vivent avec un niveau de vie inférieur à 50% de la médiane nationale, selon l'Insee.
Les trois ministres en visite sur l’île vont aborder le sujet de l’immigration clandestine dès cet après-midi, avec une séquence dédiée aux nouveaux moyens pour la protection des frontières : présentation de l’avion de la lutte contre l’immigration clandestine et des nouveaux intercepteurs. L’occasion aussi lors de cette séquence d’expliquer les stratégies de lutte contre l’immigration à Mayotte. Plusieurs autres séquences dédiées à la sécurité et la lutte contre l’immigration sont prévues au programme des ministres.