En Guyane, un fléau invisible mais destructeur menace à la fois l’économie locale, la biodiversité et les écosystèmes marins : la pêche illégale. Ce phénomène représente pourtant une urgence environnementale et sociale. La Guyane a fait entendre sa voix lors de la Conférence des Nations Unies sur les Océans (UNOC) à Nice. Membre de la délégation guyanaise, Patrick Lecante, maire de Montsinéry-Tonnégrande et président du comité de l’eau et de la biodiversité, a lancé un appel fort pour défendre les écosystèmes guyanais face aux nombreuses pressions.
« Nous faisons partie du monde », affirme fièrement Patrick Lecante le maire de Montsinéry. « La Guyane existe, entre le Brésil et le Suriname, et elle a toute sa place dans les discussions sur les grands enjeux environnementaux. Le maire cite fièrement des espèces locales emblématiques : l’huître de Montsinéry, le lamantin, les crabes, mais aussi des espèces marines gravement menacées notamment par la pêche illégale.
Des eaux pillées, des espèces en danger
« La question de la pêche illégale, vraiment, cela nous insupporte », déclare-t-il avec émotion.« Il ne reste plus que huit femelles de tortue luth qui viennent sur nos côtes », s’indigne Patrick Lecante, maire de Montsinéry-Tonnégrande et président du comité de l’eau et de la biodiversité. La tortue luth, la plus grosse tortue du monde, est aujourd’hui en voie de disparition en Guyane, victime collatérale de cette pêche incontrôlée. Autre victime, le Sotalie, un dauphin d’eau douce endémique de Guyane, qui voit son habitat et sa survie menacés.
« C’est vraiment un fléau pour la Guyane à plusieurs titres », alerte Aurélie Lotte, de la Direction Générale des Territoires et de la Mer. Cette responsable de la planification maritime rappelle que ce type de pêche est souvent pratiqué par des navires étrangers, parfois sans pavillon, venant du Brésil, du Suriname.
Le constat est alarmant : les poissons sont pêchés en grande quantité, parfois à l’aide de filets destructeurs, sans respect des espèces protégées ou des quotas. Résultat : une raréfaction dramatique de certaines espèces. La pêche illégale, en plus de nuire à l’environnement, impacte directement les ressources halieutiques, réduisant les prises des pêcheurs locaux et créant une concurrence déloyale sur les marchés.
Des moyens de lutte encore insuffisants
Malgré les efforts des autorités, les moyens de lutte restent limités. Intercepter un navire illégal est une opération coûteuse et complexe, surtout dans l’ouest guyanais, où aucun site de déroutement n’est encore opérationnel. « On est obligé de ramener les navires jusqu’à Cayenne, ce qui mobilise beaucoup de ressources », explique Aurélie Lotte. Des pistes sont à l’étude pour « océaniser » les navires, c’est-à-dire les démanteler en mer après sécurisation.
Une coopération indispensable avec les pays voisins
Pour lutter efficacement contre ce trafic, la coopération avec les pays voisins comme le Suriname est essentielle. Bien que des initiatives existent, elles doivent être renforcées. « Il faut trouver les voies et moyens pour faire cesser cette dévastation de nos eaux territoriales », plaide Patrick Lecante.
D'autres menaces écologiques pèsent sur la biodiversité guyanaise : érosion du littoral due au changement climatique, dégradation des habitats naturels comme à Awala-Yalimapo, pollution plastique et traitement insuffisant des eaux usées. Autant de problématiques qui appellent à une mobilisation urgente, à tous les niveaux, a rappelé Patrick Lecante.
Face à l’urgence, élus, institutions, scientifiques et associations environnementales se sont mobilisés pour faire entendre la voix de la Guyane dans les grands débats internationaux.