Présidentielle 2022  : Les réactions des élus des Outre-mer

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Présidentielle 2022  : Les réactions des élus des Outre-mer

Même si la réélection d'Emmanuel Macron au niveau national est accueillie avec soulagement, les scores plébliscitant la candidate d'extrême-droite Marine Le Pen dans 6 collectivités sur 9 collectivités ultramarines interpellent la classe politique ultramarine. Retrouvez les réactions de ces élus ci-dessous.

 

En Polynésie, où le président de la République est arrivé en tête aux tours, c’est le soulagement pour son soutien Édouard Fritch, président de la collectivité d’Outre-mer, qui concède toutefois « des signaux d’alerte » de la population dans ce territoire où le scrutin national revêt un enjeu local. « Tout le monde s’est regroupé autour de Marine Le Pen pour faire obstruction au Tapura Huiraatira (son parti, ndlr) et me sanctionner moi-même », a-t-il confié à nos partenaires de Radio 1 Tahiti. 

Du côté des soutiens à Marine Le Pen, on se tire la couverture du succès car même si la candidate n’a pas obtenu la première place, elle a gagné près de 30 000 voix entre les deux tours, et près de 2 600 entre 2017 et 2022. L’ancien président Gaston Flosse, qui avait soutenu Marine Le Pen aux deux tours en 2017 et seulement au second tour en 2022, juge les résultats « très satisfaisants ». 

Une « récupération » selon le représentant local du RN, Éric Minardi. « Ça n’est pas Gaston Flosse qui a fait un bon résultat, c’est le Te Nati – Rassemblement national », insiste-t-il au micro de Radio 1 Tahiti. « Si Jean-Luc Mélenchon était passé au second tour, il aurait appelé à voter pour lui, parce que ce qu’il veut c’est battre le Tapura, battre Édouard Fritch, c’est son seul intérêt ». Là encore, les batailles locales prévalent sur le scrutin national et ce, à quelques semaines des Législatives et un an des Territoriales en Polynésie. 

ANALYSE. Présidentielle 2022 : En Outre-mer, les voix des colères

Autre réaction, celle des indépendantistes et plus précisément, du député Moetai Brotherson qui est, d’ailleurs, candidat pour un second mandat à l’Assemblée nationale en juin prochain. « Le vote des Polynésiens ne change rien à l’équation », a-t-il déclaré pour défendre une nouvelle fois l’appel à l’abstention du parti d’Oscar Temaru. Pour le député, le résultat final est un « avertissement » pour Édouard Fritch, son parti et son gouvernement : « les Polynésiens en ont marre ». Pour les Législatives, Moetai Brotherson, qui siège au GDR (communistes) a esquissé un possible rapprochement avec la France insoumise : « J’ai déjà rencontré Mathilde Panot, la présidente du groupe La France Insoumise à l’assemblée, c’est une amie, et elle m’a exprimé leur soutien ».

Dans tous les cas, en Polynésie, les regards sont bel et bien rivés vers le mois de juin. Tepuaraurii Teriitahi, une des candidates d’Édouard Fritch, entend « donner à Emmanuel Macron un majorité solide ». Gaston Flosse lui, veut « savoir ce que chacun vaut » avec, en ligne de mire, les Territoriales de 2023 durant lesquelles il verrait bien un affrontement en duel de son parti et du parti d’Édouard Fritch. Pour les candidats indépendantistes, il s’agira de ne pas donner de majorité à La République en marche. Enfin, pour le représentant local du Rassemblement national, l’enjeu est bien d’exister dans des élections locales, sans l’appui de partis locaux lors des scrutins nationaux. 

En Nouvelle-Calédonie, où une majorité des élus non indépendantistes ont, dès les prémices de la campagne, soutenu le président sortant, l’heure est naturellement à la satisfaction. « Je suis très heureuse et très fière qu’Emmanuel Macron ait été réélu à la présidence de la République » a déclaré la présidente de la province Sud, Sonia Backès, remerciant « les électeurs calédoniens qui lui ont fait confiance à 61,04% ». « La période qui s’ouvre pour la Nouvelle-Calédonie est une période essentielle dans laquelle nous aurons à décider de l’avenir de nos enfants ! Et je suis heureuse d’y travailler avec ce président », a-t-elle ajouté. « C’est la France qui a gagné » a déclaré de son côté le député UDI Philippe Gomes, lui aussi soutien d’Emmanuel Macron dès la première heure. 

 Là aussi, les législatives sont en ligne de mire. À ce titre, Sonia Backès appelle à « être le plus UNIS possible pour éviter l’élection d’un indépendantiste notamment dans la 2eme circonscription », regrettant « l’aventure solitaire du Rassemblement à qui nous avions proposé des candidats uniques ». L’union des non indépendantistes se fera plutôt avec le parti Calédonie ensemble de Philippe Gomès, rapprochant ainsi deux ex-rivaux au détriment des précédents alliés de Sonia Backès : le Rassemblement-LR. La présidente de la province Sud souhaite aussi « permettre au président d’avoir une majorité en élisant 2 députés issus de la majorité présidentielle. En effet, en faisant élire des députés LR, ou RN qui ne seront de toute façon pas majoritaires, on affaiblit la majorité présidentielle et on renforce le risque Mélenchon ». 

Elle précise toutefois : « Le parti que je préside ne porte pas de candidat issu de ses rangs mais soutiendra des candidats issus de la majorité présidentielle, qui permettent l’unité la plus large possible du camp non indépendantiste et qui défendront avec moi autour de la table des négociations un avenir de paix ancré définitivement dans la République Française ».

Du côté justement de ses anciens alliés du Rassemblement-LR, Thierry Santa, candidat aux Législatives, a adressé ses « félicitations » à Emmanuel Macron. « Face à une France profondément divisée et inquiète pour son avenir, je souhaite qu'il trouve les voies du rassemblement et de la concorde, dans le respect et l'écoute de tous » a-t-il poursuivi, estimant que « les élections législatives finiront de dessiner le visage de l'État pour les prochaines années. Je protégerai toujours avant tout l'intérêt général des Calédoniens dans ce même état esprit, les pieds ancrés dans nos racines et le regard tourné vers l'avenir ». 

A La Réunion comme aux Antilles, la percée de la candidate de l'extrême-droite est analysée comme une vote contestataire à l'encontre du président Emmanuel Macron. Sur l'ile intense, la candidate Marine Le Pen obtient 59,57% lors de ce second tour.  A l'exception des soutiens de Marine Le Pen qui voient en cette victoire de la candidate une « fierté », la majorité des élus réunionnais décryptent un vote de colère. 

Pour le Président du Département de La Réunion Cyrille Melchior, la priorité est d'être à l'écoute des électeurs réunionnais : «Les réunionnaises et les réunionnais nous interpellent, at-il précisé au site Clicanoo. Je ne peux que regretter le score du Rassemblement National à La Réunion qui doit bien sûr nous alerter. Il résulte des difficultés économiques et sociales auxquelles la population de notre île est confrontée. Nous devons être à l’écoute de ce message de colère, que nos concitoyens ont voulu adresser à l’Etat.»

Même constat pour pense Bachil Valy, référent En Marche à La Réunion. « C'est encore un vote contestataire qui a permis à Marine Le Pen de remporter la majorité des voix aujourd'hui», pense Bachil Valy, référent En Marche à La Réunion. « Le président actuel a tracé une ligne de conduite nationale qui va dans le bon sens mais il faut entendre cette contestation et en tirer toutes les leçons pour le futur.»

La présidente de la Région Réunion Huguette Bello qui s'est exprimée à l'issue des résultats, lit en ce scrutin « un vote d'alerte pour les Outre-mer et La Réunion». « Il nous faut  entendre la colère des Réunionnais et des Réunionnaises. L'extrême-droite a augmenté son score par rapport au second tour de 2017, ce qui est l'expression de souffrance sociales qui se sont accrues ces dernières années.(...) Cela montre que le système réunionnais est à bout de souffle. Il laisse de côté une fraction de plus en plus large de la population ». Soutien de Jean-Luc Mélenchon à La Réunion, Huguette a précisé que « le nouveau pouvoir doit s'inspirer» du programme porté par La France Insoumise « sous peine d'une aggravation de la situation.».  « Nous ne pouvons plus tolérer l'expansion de la pauvreté, la vie chère, du fléau du chômage. Dès ce soir, nous appelons le président de la  République à prendre à son tour ses responsabilités pour prendre la mesure de la gravité de la situation de  la Réunion ».

En Martinique dans le bassin Atlantique, la sénatrice Catherine Conconne et Secrétaire générale du parti Martinique Ensemble y relate un vote de souffrance et de rejet de la politique présidentielle. «Nous entendons la souffrance qui s’exprime derrière ce vote et l’expression d’un rejet de la politique présidentielle menée depuis 5 ans. Nous savons les difficultés qui touchent une grande partie de notre population : hausse des prix, difficultés d’accès aux soins, chômage, précarité, incertitude vis-à-vis de l’avenir… et nous voulons affirmer qu’il existe d’autres horizons que ceux qui se bâtissent sur les peurs».

Marcellin Nadeau, maire du Prêcheur et soutien de Jean-Luc Mélenchon: « Les électeurs ont voulu sanctionner une politique faite de mépris, de mesures anti-sociales, pénalisant le personnel soignant. On le voit bien que les Martiniquaises et Martiniquaises ont choisi Jean-Luc Mélenchon, une personne porteur d'une espérance, d'une alternative politique claire , mais au second tour, ils ont  malheureusement fait le mauvais choix de résister à Macron en votant Le Pen. C'est le rejet de la politique macroniste et cette peur de revivre cinq ans avec Macron. 

La Guadeloupe est le territoire d'Outre-mer ou Marine Le Pen réalise son meilleur score avec 69,60%. Dans un communiqué, Les socialistes de Guadeloupe disent prendre acte de « la réélection sans gloire ni élan, ce dimanche d'Emmanuel Macron». « les électrices et les électeurs ont donc fait le choix d’utiliser massivement le bulletin Marine LE PEN au second tour pour exprimer leur colère après un quinquennat qui n’aura pas tenu ses promesses et qui n’aura apporté aucune réponse concrètaux difficultés de nos territoires.

La Fédération socialiste de Guadeloupe met aussi à défaut les élus locaux. « On aurait en effet bien tort de croire que cette colère citoyenne ne vise que le président de la République et l’Etat. Car, l’échelon local est également mis en cause pour l’inefficacité d’un trop grand nombre de politiques publiques qui sont de sa compétence». Pour sortir de « l'impasse et de l'impuissance», le premier Secrétaire général du PS Guadeloupe appelle à « bâtir une majorité parlementaire pour imposer au chef de l’Etat une autre politique». « Cette alternative, seules les forces de gauche rassemblées apparaissent en mesure de l’incarner. Il nous revient donc collectivement, dès cette semaine qui s’ouvre, de créer les conditions de ce rassemblement autour d’une plateforme de propositions communes répondant de manière concrète et réaliste aux colères et aux attentes citoyennes», conclut Olivier Nicolas.

En Guyane, les réactions ont été nombreuses dans le département face au raz-de-marée produit par Marine Le Pen. D'abord, du côté des soutiens de Marine Le Pen, on se félicite de la progression de Marine Le Pen sur le territoire. Jérôme Harbourg, représentant Guyane du Rassemblement National a. déclaré dans France-Guyane« Le rassemblement national est le premier parti chez nous en Guyane. Nous ne sommes même plus dans l’opposition, nous sommes une force vive du territoire.Maintenant on va travailler sur la seconde étape, un projet. Aujourd’hui les Guyanais se sont réveillés, ils se sont mis debout face à un gouvernement qui les a méprisés. Aujourd’hui les Guyanais sont pour le développement de leur territoire sur l’aspect économique, mais aussi pour le développement des infrastructures. Marine Le Pen est la seule candidate à avoir proposé un projet spécifique pour l’ensemble de la Guyane. Les Guyanais nous ont fait confiance et continueront à le faire. Nous avons eu jusqu’en 2017 un vote de conviction. Aujourd’hui c’est un choix qui a été fait pour changer le système.

Rodolphe Alexandre, ancien président de la CTG et soutien du candidat Emmanuel Macron dit « pouvoir comprendre le rejet et la colère dans la politique du Président» au micro de Radio Peyi.« La question de la gestion de la crise sanitaire a été un élément déterminant, il y a aussi le problème du rejet de l'autre, de l'immigration illégale, la précarité, le cout de la vie» sont autant de facteurs qui expliquent le vote des Guyanais pour Marine Le Pen et qui explique ce vote contestataire selon Rodolphe Alexandre.

Pour Georges Patient, sénateur LREM, vice-président du Sénat, et correspondant opérationnel de la campagne d'Emmanuel Macron en Guyane, qui a salué la  réélection du président Emmanuel Macron, voit dans les résultats du scrutin guyanais «un vote d’approbation au programme de Marine Le Pen. «Dans le programme de Marine Le Pen il y a trop de choses négatives, qui relèvent presque du négationnisme. C’est comme si nous nous critiquions nous-mêmes et il m’est difficile de comprendre cette partie des électeurs. […] Comment peut-on voter au premier tour Jean-Luc Mélenchon pour ensuite voter Marine Le Pen ? C’est pour ça que je parle de négationnisme.», répond-il à France-Guyane.

Gabriel Serville, Président de la Collectivité Territoriale de Guyane souligne dans un communiqué avoir pris acte de la réélection d'Emmanuel Macron. Il ajouter noter « l’importance de l’abstention et du vote blanc ainsi que les votes convergents dans tous les territoires des outre-mer qui sont opposés à ceux observés en France hexagonale, mettant à nouveau au grand jour de profondes déconnexions politiques. Cela conforte l’exigence exprimée auprès du gouvernement de mieux répondre à la situation économique et sociale de la Guyane, car l’absence de considération s’est traduite soit par un vote protestataire massif, soit par un vote d’adhésion au programme de l’autre finaliste. Cette situation appelle une action résolue et efficace de l’Etat pour répondre aux attentes de la population dans les matières relevant de sa compétence.»

Avec Jean-Tenahe FAATAU