Les familles monoparentales deux fois plus nombreuses dans les DROM que dans l’Hexagone, selon l’Ined

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Les familles monoparentales deux fois plus nombreuses dans les DROM que dans l’Hexagone, selon l’Ined

Une nouvelle note de l’Institut national d’études démographiques (Ined), publiée dans son bulletin mensuel Population & Sociétés par le démographe Arnaud Régnier-Loilier, confirme ce qu’avaient constaté de précédents rapports : les familles monoparentales sont deux fois plus fréquentes dans les départements et régions d’Outre-mer (DROM) que dans l’Hexagone. Et la part de ces foyers sans conjoint a augmenté, en France hexagonale comme dans les Outre-mer. Les femmes peu diplômées ou issues de milieux défavorisés sont les plus touchées, et vivent dans une grande précarité.

En 2021, on comptait 46% de familles monoparentales avec un enfant mineur dans les DROM contre 23% dans l’Hexagone. Dans le détail, « plus d’une famille sur deux est monoparentale aux Antilles (54% en Martinique, 52% en Guadeloupe). Ces familles représentent 47% en Guyane et 39% à La Réunion. Elles sont aussi un peu plus souvent composées d’une mère élevant seule son ou ses enfants (dans plus de neuf cas sur dix dans les Drom contre huit cas sur dix dans l’Hexagone) que d’un père vivant avec ses enfants », précise l’Ined. Entre 2006 et 2021, la part de ces familles a continué de progresser à la fois en France hexagonale et dans les DROM.

Les naissances hors couple sont plus nombreuses dans les DROM, et concernent un peu plus d’une femme sur trois née entre 1941 et 1980. « Cette part est la plus élevée en Guyane (49%), légèrement inférieure aux Antilles et la plus faible à La Réunion (25%) », rapporte l’étude. Dans ce contexte, les pères, dont certains n’ont pas été informés de la grossesse ou vivant en couple ailleurs, ne reconnaissent pas leurs enfants et bien souvent le nom de famille de ces derniers est celui de la mère uniquement (39% dans les DROM contre 5% dans l’Hexagone).

L’Ined ajoute que les naissances hors du couple interviennent plus tôt que dans la vie des personnes vivant en couple. Pour la moitié des mères des DROM nées entre 1941 et 1980, le premier enfant hors couple est né avant l’âge de 22 ans, contre 25 ans pour celles avec conjoint. L’étude relève que la part des naissances adolescentes (avant les 18 ans de la mère) est environ trois plus élevée concernant les naissances hors couple (17%) que celles issues d’une union (5%). « Si la Guyane se caractérise de façon générale par des maternités adolescentes plus fréquentes (16% des premières naissances ont eu lieu avant 18 ans), c’est particulièrement notable pour les naissances hors couple (23%). Les maternités adolescentes sont plus rares à La Réunion (8%), en Martinique (8%) et en Guadeloupe (9%) », détaille l’Ined.

Cependant, si l’on prend en compte les naissances entre 1971 et 2010, l’âge du premier enfant vient à reculer de manière générale dans les DROM, tout comme en France hexagonale, que ce soit en couple ou en dehors. « Du fait de leur plus grande précocité, les naissances hors couple surviennent plus souvent alors que le père ou la mère vit encore chez ses parents. C’est le cas de 42% de ces mères et de 37% de ces pères », indique également l’étude. Les familles monoparentales étant le plus souvent formées de la mère et de son ou ses enfants, ce sont les parents de cette dernière qui contribuent fréquemment à les élever.

La situation sociale est bien souvent déterminante. D’après l’Ined, les femmes ayant eu d’importants problèmes d’argent durant leur jeunesse sont fortement susceptibles d’avoir un enfant en dehors du couple (41% contre 33% sans difficultés financières). Le niveau de diplôme est également important : « 45% des mères sans diplôme ont eu leur premier enfant hors couple contre 17% des titulaires d’un diplôme supérieur à un niveau bac + 2. Ce contraste se retrouve dans chaque Drom avec la même intensité », constate l’étude. Le fait d’avoir été élevé uniquement par sa mère implique la plupart du temps pour les femmes d’avoir un enfant hors couple (47% contre 32% de celles élevées par leurs deux parents). Par ailleurs, un deuxième enfant né hors couple s’avère bien plus fréquent si la première naissance l’était déjà.

L’auteur de la note s’interroge enfin sur les modèles de comportements : les grossesses sont-elles ou non planifiées, émanent-elles de la volonté de rechercher une identité sociale, d’échapper à des violences conjugales, ou, dans le cas des Antilles en particulier, de correspondre à la figure de la femme « potomitan » dans un contexte de matrifocalité dominante ? Quoi qu’il en soit, « bien plus souvent féminine et en place dès la naissance du premier enfant, la monoparentalité s’accompagne d’une grande précarité matérielle. La part de familles monoparentales en situation de grande pauvreté s’élève à 17% en Guadeloupe et en Martinique, à 24% à La Réunion et atteint 32% en Guyane, contre 5% dans l’Hexagone ».  

Sur le plan de la fécondité, l’Ined avance qu’en 2023, il était « proche aux Antilles et dans l’Hexagone (1,66 enfant par femme en Martinique et 1,88 en Guadeloupe contre 1,64 dans l’Hexagone), un peu plus élevé à La Réunion (2,5) et davantage encore en Guyane (3,3) ».

PM