La situation financière des communes des départements d’outre-mer en 2021

La situation financière des communes des départements d’outre-mer en 2021

A l’occasion du 104ème congrès des maires, qui se tient du 21 au 24 novembre à Paris, l’Association des maires de France (AMF) a publié une analyse de la situation financière des communes et des intercommunalités des cinq départements d’outre-mer : Guadeloupe, Guyane, Martinique, Mayotte et La Réunion. Cette analyse porte sur les comptes de gestion de 2021, au sortir d’une année 2020 marquée par le coup d’arrêt imposé par la crise sanitaire du Covid. Elle met en exergue des résultats certes contrastés mais globalement positifs compte tenu du contexte de rebond économique. Toutefois, les fragilités de ces collectivités les exposent d’autant plus au retournement de la conjoncture économique enregistré en 2022 dans le sillage de la guerre en Ukraine.

 

L’année 2021 aura donc été, pour les collectivités d’outre-mer comme pour celles de l'Hexagone, une année de répit et de rétablissement des comptes. Pour autant, estime le président de l’Association des maires de Guadeloupe, Jocelyn Sapotille, maire de Lamentin, « globalement, les finances communales se portent mal », même si seules trois des trente-deux communes guadeloupéennes, Basse-Terre, Pointe-à-Pitre et Saint-François, sont entrées en 2021 dans le dispositif d’accompagnement des communes ultramarines en difficulté financière.

Dans ce département, en ce qui concerne les communes, les dépenses de fonctionnement sont restées quasiment stables en 2021 (-0,03%) alors que les recettes de fonctionnement progressaient de 4,2%. Cette augmentation provient essentiellement des recettes fiscales, en hausse de 4,97% par rapport à 2020, due
principalement à l’augmentation de la taxe foncière. En outre, le produit de l’octroi de mer a progressé de 9,8%, comme en Martinique. Malgré ce retour à « bonne » santé financière, les dépenses d’investissement ont continué à chuter de près de 17% par rapport à 2020. Entre 2019 et 2021, les dépenses d’investissement des communes guadeloupéennes se sont effondrées d’un tiers.

La Guyane présente d’autres caractéristiques compte tenu, comme le souligne Michel-Ange Jérémie, maire de Sinnamary et président de l’Association des maires de Guyane, de la sous-évaluation de la population du département, où de nombreux foyers ne sont pas imposables, et du fait que l’activité spatiale sur la
base de Kourou est défiscalisée, ce qui prive la collectivité de recettes importantes. Malgré tout, les dépenses de fonctionnement des communes guyanaises (+2,7%) ont augmenté en 2021 moins vite que les recettes (+4,5%). Ce qui a permis d’améliorer leur épargne brute de plus d’un quart et de réduire de manière significative leur capacité de désendettement.

Toutefois, constate Justin Pamphile, maire du Lorrain et président de l’Association des maires de Martinique, « la situation financière des communes reste tendue », bien que les recettes de fonctionnement (+4,63%) aient augmenté en 2021 quasiment au même rythme que les dépenses (+4,75%). Le produit de l’octroi de mer, qui représente la moitié des recettes fiscales du département, a ainsi progressé de plus de 20% entre 2016 et 2021 et celui des taxes foncières et d’habitation de 22%. Ainsi, en 2021, les communes martiniquaises ont
enregistré une hausse des recettes d’investissement de l’ordre de 40%. Les communes martiniquaises disposaient en 2021 d’une capacité d’autofinancement trois fois supérieure à celles qu’elles offraient cinq en plus tôt. Pourtant, leur situation reste fragile compte tenu du montant du remboursement annuel de leur dette.

Madi Madi Souf, maire de Pamandzi et président de l’Association des maires de Mayotte, tient quant à lui à lancer « un cri d’alarme »., note-t-il. Héritage d’une situation où les recettes de la fiscalité directe restent difficiles à établir, les communes ne percevant le produit de l’octroi de mer que depuis 2019. Par ailleurs, compte tenu de l’insuffisance du recensement des bases cadastrales, les produits des impôts locaux directs restent très nettement inférieurs aux montants qui pourraient en être attendus. Néanmoins, la dotation globale de fonctionnement des communes de Mayotte a enregistré une progression de plus de 22 millions d’euros en cinq ans, signe s’il en était, même si cela reste en deçà des attentes, d’une volonté de rattrapage de la part de l’Etat dans ce département confronté aux pires difficultés.

Enfin, comme le constate Serge Hoareau, président de l’Association départementale des maires de La Réunion et maire de Petite-Ile, « la crise du Covid-19 a ébranlé les équilibres budgétaires » des communes. Il adresse également une supplique au gouvernement : « arrêter de procéder par des appels à projets car les collectivités d’outre-mer ne disposent pas de l’ingénierie nécessaire pour y répondre ».

L’année 2021 aura permis aux communes de La Réunion, qui ont enregistré une baisse de 1,93% de leurs dépenses de fonctionnement en 2021 et une hausse de 6,55% de leurs recettes de fonctionnement, de rétablir très fortement leur taux d’épargne brute (+168%). Elles se retrouvent ainsi à l’équilibre. Juste assez,
cependant, pour couvrir un encours de dette qui a progressé de près de 45% entre 2016 et 2021.

Bien que les situations soient différenciées, les communes d’outre-mer auront donc bénéficié en 2021 d’un répit financier favorable, qui n’aura pas pour autant engendré un rebond de leurs investissements. Car elles restent fondamentalement à la merci des moindres turbulences économiques et peu à même d’y faire face.

Consulter l'analyse de la situation financière des communes et des intercommunalités des cinq
départements d’outre-mer
 

Patrick Roger