JO Paris 2024 : Arrivée de la flamme olympique à Marseille à bord du Belem, un navire mythique, chargé d’histoires avec les Antilles-Guyane et miraculé de l’éruption de la montagne Pelée du 8 mai 1902

©  ©Vincent Curutchet - Caisse d’Epargne/ DR

JO Paris 2024 : Arrivée de la flamme olympique à Marseille à bord du Belem, un navire mythique, chargé d’histoires avec les Antilles-Guyane et miraculé de l’éruption de la montagne Pelée du 8 mai 1902

La flamme olympique arrive ce 8 mai à Marseille, après douze jours de traversée de la Méditerranée entre la Grèce et la France à bord du mythique trois-mâts, Le Belem, pour entamer un tour de France via six territoires ultramarins, jusqu’à Paris le 26 juillet, date de la cérémonie d’ouverture des JO 2024. Gros plan sur un fleuron du patrimoine maritime français, aux mille vies – miraculé entre autres déboires de l’éruption volcanique de la montagne Pelée du 8 mai 1902– chargé d’histoires avec les Antilles-Guyane et témoin privilégié d’un certain récit national.

 

La fièvre commence à monter sur le Vieux-Port de Marseille, la première ville française à accueillir la flamme olympique des Jeux Olympiques et Paralympiques de Paris 2024. A cette occasion, 150 000 personnes sont attendues pour voir le nageur Florent Manaudou, premier relayeur à porter la flamme olympique sur le territoire français. Une flamme partie du Pirée en Grèce le 27 avril dernier qui, après douze jours de navigation sur la Méditerranée, s’apprête à arriver dans le port marseillais à bord du trois-mâts Le Belem en ce 8 mai 2024. Une date doublement symbolique correspondant certes à l’armistice de 1945 qui marque la fin de la guerre en Europe mais aussi au 8 mai 1902, date de l’éruption de la Montagne Pelée à Saint-Pierre en Martinique où Le Belem a échappé de justesse au naufrage.

Car ce navire a connu des aventures incroyables dans la lignée des grandes épopées qui ont jalonné les siècles et façonné l’histoire. Il a de plus forgé un rapport particulier avec les Antilles-Guyane puisqu’il a servi de navire marchand entre Nantes et les Antilles et entre Nantes et la Guyane. Âgé de 128 ans, Le Belem, aujourd’hui fleuron du patrimoine maritime français, l’un des plus anciens grands voiliers naviguant au monde, a traversé trois siècles d’histoire maritime et a connu plusieurs vies, faisant désormais de lui un navire littéralement insubmersible.

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Un rapport particulier et privilégié avec les Antilles - Guyane

Construit aux chantiers Dubigeon de Nantes en 1896, la même année des premiers Jeux Olympiques modernes, Le Belem qui a pris le nom de son comptoir de commerce au Brésil, fait 58 mètres de long sur 8,8 mètres de large et peut transporter jusqu’à 675 tonnes de chargement. Ses voiles une fois toutes hissées peuvent atteindre 1 200m2. Navire de commerce au départ, il effectue 33 campagnes commerciales jusqu’en 1914, transportant des fèves de cacao d’Amazonie, du rhum et de la canne à sucre. Il a pour territoire l’Atlantique et les traversées vers les Antilles et l’Amérique du Sud entretenant ainsi un rapport particulier et privilégié avec les Antilles-Guyane.

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Au gré de ses changements d’armateurs, Le Belem est aussi utilisé en tant que ligne régulière avec la Guyane. Mais victime de la concurrence des bateaux à vapeur et à l’insécurité liée à la première guerre mondiale, il est sauvé de l’abandon par le duc de Westminster qui le transforme en yacht. Il sera ensuite revendu au brasseur Arthur Ernest Guinness qui le renomme Fantôme II. En 1939, il sera désarmé et croupira sur l’île de Wight (Angleterre) pendant les 5 ans de la seconde guerre mondiale. 

Touché, mais pas coulé

Entre temps, le mythique navire aura connu pas mal de déboires et de péripéties, échappant de peu à plusieurs reprises à la destruction. Le Belem a failli d’être détruit par le feu lors d’une escale au Brésil, subissant de graves dommages. Il sera ensuite victime d’une collision deux ans plus tard. Il échappera aussi en 1902 à l’éruption volcanique qui voit Saint-Pierre et son port rayer de la carte. 30 000 personnes périront lors de cette catastrophe, soit un cinquième de la population martiniquaise et l’un des bilans humains les plus lourds de l’histoire mondiale des éruptions volcaniques. Ironie du sort et miracle de l’histoire, Le Belem sera sauvé parce qu’il avait été privé de sa place habituelle dans le port de Saint-Pierre par un autre navire nantais et contraint de jeter l’ancre dans une baie à 30 km de là.

rade de Saint-Pierre en Martinique avant l'éruption © Fondation Bélem

 Dans cette longue liste de miracles, Le Belem bénéficiera encore de la bénédiction des dieux marins lors du séisme qui dévaste en 1924 le port de Yokohama au Japon où il mouillait. Il survivra ensuite aux bombes allemandes en baie de Cowes en 1941, en Angleterre. En 1951, racheté par un Italien, l’insubmersible navire connaîtra une longue période italienne sous le nom de « Giorgio Cini » en tant que navire-école pour orphelins de mer de la Fondation Victoria Cini. En piteux état, au bord de l’abandon, il retrouvera une nouvelle vie en 1979 à la faveur de l’initiative de l’association nationale pour le sauvetage et la conservation des anciens navires français (ASCANF) associée à la Marine Nationale et la Caisse nationale qui le rachète.

Témoin d’une certaine résistance aux affres du monde et du temps

Après y avoir effectué d’importants travaux de coque notamment, il retrouvera son lustre d’antan et est offert à la Fondation Belem, une Fondation dédiée. Aujourd’hui, Le Belem, dernier trois-mâts français, classé monument historique en 1984, parcourt les mers du monde, symbole du savoir-faire de la marine française. Résilient, il est le témoin d’une certaine résistance aux affres du monde et du temps. Il est aussi pour les ultramarins le témoin d’une certaine histoire faite de relations complexes et parfois de défiance à l’égard d’un certain récit national. Maintenant navire-école civil ouvert à tous, avec plus de 1 200 personnes embarquées chaque année, Le Belem, symbole multiculturel, fait partager outre des défis physiques et des moments intenses, des valeurs de solidarité, de fraternité, à l’image de celles que tentent de véhiculer les Jeux Olympiques et Paralympiques. En ce sens, il a encore rendez-vous avec l’histoire.

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E.B.