Histoire : il y a 140 ans naissait le Guyanais Félix Éboué, ancien gouverneur de l’Afrique équatoriale française et compagnon de la Libération

Félix Éboué (1884-1944) ©Wikimedia Commons

Histoire : il y a 140 ans naissait le Guyanais Félix Éboué, ancien gouverneur de l’Afrique équatoriale française et compagnon de la Libération

Né le 26 décembre 1884 à Cayenne, Félix Éboué effectua une remarquable carrière dans la Haute administration. Diplômé en droit et de l'École coloniale de Paris, il servira en Afrique ainsi qu’aux Antilles. Gouverneur du Tchad en 1938, il ralliera la Résistance organisée par le général de Gaulle et sera nommé gouverneur général de l'Afrique équatoriale française. Il fut membre du Conseil de l'Ordre de la Libération et inhumé au Panthéon.

 

Qui aurait pu prédire que le jeune Félix, d’une fratrie de cinq enfants issus d’un père orpailleur et d’une mère épicière, allait connaître un destin digne d’un roman ? Très tôt remarqué pour son intelligence et son vif état d’esprit, Félix Éboué entre comme boursier au lycée Montaigne de Bordeaux en 1901. L’élève s’intègre vite, et, titulaire du bac, il se rend dans la capitale où il décroche une licence en droit et un diplôme de l'École coloniale de Paris, qui forme les futurs administrateurs de la France d’Outre-mer. 

En 1909 il est nommé administrateur adjoint des colonies en Afrique équatoriale française (AEF), selon son souhait, à Brazzaville. Il rejoint de là l’Oubangui-Chari (dorénavant la République centrafricaine), où il passera une vingtaine d'années, gravissant progressivement les échelons administratifs. Passionné par les cultures, les langues et les traditions de la région, Félix Éboué écrit plusieurs ouvrages d’ethnologie et de linguistique sur les populations du territoire. Il participe d’ailleurs au Congrès international d'ethnographie de Paris à l'occasion de l'Exposition coloniale de 1931. Entre-temps il se marie en Guyane en 1922 avec Eugénie Tell, résistante et première femme guyanaise élue sénatrice puis députée. 

Eugénie Eboué et Félix Eboué © Collection particulière

Un an plus tard, Félix Éboué devient secrétaire général auprès du gouverneur de la Martinique, dont il assure l’intérim à deux reprises. Il travaille notamment à redresser l’économie de l’île. En 1934, il est muté au Soudan français (actuel Mali) à la même fonction avant d’être nommé quelques mois plus tard gouverneur intérimaire. En octobre 1936, retour aux Antilles où il occupe un poste similaire en Guadeloupe. Félix Éboué y met en place les réformes du Front populaire destinées à assainir les finances publiques de l’archipel.

À lire : Tribune. Félix Eboué le grand oublié de la France victorieuse, par Patrick Lingibé

Après un passage à Paris, il est nommé gouverneur du Tchad en janvier 1939. Son ordre de mission est, entre autres, d’améliorer les infrastructures économique et militaire de cette partie de l’AEF pour protéger la voie stratégique vers le Congo. Suite à la défaite de la France en juin 1940, Félix Éboué prend contact avec le général de Gaulle peu après son appel du 18 juin, et rallie officiellement le Tchad à la France libre avec les autres territoires de l’AEF (Congo, Centrafrique et Cameroun). En octobre, Charles de Gaulle rencontre le gouverneur au Tchad et le nomme membre du Conseil de défense, gouverneur général de l'AEF puis membre du Conseil de l'Ordre de la Libération. 

À lire aussi : « Eugénie Eboué - Portraits d’une combattante » de Guillaume Villemot ou le récit inspirant d’une figure historique guyanaise, dont la mémoire a été occultée

 Au mois de novembre, basé à Brazzaville (Congo), Félix Éboué organise la résistance. Avec le soutien des notables et chefs coutumiers, résultat d’un long travail d’échanges marqué d’une confiance réciproque, il parvient à lever une armée d’environ 40.000 hommes. L’AEF devient ainsi une base stratégique pour les alliés en même temps qu’une zone de recrutement des forces coloniales engagées dans la Deuxième guerre mondiale. Le gouverneur plaide aussi pour l'insertion de la bourgeoisie autochtone dans la gestion locale, l’organisation des communes africaines et la création d’un office du travail.

Le gouverneur Félix Éboué reçoit le général de Gaulle au Tchad en octobre 1940 ©United States Library of Congress/Wikimedia Commons

En février 1944, il participe activement à la Conférence de Brazzaville organisée par le Comité français de la Libération nationale, qui a pour objectif de réfléchir à une nouvelle architecture des possessions françaises. Félix Éboué y avance des idées plutôt conservatrices, notamment sur le maintien de l’indigénat (travail forcé des « indigènes »). À l’issue des travaux, très fatigué, le gouverneur se rend en Égypte avec son épouse et sa fille. Mais le 17 mai, il décède d’une congestion pulmonaire à l’hôpital français du Caire. Cinq ans plus tard, le 20 mai 1949, il est inhumé au Panthéon en même temps que Victor Schœlcher. Un symbole puissant pour cet ardent défenseur de la République.

 

PM