Dans « Eugénie Eboué – Portrait d’une combattante » paru aux éditions Dumerchez, l’auteur Guillaume Villemot nous dresse le portrait des différentes étapes de la vie d’Eugénie Eboué, femme de Félix Eboué et grande figure historique guyanaise, dont la mémoire a été occultée. Un ouvrage en forme d’hommage et de réhabilitation d’une grande dame qui a fait de la lutte contre les inégalités une raison de vivre et dont la vie est inspirante.
Trop souvent dans le récit national, les femmes et les hommes issus des outre-mer sont relégués au second plan et la place qui leur est réservée réduite à la portion congrue. Certes, administrateur colonial, résistant de la première heure durant la seconde guerre mondiale, troisième compagnon de la libération et homme politique, le Guyanais Félix Eboué a eu les honneurs qu’il mérite et repose depuis 1949 au Panthéon. Mais alors que dire de sa femme Eugénie Eboué, née Eugénie Tell en Guyane en 1889 et disparue en 1972, dont la carrière notamment politique est aussi sinon plus riche et foisonnante que celle de son mari et qui a littéralement été effacée des souvenirs et des livres d’histoire ?
Il y a dans l’histoire des couples indissociables comme ceux que formaient pour le service de la science Pierre et Marie Curie ou Elsa Triolet et le poète Aragon pour la littérature et l’illustration de l’amour, on peut également dire que pour ce qui concerne la lutte pour la liberté le couple Eugénie et Félix Eboué en est le symbole. Mais l’histoire a ses mystères et ses ruses et a presque totalement occulté Eugénie Eboué de nos mémoires.
Une femme politique d’envergure
Pourtant celle –ci ne s’est pas contentée d’être la femme du grand résistant et d’élever ses enfants, elle a entre autres activités participé, grâce à ses connaissances musicales, aux travaux de son mari Félix Eboué qui a publié un mémoire d’ethnographie, de linguistique et d’économie sur les peuples de l’Oubangui – Chari intitulé « La clef musicale des langages tambourinés et sifflés ». Elle-même résistance pendant la seconde guerre mondiale, elle a obtenu la Croix de guerre et décorée de la médaille de résistance française. Après la mort de son mari, Félix Eboué, elle deviendra une femme politique d’envergure et a exercé plusieurs mandats en étant successivement députée, conseillère de la République, sénatrice de Guadeloupe et membre du Conseil économique et social.
Qui était donc cette femme qui côtoyait la fine fleur de l’élite parisienne constituée d’académiciens, de Prix Goncourt, de Prix de Nobel de littérature, de résistants, de vedettes du music-hall et même de présidents de la République française ou du Sénégal ? C’est cette mémoire occultée que l’auteur Guillaume Villemot à travers son ouvrage « Eugénie Eboué – Portraits d’une combattante » tente de réhabiliter et de rappeler aux bons souvenirs du grand public. Une grande dame, dont l’action et les différents engagements ont toujours été au service de la lutte contre les inégalités.
Une femme d’exception si actuelle
Connu pour avoir fondé le festival des conversations qui a pour objectif de mettre en avant de nouvelles pratiques afin de développer le mieux vivre ensemble, cofondateur avec l’écrivain Alexandre Jardin de « Bleu, Blanc, Zèbre », mouvement citoyen regroupant de citoyens de la société civile porteurs d’actions qui apportent des solutions durables, Guillaume Villemot est un homme d’actions et d’engagement. Il a aussi écrit plusieurs ouvrages notamment « Charles De Gaulle, L’homme qui disait non » éditions Lire c‘est partir en 2017 ou encore « André Malraux, l’homme qui osait ses rêves » en 2023 aux éditions Baker Street.
Guillaume Villemot a été séduit par le parcours d’Eugénie Eboué. Comme elle, sans y être né, il a fait ses premiers pas en Guyane, dont il garde encore en mémoire les couleurs, les sons, les accents, les chants et les odeurs si typiques. Comme elle, il a connu d’autres territoires ultramarins à l’instar de la Nouvelle-Calédonie, autre terre de bagne. Comme elle surtout, il mène des combats contre les inégalités.
Pour celui qui aujourd’hui préside le comité de soutien à la panthéonisation d’Eugénie Eboué, cet ouvrage consacré à cette grande figure historique n’est pas seulement une forme d’hommage à une « femme d’exception si actuelle », mais c’est aussi un récit inspirant : une ode à l’engagement, à l’action et à l’espoir au service de l’amélioration de l’être humain. Des valeurs que symbolisait Eugénie Eboué. En ce sens, leurs destins ne pouvaient que se croiser.
E.B.
« Eugénie Eboué – Portraits d’une combattante »
De Guillaume Villemot
Editions Dumerchez
110 pages