Guyane : Premier bilan positif de l'opération "Kapalu"pour éradiquer l'orpaillage illégal dans le bassin de la Camopi

Le général Marc Le Bouil, commandant des Forces Armées en Guyane, présentant un premier bilan de l'opération Kapalu © DR

Guyane : Premier bilan positif de l'opération "Kapalu"pour éradiquer l'orpaillage illégal dans le bassin de la Camopi

Une opération d'envergure, baptisée Kapalu (qui signifie "casse-tête" en langue Wayampi), a été lancée en octobre dernier, peu après la fin des Jeux Olympiques. Menée conjointement par les Forces Armées et la gendarmerie, cette initiative vise à éradiquer l'orpaillage illégal sur la rivière Camopi, une zone reculée de la Guyane. Cette région, qui s'étend sur 3.000 km² et est entièrement couverte de forêt dense, représente un défi logistique et opérationnel majeur. Un premier bilan de l'opération a été présenté mardi à Camopi. Focus grâce aux interviews de nos partenaires de Radio Péyi.


L'opération Kapalu se déroule en trois phases distinctes : l'identification des sites d'orpaillage illégaux, l'intervention sur ces sites, et enfin la surveillance pour empêcher la réinstallation des orpailleurs.
Le général Marc Lebouil, qui supervise une partie des opérations, a détaillé les moyens déployés : « Nous sommes de l'ordre de plus de cent-cinquante soldats et gendarmes déployés pendant dix-huit semaines au point maximum sur l'ensemble de la période. Et donc quand je parle de soldats, il y a également évidemment les moyens aériens qui ont été engagés de façon à gagner de la mobilité et à pouvoir surprendre les orpailleurs ».

Les efforts déployés ces dernières années ont déjà permis de réduire significativement l'orpaillage illégal dans cette zone. Le général Jean-Christophe Saint-Yves, commandant de la gendarmerie de Guyane, a souligné les progrès accomplis : « On évalue l'orpaillage illégal ici en Guyane par bassin, et le bassin de la Camopi aujourd'hui ne représente plus que 3% de l’orpaillage illégal sur l'intégralité de la Guyane. On est passé de 20% il y a encore cinq ans à 3%. C'est pour ça qu'on n'est vraiment pas loin, avec cette opération Kapalu, d'arriver à l'éradication. ».

-Site d'orpaillage illégal abandonné, sur le bassin de la Camopi © DR

Cependant, malgré ces avancées, la lutte contre l'orpaillage illégal ne se limite pas à la destruction des sites. Il est également essentiel de démanteler les réseaux d'approvisionnement et de poursuivre les responsables de ces activités criminelles organisées. Le procureur général Joël Sollier a expliqué les défis judiciaires :
« L'étape d'après, c'est d'être en capacité de juger ces personnes pour les actes dont ils sont responsables. Collectivement, c'est une activité de criminalité organisée. Pour faire tourner un site où vous avez plusieurs centaines de personnes, avec des besoins logistiques considérables, vous comprenez bien que ce n'est pas à la portée de quelqu'un d'isolé. Il ne peut y avoir qu'une organisation qui achemine quelque chose comme quatre cent mille litres de pétrole chaque année, des quads en quantité, des pirogues, de la nourriture pour plusieurs centaines voire plusieurs milliers de personnes. À l'heure actuelle, nous ne sommes pas en capacité de juger ces affaires pour ce qu'elles sont. Pour arriver à le faire, il faut des enquêtes qui démontrent que le fonctionnement d'un site obéit à l'activité de telle ou telle personne ou tel groupe de personnes qui le fait fonctionner ».

Le choix du bassin de la Camopi pour l'opération Kapalu n'est pas anodin. Le préfet Antoine Poussier a expliqué les raisons de cette sélection : « On avait une population d'orpailleurs estimée à environ trois cents, ce qui était suffisamment importante pour qu'elle soit intéressante, mais en même temps suffisamment limitée pour qu'on puisse avoir une action efficace. Par ailleurs, on a l'avantage d'avoir une excellente coopération avec les forces armées brésiliennes. Enfin, il n'y a pas de point de ravitaillement logistique le long de l'Oyapock, à la différence du Maroni, ce qui évite une régénération trop rapide des sites, qu'ils soient alluvionnaires ou primaires ».

Une réunion s'est tenue mardi 28 janvier 2025 à Camopi pour dresser un premier bilan de l'opération Kapalu et envisager son application à d'autres zones de la Guyane touchées par l'orpaillage illégal. Cette initiative marque une étape importante dans la lutte contre ce fléau et souligne la complexité des défis à relever pour parvenir à une solution durable. 


Damien CHAILLOT