Le préfet Antoine Poussier a annoncé mardi soir le déploiement ce mercredi d’une trentaine de gendarmes supplémentaires, -en plus d’une opération « place nette »- à Saint-Laurent du Maroni, commune de l’Ouest guyanais bouleversée par le meurtre d’Hélène Cétout-Tarcy, docteure en pharmacie. Hier, près de 700 personnes se sont mobilisés pour manifester leur colère.
« Je partage l’émotion que ressent la population, et je comprends sa colère », a déclaré le préfet, interrogé mardi soir par Guyane La 1ère. « Il nous est apparu nécessaire d’engager une opération immédiate » a-t-il assuré, annonçant « dès demain », l’envoi « d’une trentaine de gendarmes supplémentaires (…), coordonnés avec la police aux frontières, avec les douanes et avec les services de contrôle de l’État pour lutter contre la délinquance en général, contre la circulation des armes et tous les trafics qui viennent de l’extérieur ».
Cette opération « durera le temps qu’il faut pour rétablir la confiance et la sécurité à Saint-Laurent du Maroni », commune de l’Ouest guyanais, sur les rives du fleuve Maroni, qui marque la frontière avec le Suriname. Lundi soir déjà, la maire de la commune Sophie Charles avait demandé la mise en place d’une opération « place nette XXL », entendue par Paris : « nous allons le faire, c'est la moindre des choses » a assuré la ministre déléguée aux Outre-mer, mardi à l’Assemblée nationale, interrogée par le député de Guyane Davy Rimane (GDR). Cette opération devrait avoir lieu dans les prochains jours.
« Trop c’est trop »
Toutefois pour le député, « l’État n’est pas au niveau de garantir la sécurité de la population », estimant qu’une opération « place nette » « ne changera rien aux causes profondes ». « Les effets de manche et les coups de com, ça plait peut-être à vos abonnés, pas à nous », a-t-il fustigé. A l’image de la critique acerbe du député, la population locale a, elle aussi, fait entendre sa colère à Saint-Laurent du Maroni, où près de 700 personnes se sont mobilisés devant la sous-préfecture à l’appel du collectif Positif Soolan Pikin, forçant les grilles du bâtiment pour être reçues par la sous-préfète, revenue en urgence de Cayenne.
« Trop c’est trop, nous sommes fatigués de ça », a lancé une manifestante devant la sous-préfecture, au micro de Guyane La 1ère. « Tu laisses tes enfants, tu sors et tu n’es même pas sûre si tu vas rentrer. Ils rentrent chez les gens, ils agressent » décrit cette habitante de Saint-Laurent du Maroni qui compterait, selon la maire, 14 gangs. « J’ai des enfants, et je n’aimerais pas qu’ils grandissent dans ce climat d’insécurité. Cette manifestation est une bonne chose, il ne faut rien lâcher » a estimé une jeune mère de famille, elle aussi mobilisée devant la sous-préfecture.
Pour l’autre député de Guyane, Jean-Victor Castor (GDR), présent ce mardi à la manifestation de Saint-Laurent du Maroni, l’envoi de forces de l’ordre sur le Guyane, « avec le turn over permanent (…), ça ne marche pas ». « Le vrai problème en Guyane, c’est qu’il faut développer ce territoire », a-t-il ajouté. « On est revenu avec des questions sans réponses » a déploré Fabrice Asosie, président du collectif Positif Soolan Pikin, reçu par la sous-préfète.
Marche des pharmaciens et médecins libéraux lundi prochain
Docteure en pharmacie « engagée », sapeur-pompier volontaire, fondatrice de Djok Start up et parmi les lauréates du concours « 101 femmes entrepreneures » lancé par Matignon, Hélène Cétout-Tarcy, 34 ans et mère de trois enfants, a reçu plusieurs coups de couteau mortels lors d'une tentative de vol de son téléphone portable dans la galerie marchande d'un supermarché. Elle a succombé à ses blessures quelques heures après. Hier, la plupart des pharmacies du territoire ont fermé leurs portes. L’ordre des pharmaciens de Guyane et l’union régionale des médecins libéraux ont décidé d’une marche, lundi prochain, en hommage à Hélène Cétout-Tarcy.
Un sans domicile fixe « né en 1989 », a été arrêté et placé en garde à vue, selon le magistrat. « Déjà condamné à de multiples reprises pour vols et violences, il était sous l'emprise de produits stupéfiants au moment du passage à l'acte », a précisé le procureur qui ouvrira mercredi une information judiciaire pour « meurtre aggravé précédé, accompagné ou suivi d'un autre crime ». Département le plus criminogène de France en proportion de sa population, la Guyane a connu une année 2023 record en termes d'homicides, avec 20,6 tués pour 100 000 habitants, quand la moyenne nationale s'établissait à 1,5/100 000.